Il est donc 23h et je quitte donc le ravitaillement de la Balme après 3'23" de pause exactement, direction la montagne, la vraie. Enfin ! :-)
On quitte ici le parcours de l'an dernier, qui nous avait fait redescendre sur les Contamines via le Signal.
LA BALME - COL DU BONHOMME - 3.4 km - 622m+ - 0m-
Pour l'instant on quitte le ravito sur un chemin de terre compacte, lisse et humide, mais qui heureusement ne glisse pas vraiment. Par contre il est parsemé de dalles rocheuses. Il y a encore quelques spectateurs, en pleine nuit, qui redescendent sans doute après avoir accompagné leur coureur un bout de chemin, et qui nous encouragent au passage. Puis on arrive sur le sentier du Col du Bonhomme, que je suis en pilote automatique dans un petit train de coureurs (que des mecs, je n'ai quasi pas vu de filles de toute la course), chacun dans sa bulle.
il commence à faire froid, il y a du vent, je passe mon temps à me moucher... Au point de me dire en rigolant que je vais plus me déshydrater de ça que de transpiration. Beaucoup de coureurs s'arrêtent pour s'habiller plus chaudement. Je sors mon k-way (que j'avais déjà mis à portée de main dans la poche côté de mon sac au ravito) et l'enfile par dessus mon sac à dos sans même m'arrêter. Par contre le zip se bloque je n'arrive pas à le fermer, juste assez pour qu'il arrête de claquer au vent. Mes doigts sont déjà un peu gelés et moins habiles, mais je n'ai pas pensé à mettre mes gants à portée de main, dommage. Je me promets de les sortir au prochain ravito.
La nuit est magnifique, on avance sous le ciel étoilé avec un croissant de lune qui se lève derrière les montagnes. Derrière nous un immense serpent de frontales dessine le chemin parcouru, alors que devant le serpent dessine les lacets qui nous attendent encore, avant de disparaître derrière la crête.
On avance sur un sentier un peu rocailleux. Je commence à fatiguer un petit peu, et me contente de suivre le rythme donné par les autres en attendant que ça passe.
COL DU BONHOMME - 8h11'25" de course - samedi, presque 1h du matin
De courageux bénévoles vont passer toute la nuit ici à pointer les coureurs au col. Merci à eux pour leur présence réconfortante et leurs encouragements.
COL DU BONHOMME - REFUGE CROIX DU BONHOMME - 2km - 165m+ - 51m-
Il ne reste plus grand chose à monter, puis on commence à redescendre, mais je n'ai même pas vu le refuge... Du coup je me demande si on a vraiment fini de monter, j'espère qu'il n'en reste pas encore un coup de cul...
REFUGE CROIX DU BONHOMME - LES CHAPIEUX - 5.2 km - 0m+ - 885m-
Et effectivement, après cette longue montée, on redescend sur les Chapieux, j'ai hâte d'arriver à ce ravito où je dois retrouver Mika. Cette courte descente passe vite.
RAVITO LES CHAPIEUX - 49.4 km - alt 1549m - 8h58'12" de course - samedi 1h30 du matin - 16'02" de pause
Après cette première grosse "bosse", ça fait du bien de redescendre dans la civilisation, et en plus Mika est là ça faisait longtemps. D'un coup on sort de la nuit pour déboucher entre des barrières qui nous mènent vers des tentes qui abritent le ravito.
Il y a la queue... Mika au bord des barrières me prévient "ta 2e lampe", "ta 2e lampe", je ne comprends rien, je crois qu'il me dit de changer de lampe parce que la mienne fatigue... mais c'est surtout moi qui fatigue, si c'était le cas il me dirait plutôt de changer de batterie, pas de lampe, et en plus je l'avais éteinte pour rentrer dans le ravito... En fait il s'avère qu'il y a un contrôle du matériel obligatoire, d'où la queue, et d'où Mickael qui me prévenait de sortir ma 2e lampe pour la montrer aux bénévoles.
Dégustation de soupe aux Chapieux |
Il y a la queue... Mika au bord des barrières me prévient "ta 2e lampe", "ta 2e lampe", je ne comprends rien, je crois qu'il me dit de changer de lampe parce que la mienne fatigue... mais c'est surtout moi qui fatigue, si c'était le cas il me dirait plutôt de changer de batterie, pas de lampe, et en plus je l'avais éteinte pour rentrer dans le ravito... En fait il s'avère qu'il y a un contrôle du matériel obligatoire, d'où la queue, et d'où Mickael qui me prévenait de sortir ma 2e lampe pour la montrer aux bénévoles.
Ma frontale marche toujours bien :-) |
Je traverse le ravito bondé sans m'arrêter, trop la cohue, j'arrive tout juste à saisir un bol de soupe et m'enfuit, déclinant l'offre d'une bénévole de me donner une chaise, je sors la boire au coin du feu avec Mika, tranquilles au calme, un banc pour nous tous seuls. J'en profite pour m'étirer doucement, et étudier la suite de mon plan de course. Pour l'instant je suis spot on dessus, à 5mn près à chaque ravito. Pas mal pour un plan que j'avais élaboré l'an dernier et pas du tout remis à jour depuis. Mais du coup je me demande si l'an dernier je l'aurais aussi bien tenu, avec un peu moins d'entraînement et d'expérience... J'arrive enfin à zipper mon kway, toute seule, après tout Mika n'a pas le droit de "m'aider en me touchant" en dehors des zones d'assistance :-) c'est écrit tel quel dans les règles ! Par contre j'oublie de mettre gants et bonnet à portée de main...
Je perds quelques minutes à faire la queue aux toilettes, puis c'est reparti pour le 2e gros morceau de cette première nuit : le col de la Seigne, frontière avec l'Italie.
LES CHAPIEUX - COL DE LA SEIGNE (Italie) - 10.3 km - 958m+ - 10m-
On commence par monter vers la Ville des Glaciers. Une montée très douce, sur une large piste, et j'éteins la frontale pendant un long moment pour admirer le magnifique ciel étoilé. J'avance à la lueur des étoiles et des quelques lampes autour de moi. La visibilité est suffisante pour trottiner, sans me fatiguer, en alternant quelques passages de marche dès que j'en sens le besoin ou l'envie.
J'ai peu de souvenirs de la montée au Col de la Seigne, ça passe toujours relativement bien, mais un peu dans le dur quand même, en pilote automatique. Tant et si bien que je finis par rater une bifurcation... Arrivée sur un replat je me force à repartir en trottinant, m'étonnant à peine de ne plus voir les torches des coureurs que j'essayais de rattraper, je les crois disparus derrière un virage, quand j'entends crier derrière moi, un italien "ie ie ie! alta, alta!" Je ne comprends pas tout de suite ce qui se passe, hésite à continuer mon chemin, puis me retourne à tout hasard en croyant que j'ai pu faire tomber quelque chose, et là je vois le petit train de frontales juste au-dessus de moi sur une autre trace, et soudain "alta" fait enfin sens : en haut ! demi-tour, et je me replace dans le train.
On avance tous dans le plus grand silence, aussi j'accueille avec gratitude la mini "conversation" bienveillante avec un gars qui s'excuse après avoir marché sur mon bâton qui avait traîné un peu trop longtemps derrière moi. Il suffit d'un rien pour sortir un peu de la torpeur de la fin de nuit. Je sors une barre salée de ma poche et en avale difficilement la moitié mais ça ne va pas beaucoup mieux. J'hésite un moment à boire mon V shoot en me disant que j'en ai un autre qui m'attend à Courmayeur et que ce serait dommage d'en prendre 2 trop proches, mais j'en ai quand même bien besoin donc je me le descend maintenant.
Derrière nous s'étale un serpent immense et compact de frontales, et un autre est devant pour nous montrer le chemin, un Z s'étale jusqu'à la crête qu'on ne voit pas, avant de disparaître derrière.
http://www.peignee-verticale.com/2013/09/utmb-2013-recit.html |
COL DE LA SEIGNE - ALT2516m - KM59.7 - 11h43'12" de course - 4h15 du matin
Après 10km et 2h30 de montée, ça fait du bien d'arriver en haut. Devant nous apparaît maintenant l'Italie. Enfin, apparaîtrait, s'il faisait jour. Merci à Vincent pour ses encouragements "le col de la Seigne, c'est tellement beau que la montée passe toute seule". Ah, je reviendrai de jour alors ! :-) Encore une fois merci aux bénévoles qui attendent au col, dans le vent, pour nous pointer tous les uns après les autres, pendant des heures (le premier coureur a dû passer vers 23h vendredi soir, le dernier vers 6h30 le samedi matin).
COL de la SEIGNE - LAC COMBAL - 4.4 km - 0m+ - 532m- - 41'37"
Suit une courte descente sur une large piste, dans laquelle je passe mon temps à doubler des petits groupes de coureurs, mais toujours en mode économique. Je vois un petit groupe devant, j'accélère un peu le temps de les rattraper, récupère 2mn dans le confort du groupe, avant de m'éloigner seule dans la nuit vers le groupe suivant.
Mais très vite on arrive déjà sur un replat où sont dressées plusieurs tentes, au milieu de nulle part. Je crois que je ne m'attendais même pas à ce ravito, mais c'est une bonne surprise.
Suit une courte descente sur une large piste, dans laquelle je passe mon temps à doubler des petits groupes de coureurs, mais toujours en mode économique. Je vois un petit groupe devant, j'accélère un peu le temps de les rattraper, récupère 2mn dans le confort du groupe, avant de m'éloigner seule dans la nuit vers le groupe suivant.
Mais très vite on arrive déjà sur un replat où sont dressées plusieurs tentes, au milieu de nulle part. Je crois que je ne m'attendais même pas à ce ravito, mais c'est une bonne surprise.
Ravito LAC COMBAL - KM64.1 - ALT 1970 - 12h25 de course - samedi 5h du matin (barrière 7h45) - 3mn39 de pause
Le ravito est très sympa, même si je ne verrai même pas le lac, il fait toujours nuit noire. Les bénévoles servent des parts de tarte, et des morceaux de barres céréales à l'orange, tellement bonnes que j'abandonne ma part de tarte pour prendre 2 autres morceaux de barre pour la route, sous le sourire amusé de la bénévole Overstims ^^
Le ravito est très sympa, même si je ne verrai même pas le lac, il fait toujours nuit noire. Les bénévoles servent des parts de tarte, et des morceaux de barres céréales à l'orange, tellement bonnes que j'abandonne ma part de tarte pour prendre 2 autres morceaux de barre pour la route, sous le sourire amusé de la bénévole Overstims ^^
Je ressors très vite des tentes mais marche encore un peu sur le plat, en mangeant mes 2 bouts de barre. Je veux en profiter pour vérifier mon plan de course, mais je réalise que je l'ai perdu, ouiiin ! :-( Du coup je sors enfin la musique (qui était à portée de main tout du long mais j'avais eu la flemme jusque là...) et c'est reparti en trottinant et en chantant ^^ A tue-tête quand je suis seule, ou intérieurement quand il y a du monde. On est quand même de plus en plus dispersés maintenant. Une bonne petite montée m'attend encore avant d'aller retrouver Mika à Courmayeur après cette longue nuit (j'attend le soutien avec impatience !).
LAC COMBAL - ARETE du MONT-FAVRE - 4.3 km - 457m+ - 10m- - durée 1h04
Cette section est splendide. Le ravito et la musique m'ont réveillée, j'ai retrouvé la forme, d'autant que le jour n'est plus très loin. Les premières lueurs apparaissent, le ciel devient un peu moins sombre et les hautes arêtes commencent à se détacher à l'horizon, noires sur fond bleu nuit, toujours illuminé d'étoiles. C'est dans ces moments qu'on se dit qu'on a vraiment de la chance d'être là, en pleine montagne, sérieusement, je n'échangerais ma place pour rien au monde, malgré les plus de 6000m de D+ et la bonne centaine de kilomètres qu'il me reste à parcourir. Ce n'est d'ailleurs pas le moment d'y penser, et jamais je n'envisagerai la course dans son intégralité, mais toujours découpée en blocs : la première nuit en France, la journée en Italie, et les 3 dernières bosses en Suisse. Mais pour l'instant je profite juste du moment.
J'ai les doigts qui commencent à sérieusement geler, je n'ai toujours pas sorti mes gants, entre oublis et flemme. Résultat je ne sens plus les petits doigts, je les fais bouger et serre fort mes bâtons pour faire revenir le sang, puis avec le lever du soleil ils finissent par se réchauffer d'eux même peu à peu.
MONT FAVRE 13h32'41" de course - 6h du matin
ARETE du MONT-FAVRE - COL CHECROUIT-MAISON VIEILLE - 4.9 km - 11m+ - 509m- - durée 42'35"
Une fois passée l'arête, on voit Courmayeur et sa vallée s'étendre en bas. Beaucoup plus bas, 1235m plus bas pour être exacte. Miam miam :-D
Mais pour l'instant je réussis à me retenir d'aller trop vite dans la descente. Je trottine juste ce qu'il faut pour ne pas perdre de temps. Et j'admire le paysage et le lever de soleil.
Mais pour l'instant je réussis à me retenir d'aller trop vite dans la descente. Je trottine juste ce qu'il faut pour ne pas perdre de temps. Et j'admire le paysage et le lever de soleil.
RAVITO COL CHECROUIT MAISON VIEILLE - KM73.3 alt 1956m - 14h14'42" de course - 6h45 du matin - 1'14" de pause
On atteint un tout petit ravito à l'auberge Maison Vieille - Checrouit, commun avec la TDS, qui y passe en sens inverse, en montant depuis leur départ à Courmayeur. Avec 2-3 autres gars arrivés en même temps, on admire la lumière du lever du soleil sur les hauts sommets environnants.
Un cheval broute sur le chemin, je commente qu'on serait plus vite en bas sur son dos ^^ Puis c'est parti pour la fin de descente.
Pendant ce temps, le lever du jour vu depuis Courmayeur par Mika |
CHECROUIT - COURMAYEUR - 3.8km - 0m+ - 334m- - durée 38'07"
Je me rappelle qu'il faut gérer la descente (comme dirait Kilian, jusqu'à Courmayeur c'est l'échauffement), donc je me maintiens au même niveau que les autres coureurs autour de moi sans forcer. Je finis même par les perdre quand je trouve qu'ils vont trop vite... :-o Un peu difficile psychologiquement pour moi de me faire semer en descente ^^ (alors que je pourrais très bien les suivre) mais je me dis que ma prudence payera tôt ou tard. Parce que c'est quand même assez raide, le sol est un peu dérapant, fait d'un genre de sable/cendres, il y a de nombreuses marches de taille irrégulières, et en plus les coureurs devant prennent de l'avance en coupant tous les lacets entre les arbres (c'est maaaal).
Comme je me sens très bien, je finis par me lâcher un peu plus en suivant un gars qui va vite, jusqu'à en faire tomber mon téléphone qui bondit hors de ma poche (merci la super coque survivor ^^). Du coup je le mousquetonne dans ma poche pour la suite et repars, mais j'ai perdu mon lièvre, et je ne veux pas forcer pour le retrouver.
Le ravitaillement est dans un grand bâtiment, une sorte de gymnase.
Les sacs de décharge de tous les coureurs sont suspendus à des cintres, dans l'ordre, sur des câbles à l'extérieur du bâtiment. Je me demande comment dire 1860 en italien, alors que mon numéro est écrit sur mon dossard, et que les bénévoles plus lucides que moi crient déjà mon numéro. Ils mettent un peu de temps à s'y retrouver dans leur classement mais finissent par me décrocher mon sac.
Je retrouve Mika plus loin, qui m'emmène dans la minuscule zone d'assistance : en fait on est tous entassés dans un coin de couloir avec à peine la place de s'assoir... Pas terrible. Mais j'en profite tant bien que mal pour faire tout ce qu'il y a à faire : je commence par déverser le contenu de mon sac d'assistance sur le sol.
Il faut ensuite changer la batterie de ma torches, recharger mon GPS, refaire le plein de barres et autres snacks, et me changer pour passer en mode jour. Un mec me dit qu'il y a une zone femmes de l'autre côté mais 1) je m'en fous et 2) Mika pourrait pas y rentrer de toutes façons, donc je me change sur place. Je change aussi de chaussures pour ma 2e paire de Mizuno, un peu plus larges. J'ai encore droit à un massage, puis je dois monter les escaliers pour rendre mon sac de décharge (rempli maintenant de mon linge sale de la nuit) aux bénévoles. J'arrive dans une immense salle presque vide, avec de nombreuses tables. J'en profite pour aller aux toilettes et récupérer une assiette de pâtes à la sauce tomate, j'en avale difficilement la moitié et redescend par la passerelle extérieure. Mika me dit au-revoir et c'est reparti ! pile 50mn de pause, exactement comme prévu!
Les sacs de décharge de tous les coureurs sont suspendus à des cintres, dans l'ordre, sur des câbles à l'extérieur du bâtiment. Je me demande comment dire 1860 en italien, alors que mon numéro est écrit sur mon dossard, et que les bénévoles plus lucides que moi crient déjà mon numéro. Ils mettent un peu de temps à s'y retrouver dans leur classement mais finissent par me décrocher mon sac.
Je retrouve Mika plus loin, qui m'emmène dans la minuscule zone d'assistance : en fait on est tous entassés dans un coin de couloir avec à peine la place de s'assoir... Pas terrible. Mais j'en profite tant bien que mal pour faire tout ce qu'il y a à faire : je commence par déverser le contenu de mon sac d'assistance sur le sol.
Déballage du sac de décharge |
En sortant de Courmayeur |