Après cette pause à Rioupéroux en plein cagnard (c'est ça d'être trop superstitieuse pour rentrer se mettre au frais ^^), je repars en 20mn, en oubliant d'abord de relancer ma montre. Yves n'est pas là cette année, dommage, il s'occupe de la direction de course là-bas au Parc Mistral. Antho et Marc m'accompagnent sur 50m, le temps de me mettre sur le chemin qui part maintenant juste pile en face du ravito, plus besoin de redescendre 200m sur la route pour le trouver. Le démarrage est raide, mais y a juste à serrer les dents et avancer. Il fait bon il fait chaud et je suis seule au monde entre les arbres. Les quelques gars arrivés en même temps que moi à la base vie doivent y rester plus longtemps. J'y vais lentement mais sûrement, en pensant à une seule chose : Denis qui m'attend un peu plus haut. Je suis quasi seule, seuls 1 ou 2 coureurs me passent. Je croise un gars qui descend, il m'annonce qu'on ne va plus à la Croix de Chamrousse, coupée aussi à cause des orages. Mélange de soulagement de gagner un peu de déniv, et de déception de couper encore une fois mon massif préféré... Il m'annonce aussi que je suis "bientôt" en haut, mais je n'écoute jamais ce genre d'indications, trop subjectif, trop aléatoire.
Je croise un premier militaire et lui demande de prévenir Denis que j'arrive, à la radio. Puis je croise une AMM qui me dit qu'elle lui fait un SMS pour le prévenir, mais qu'il vient d'être remplacé par Régis. Puis je tombe sur Régis au niveau des cordes fixes qui sécurisent le sommet, zut, raté... Après ce passage technique et raide où il faut mettre les mains pour passer, la fin de la montée est un peu moins raide sur le plateau de l'Arselle, entre les panneaux qui signalent les pistes de ski de fond où je me balade parfois l'hiver (je ne reconnais absolument pas le paysage, ça change tellement entre 2 saisons), puis je vois enfin la tente blanche du ravito. Hélène m'y attend, qui me dit que Denis est parti il y a une demi-heure (il est environ 16h, j'ai mis 2h à monter les 1200m depuis Rioupéroux). Jan avec qui j'étais au PC course mercredi est bénévole là.
L'étoile de Belledonne, pour Stoof le Ouf de Strava :-) |
séance de Life+ sur la cheville |
Une pause s'impose, j'ai vraiment mal à la cheville maintenant, j'ai même envoyé un sms à Hélène pour lui demander de prendre son Life+, on fait un passage sur ma cheville, puis un sur mon releveur. Je change aussi de chaussures pour mettre les siennes (ma paire de Tecnica spéciale cailloux n'étant pas trop adaptée pour courir 25 bornes de piste forestière sur le parcours de repli). De ma chaise je vois le ciel bleu azur et j'ai du mal à croire que des orages arrivent bientôt, mais de l'autre côté de la tente apparemment ça se couvre à vitesse grand v et Jan me dit que ça va pleuvoir dans 10mn. Du coup je repars après avoir déjà un peu trop traîné, en espérant atteindre quand même le Recoin avant que ça pète vraiment. Le Life+ a fait de la magie sur ma cheville, je ne sens absolument plus rien, je suis bluffée. Par contre pour le releveur c'est raté, à se demander si c'est pas l'os qui a pris, parce que je douille toujours autant.
On traverse la station dans l'herbe, on croise des chevaux, les ados qui les mènent nous encouragent, puis une grosse montée (un mur) se dresse devant nous. Je grimpe derrière 2-3 gars puis on arrive sur la large piste de Roche Béranger, coucou Chamrousse ! Je sens l'humidité dans l'air et je décide de sortir mon kway et l'enfiler avant d'avoir froid, ré-entendant les conseils de ma frangine ^^. Je resserre aussi mes lacets pour pouvoir dévaler la piste comme il faut. Et là d'un coup un énorme coup de tonnerre résonne dans toute la station, je sursaute à bondir au plafond (très bas soudainement), le ciel tremble tout entier, et dans la foulée des murs d'eau s'abattent sur nous. Ils doit être environ 17h20 soit exactement la minute annoncée pour les orages par le bulletin météo, jolie précision. La casquette vissée sur la tête et la capuche par dessus, je dévale la piste, passant d'autres coureurs qui se sont abrités sous les arbres pour chercher leur veste, j'ai bien fait d'anticiper ! Ensuite ça se complique. Les balises nous font couper dans l'herbe détrempée, on voit à 1m devant, je cherche mon chemin. Beaucoup de balises se sont soit envolées, soit écroulées, soit roulées en boule dans l'herbe mouillée, on ne voit absolument pas où on va. Je trouve mon chemin comme je peux, je jardine, plus personne ne me suit bizarrement. Puis ça se calme peu à peu, et quand je tombe sur Thierry du GUC, signaleur abrité sous son parapluie sur la piste au croisement par où on repassera en sortant du ravito, il ne pleut presque plus. Il m'indique le ravito dans la grande salle du Recoin, j'y arrive vers 17h45, sous quelques dernières gouttes.
J'arrive devant la salle avec un grand sourire jusqu'aux oreilles et lance aux bénévoles / spectateurs debout dehors «j'me suis pris une de ces rincées !», presque morte de rire, la pluie m'a bien rafraîchie, mais ils ont dû me prendre pour une folle. Première chose je leur signale que le balisage ne tient plus la route, un ou 2 bénévoles se proposent d'y aller, j'ai presque honte de les envoyer dehors sous la pluie, mais je m'inquiète que les suivants se paument.
Puis Hélène m'accueille et me dit que la course est neutralisée, à moins que ça soit les bénévoles qui m'ont badgée, j'ai pas compris tout de suite. Il a fallu me répéter qu'on n'avait pas le droit de repartir pour l'instant. C'est frustrant alors que l'orage semble être passé et que le ciel se dégage carrément. Mais apparemment à Grenoble c'était vent violent, une vraie tornade, arbres déracinés, le chaos. Je vais m'allonger sur l'estrade à côté d'autres coureurs, j'essaye de profiter quand même de la pause pour manger, boire, etc.
Mais en même temps je m'impatiente, j'ai peur qu'ils nous arrêtent pour de vrai. Je finis par appeler Antho pour avoir des news, quand la bénévole du chrono annonce que si on veut on peut repartir. Là je suis un peu prise au dépourvu, mais je ne demande pas mon reste, je me carapate aussitôt, avec un autre gars qui me sème vite. Je me retrouve toute seule sur le parcours de repli, large piste forestière qui descend entre les arbres, le soleil brille derrière le rideau de branches, la lumière est belle, la vie est belle, ma musique est belle, je prends mon pied. On nous a annoncé 12 km et 300m de D+ jusqu'à Freydières, ça devrait aller vite, et j'ai même une chance d'attaquer la Chartreuse de jour, je me réjouis. Les premiers 6km de descente passent vite, une cinquantaine de minutes et je traverse une route avec des signaleurs qui annoncent encore 6km. Après ça remonte un peu, léger, et ça redescend, ça oscille en balcon sous Belledonne, le paysage est pas folichon mais au moins ça avance vite, ça fait du bien aussi d'avaler les kilomètres de temps en temps. Encore 4km comme ça, je m'attends donc à atteindre bientôt Freydières, d'autant qu'en altitude on est pas mal (dans les 1300m comme Freydières). Mais là on arrive sur une autre route, et une bénévole devant sa voiture nous annonce encore 7km. Avec l'autre coureur qui m'a rejointe on la regarde avec de gros yeux, en lui disant que en haut c'était 6km, elle répond juste "je sais". Je pense qu'elle a dû s'en prendre plein la gueule depuis tout à l'heure...
Bon, pas le choix, c'est parti pour 7 km alors. Bernard m'a rejointe, mais mon moral a pris un sacré coup. Cette piste est moche, longue, interminable (comme quoi la beauté est bel et bien dans l'oeil de celui qui la voit, parce que c'est la même piste que je trouvais si belle 8km plus tôt). On descend encore vachement, on passe un point d'eau improvisé (un bénévole tout seul avec quelques packs de flotte, qui a aussi dû se faire allumer par quelques coureurs au sujet des indications kilométriques foireuses, nous on s'est contentés de le remercier pour l'eau), puis une fois qu'on est 3 ou 400m en-dessous de Freydières, hop on remonte, un mur (Claude me demandera plus tard ce que j'ai pensé de son parcours de repli, euh, comment dire... ^^). J'en peux plus je cale, j'en ai marre marre marre. Je pensais torcher cette section en gagnant du temps sur mes prévisions, et au final je suis maintenant en retard sur mon planning. Il va faire nuit avant qu'on atteigne Freydières si ça continue. En haut du mur un gars nous annonce le ravito dans 10mn, puis un autre gars plus loin dans 5mn, puis les minutes défilent et toujours rien, et en plus je ne reconnais même pas les lieux, et pour cause, on arrive par en-dessous. On est même obligés de sortir les frontales avant d'y arriver, il est quasi 21h. Enfin le voilà !
Moi qui voulait passer sans m'y arrêter, après plus de 2h de course depuis le Recoin (et mine de rien c'est fatigant, marcher dans les cailloux c'est plus reposant que courir en fait des fois) j'ai bien besoin d'une pause. Je m'assied sur un banc face au ravito et demande une soupe, le bénévole me sert une espèce de truc blanc collant crémeux épais avec des vermicelles dedans, j'ai pas réussi à identifier ce que c'était (je lui ai demandé il m'a répondu "vermicelles", ok), mais qu'est-ce que c'était bon ! Je descend un énorme bol servi dans un fond de bouteille, avant de repartir avec Bernard. Retour sur le parcours officiel, que je connais, mais que j'ai l'habitude de voir de jour. On commence par remonter un peu en face, mais ça passe bien, la pause et la soupe ont fait leur effet. Puis on descend en trottinant tranquille dans les bois, c'est humide mais ça va encore. Et on est tous les 2 contents de ne pas être seuls dans cette galère.
Alors qu'on est sortis des bois et qu'on traverse un bout de civilisation, je vois l'horizon s'illuminer sur ma gauche, Bernard n'a rien vu, on se persuade que j'ai rêvé. Sauf que je rêve une 2e fois, une 3e fois, et on finit par se rendre à l'évidence : retour des orages. Le ciel s'allume tout autour de nous, le tonnerre gronde d'abord au loin puis de plus en plus proche, l'humidité monte. Je sors ma veste préventivement encore une fois, puis on se prend la pluie, heureusement un peu abrités sous les arbres. Par contre la visibilité en prend un coup, entre l'obscurité nocturne et les rideaux d'eau qui renvoient le faisceau de la frontale, on ne voit pas très loin. Le terrain est aussi de plus en plus gras, surtout le sentier-ornière vers le bas que je m'étais bien amusée à dévaler (au sec) l'an dernier. Cette section semble interminable, on mettra finalement un peu plus d'1h30 pour atteindre le Versoud.
Hélène m'attend comme promis au ravito-surprise du Versoud. La table est décorée d'une rangée de marshmallow. Je m'y appuie (écroule ?) et regarde le ravito d'un air absent, je suis vidée. Une bénévole me demande ce que je veux, je ne sais pas si je réussis à lui répondre un truc intelligible, et je n'en sais rien, rien ne me tente. Je picore finalement quelques amandes, passe mes bâtons à Hélène qui me suit en vélo, et repars avec Bernard. Il faut se motiver pour courir encore et encore, mais déjà il ne pleut plus, c'est déjà ça. En plus mon releveur me fait de plus en plus mal, et la foulée qui le soulage le plus c'est l'avant-pied, donc j'essaye, m'enfin c'est pas la foulée la plus reposante, et le reste de mon corps me rappelle vite qu'il est un peu fatigué aussi quand même. Mais c'est pas lui qui commande, d'abord !
On traverse la voie ferrée, passe le pont sur l'autoroute, retrouve le sentier équestre où Béné m'avait retrouvée il y a 2 ans, je fais le juke box pour me motiver, puis on arrive dans Saint-Nazaire et ça remonte un peu, bonne excuse pour marcher. A l'entrée du ravito encore une bonne surprise, c'est Olivier qui m'attend ! Je n'ai pas la moindre idée de l'heure qu'il est à part qu'il est très tard (mon plan prévoyait une arrivée entre 23h et minuit), du coup c'est d'autant plus cool. Mais pour l'instant je ne pense qu'à une chose : montrer mon pied à un médecin ou un kiné.
Cette pause est totalement désorganisée. Je commence par filer chez le podologue, mais je n'ai pas mon sac d'allègement, je ne peux pas recharger ma montre ni rien faire. Le podologue m'envoie chez le kiné, qui me masse un peu le releveur et me renvoie chez les podologues, qui me font un laçage spécial sur mes chaussures pour soulager un peu la douleur. En plus la surprise de l'organisation sur cette base vie c'est du courrier des familles, Céline m'a envoyé une enveloppe pleine de dessins de mes neveux adorés, trop bon ! Mention spéciale pour le Pikachu :-)
Merci les p'tits Suisses ! |
Antho me donne aussi des nouvelles de la course, mais moins bonnes, puisqu'il m'annonce que Alain (et je suppose aussi Anne) est hors-course à Chamrousse, zut, dégoûtée... (en fait c'est pas vrai, la suite au prochain épisode). Les 2 survivants de la team SEMITAG sont derrière moi maintenant, je les ai doublés sans les voir dans le Taillefer pendant qu'ils faisaient une pause. En même temps je mange des sushis apportés par Antho, puis je noke vite fait mes pieds et mets les chaussures propres relacées, et ça fait déjà une demi-heure qui s'est envolée. Le temps de passer aux toilettes j'ai perdu Antho et Hélène qui ont mon sac. Puis au moment de repartir Hélène me rend mes bâtons, mais en 2 morceaux, oups. Du coup elle me file les siens, un peu plus courts mais les mêmes, ça ira bien ! Je retrouve aussi Olivier qui est encore là et me dit qu'il me verra passer plus haut, et que la personne qui me fera traverser la route au-dessus est la maire de Saint-Nazaire, sympa ! :-) Je me perds dans le ravito, trop de monde partout, le bordel, et je sais pas par où on ressort. On m'envoie finalement vers la bonne porte, je me fais badger, et je repars, à l'assaut de la Chartreuse, mon terrain d'entraînement, mon jardin ! (que j'espère moins boueux que l'an dernier)
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