mardi 17 décembre 2013

SainteLyon 2013 - La 60e !


Inscriptions
Cette année, j'ai raté les délais d'inscription, plus aucun dossard disponible déjà plusieurs mois avant la course... Du coup je joue sur Facebook et super coup de bol, je gagne mon dossard grâce à la Région Rhône-Alpes ! :-D Quelques jours avant la course Stéphane nous fait peur avec une vidéo d'une reco avec de la neige jusqu'aux cuisses sur la première partie de la course... Prévisions météo : on aura froid et on va se mouiller les pieds. ça tombe bien, je viens juste de guérir de mon otite... Mais cette fois je soigne l'affûtage, pas de sport vendredi soir, une longue nuit de sommeil, et une matinée de samedi passée à glander, modulo une toute petite virée au marché de Noël (celui de SMH à lieu juste sous mes fenêtres).

Pre-course
Le jour J, rendez-vous à Lyon pour récupérer les dossards (j'ai le 9414, et Mika le 9504), directement sur le stand de la région, ce qui évite l'immense queue. Un petit tour sur le salon, qui est cette année à Lyon (pas très pratique, car c'est à Saint-Etienne qu'on aura du temps à perdre...) avant de prendre la navette réservée aux agents de la région et gagnants facebook. Direction Saint-Etienne, où une pasta party réservée nous attend : au lieu d'une barquette plastique de pâtes industrielles, on a droit à un buffet d'entrées, suivi d'une orgie de pâtes fraîches avec au choix sauce 3 fromages et sauce crême-tomate-basilic. Bon, il faut bien goûter les 2, donc 2 services de pâtes. Et on termine par une tarte aux pommes. Je mange avec 4 jeunes qui forment l'équipe Sainté-Mi-Lyon :-) Puis je vais retrouver Mika dans le grand hall où tout le monde essaye de dormir. Il y a foule, difficile de se frayer un chemin entre les matelas, les coureurs qui dorment, qui discutent, qui mangent... En plus le speaker nous interrompt toutes les 10 mn pour nous raconter qu'il reste "moins de 3h", "un peu plus de 2h30", "moins de 2h30", "plus de 2h", etc, ou pour raconter tout ce qui lui passe par la tête, tout en disant qu'il va nous laisser nous reposer, et nous souhaitant bon repos... Impossible de fermer l'oeil dans ces conditions... Mais à défaut de mieux à faire, on essaye. La moindre excursion aux toilettes est une aventure, et nous permet aussi de goûter à la température extérieure, pas très attractive...

Le stress monte, l'envie n'y est pas, et je me demande ce que je fais là, à courir en pleine nuit en plein hiver alors qu'il faisait si beau en plein jour... Puis vient l'heure de se mettre en tenue, de boire un petit V, et de déposer les sacs dans les camions, puis un petit tour au ravito de départ (pain d'épice, etc) avant d'aller s'aligner dans le sas de départ. Ne me sentant pas en état de faire une grande performance, on se place dans le sas 9-11h sans essayer d'avancer plus que ça vers l'avant du peloton. On se tient chaud dans la foule, pendant que le speaker nous annonce que le match de foot de ce soir dans le stade Gerland a été annulé à cause de la pelouse gelée. Les footeux se sont donc dégonflés, mais nous on est remontés à bloc. L'envie et l'excitation commencent à monter, je lance aussi la musique, et je commence à avoir moins froid. On fait une minute d'applaudissements pour 2 coureurs qui sont morts cette année, donc un qui avait couru la Saintélyon l'an dernier en pleine chimio, en disant que s'il lui restait 5h30 à vivre, il viendrait courir... A méditer...

Puis vient enfin le top départ (Saint-Etienne, KM0). Pour les élites en tête de pack. Pour nous, c'est 6mn d'attente et de piétinement avant de pouvoir franchir la ligne de départ. Puis on peut commencer à trottiner, mais je suis surprise par le rythme plus lent que prévu. On a dû se placer trop à l'arrière du peloton sans doute... On ne fait donc que doubler, sur les larges routes de Saint-Etienne, modulo une petite pause technique :-) Déjà quelques mini bosses mais je ne les sens même pas, c'est Mickael qui me les fait remarquer, et c'est là que je découvre qu'en fait je suis en super forme. Lui qui n'était pas sûr de m'attendre (surtout si je me cassais la gueule aussi souvent que l'an dernier) a finalement du mal à me suivre, à cause d'un bon mal de dos. On enchaîne les premières côtes sur bitume en trottinant toujours, et en doublant toujours, autant que possible. A un moment on monte tout droit sur un large chemin bitumé, 5 ou 6 coureurs de front, et devant nous luit un immense serpent, voire une mer de lumières : ce sont tous les motifs rétro-réfléchissants des vêtements des coureurs devant nous, qui réfléchissent nos frontales. Magnifique ! c'est Noël sur les chemins :-)

Puis après 7 ou 8 km c'est la bifurcation vers les premiers sentiers. D'un coup il y a des dizaines de coureurs sur le bas-côté en train d'enfiler leurs YakTrax, et on s'empresse de les imiter. C'est magique : aucune glissade, aucune chute à déplorer sur cette première partie, je dévale les pentes de neige d'un pied sûr en doublant tout ce qui est sur mon chemin, et en plus je m'éclate ! :-D de la bonne neige fraîche qui crisse sous les pas, qui amortit les chocs, qui luit sous les frontales et les étoiles. Génial ! :-) J'attends Mickael de temps en temps, qui prend un peu plus de précautions dans les descentes, mais finit par me rattraper dans les montées. On est toujours dans la foule, et on zappe donc le premier ravitaillement (KM16, Saint-Christo, 2h du matin) en le contournant par l'extérieur. Mais on profite de la petite côte qui le longe pour manger un peu (pour moi pâtes de fruits embarquées du ravito de départ, d'abord 1 seule, puis une 2e un peu plus tard quand je tombe en manque de sucre).

On alterne bouts de sentiers et bouts de bitume, je m'éclate surtout dans les descentes techniques. A chacune je me demande si c'est celle-là qui s'appelle "descente de Plein Pot" ^^. Je double et double encore et encore. Sur les sentiers un peu étroits ce n'est pas toujours facile faute de place, et sur le bitume c'est plus dur car tous les routards se mettent enfin à courir. Après une quinzaine de kilomètres comme ça je commence à perdre Mickael de plus en plus, puis il m'annonce qu'il va me laisser partir, et vers le km25 je le perds pour de bon. A peine quelques kilomètres plus loin je trébuche sur une pierre et m'étale par terre, mais en 3 secondes je suis de nouveau debout et en train de courir, puis je réalise que j'ai mal :-) je me suis explosé la malléole interne de la cheville droite, mais rien de grave, la douleur finit par passer. Objectif maintenant : le ravito 2 à Sainte-Catherine. Pour changer sur cette course, je n'ai aucune idée des distances exactes entre les ravitos... à peine une idée approximative sur le début de la course seulement, puis plus rien après la moitié... belle préparation ! :) Cette section a subi pas mal de changements pour la spéciale 60e anniversaire, on monte vers Saint-André la Côte ou quelque chose comme ça.

Après pas mal de petites montées, on passe en crêtes au point culminant de la course (et ses quelques 900m d'altitude !). Je profite du sentier assez plat et facile pour éteindre ma frontale et admirer le superbe plafond étoilé, pendant que les coureurs pressés autour de moi me doublent sans ménagement, l'air de se demander ce que je fais à perdre mon temps à regarder le paysage... Bah, c'est pour ça que je suis là :-) Mais bon, je suis pressée aussi de redescendre, parce que ça pèle là-haut ! Un peu de vent bien glacial, j'hésite à passer mon k-way mais continue sans, un peu froid mais supportable. Je rallume la frontale et repars, entre les coureurs et leurs déchets. Un nombre incalculable de sachets de gels jonche le sol, j'en vois même jeter délibérément leurs déchets par terre sans même chercher à se cacher : pollution décomplexée...

KM30, Ravito2 Sainte-Catherine, 4h du matin
Cette fois-ci je m'arrête au ravito mais vraiment pas longtemps, je veux attraper un gobelet de thé pour me réchauffer, manque de bol il est à peine tiédasse, décevant. Il faut jouer des coudes pour attraper quoi que ce soit, vive l'esprit trail, totalement absent ici. C'est la bousculade totale, chacun pour soi et les autres poussez-vous. J'essaye de me mettre dans un coin pour remettre mes yaktrax qui commencent à avoir quelques problèmes, et je me fais pousser dans tous les sens, donc je me sauve au plus vite avec 2 biscuits à la main que je mange en avançant. Pas sûr que l'arrêt ait fait tellement de bien, il fait chaud à l'intérieur des tentes, et le contraste de température est saisissant en repartant... Mais on se réchauffe en avançant. La principale difficulté est sur cette section avec le Bois d'Arfeuille, mais à l'envers... Celui-là je le reconnais ! Il ne m'avait pas semblé aussi long quand je l'avais dévalé en descente l'an dernier... J'arrive en haut sur le bitume bien entamée. Dans la descente qui suit, d'un coup l'une de mes yaktrax se désintègre totalement, un ressort dépasse et se prend dans le lacet de mon autre chaussure, me faisant un croche-pied fatal, et je m'étale complètement... Le coureur qui me suit m'aide à me relever, je démêle yaktrax et lacets et continue prudemment, un peu refroidie par la chute. S'en suit un bon coup de barre, d'autant que je commence à être bien en manque de sucre. Gros coup de moins bien sur cette section, je ralentis et perds un peu de temps... 

Km42, ravito3, Chaussan Saint-Genou, 6h du matin.
Belle régularité, 2h entre chaque ravito. Comme je commence à avoir un coup de barre je m'arrête un peu plus longtemps (8mn), j'attrape quelques biscuits, mais ne prend pas la peine de chercher du thé pas chaud, de toutes façons je ne ressens pas le besoin de caféine, aucun coup de sommeil pendant toute la durée de la course ! Je jette un oeil à mes yaktrax et décide d'enlever celle qui est cassée histoire de ne pas refaire la même chute. Je peine à l'accrocher sur mon sac pendant que tout le monde me bouscule (du coup je la fixe à la va-vite et finirai par la perdre en coup de route). Je reprends donc ma route avec une seule Yaktrax, d'un pas un peu moins assuré : ce serait dommage de prendre une plaque de verglas justement avec le pied qui glisse... 

La section qui suit est surtout en descente et je recommence à bien courir, les jambes vont toujours bien. Puis km47 c'est ma 2e yaktrax qui se désintègre, le ressort se prend dans mon lacet opposé, et blam... Aïeuh, ça fait mal... Ce coup-ci je me cogne un peu les genoux en tombant... Mais bon, c'est la vie. Je me relève, enlève immédiatement la 2e yaktrax, l'accroche à mon sac, et repart d'abord plus doucement, puis j'accélère. Heureusement les chemins deviennent de plus en plus praticables en cette fin de course de plus en plus urbaine. Au petit matin on traverse des vignes sur un large chemin plat, alors que l'horizon prend enfin des couleurs. Bizarrement c'est à ce moment qu'il semble faire le plus froid. Ou bien c'est la fatigue qui se fait sentir, mais en tous cas on souffle de la buée, et mes mains commencent à sérieusement geler dans mes gants (j'ai fait toute la course avec mes gants fins, les gants de ski dans la poche de mon sac, impossible de les passer par dessus les sous-gants, et en fait ce sont des moufles qu'il m'aurait fallu...). Je recroqueville mes doigts dans mes gants pour tenter de les réchauffer.

Et le jour se lève à l'horizon sur le Mont-Blanc ! Magnifique ! :-o Le ciel reste rose-orangé pendant un long moment, donnant un regain d'intérêt à cette interminable section plate et droite... Je commence aussi à discuter avec Jérôme (qui me demandait quelle était cette montagne devant laquelle j'étais visiblement en admiration, mais n'étant pas trop sûre de moi j'ai préféré dire que je n'en savais rien), et on se motive l'un l'autre pour continuer à courir, jusqu'au ravito suivant où il décrète que je l'ai tué et me laisse partir devant.

Km55, ravito 4 - Soucieu en Jarrest - 8h du matin
Encore une section en un peu moins de 2h, et encore un bon arrêt d'une huitaine de minutes. La foule commence enfin à se dissiper un peu. Je mange un peu de salé (Tuc et vache qui rit) même si pas particulièrement de crampes ni aucune douleur musculaire particulière. Un peu de boisson énergétique (ils ne servent pas de red bull cette année ^^ mais je n'en ai toujours pas besoin ! ça change de ne pas m'endormir pour une fois) et je repars via les toilettes (dizaines de portaloo à l'extérieur).

On est de plus en plus sur le bitume (et heureusement car je n'ai plus de Yak Trax) et il y a de plus en plus de descentes, dont je profite toujours autant :) ça fait plaisir d'être aussi en forme ! J'entame la discussion avec un 1er Laurent qui a le même buff que moi. Il vient de Versailles, il a fait la CCC l'an dernier. Il me dit que le prochain ravito devrait être dans moins de 2km, je croyais 3km, et en fait c'était plutôt 4 ou 5. Le kilométrage annoncé entre les ravitos n'était pas toujours très précis... Je reçois un SMS de Mika qui m'annonce qu'il vient d'arriver au dernier ravito et me souhaite une bonne fin de course. D'abord surprise, je me dis ensuite qu'il a pu me doubler sans me voir dans la foule à un ravito, et j'accélère pour le rattraper, en envoyant quand même un message pour vérifier qu'on parle bien du même ravito, et lui dire que j'y arrive dans 5mn. Du coup je perds rapidement Laurent qui a mal aux isquios. Je dévale les pentes de bitume mais le ravito se fait vraiment attendre. Finalement je reçois la réponse de Mika juste avant d'atteindre enfin Beaunant (plus proche des 68km que des 65) : en fait il est à l'avant-dernier. Bon, j'ai accéléré pour rien. Ou bien juste pour le fun :-)

Km 68, ravito 5 - Beaunant - 9h30
A peine quelques minutes d'arrêt, je n'ai même pas très faim, juste hâte d'en finir. Devant nous s'étale la fameuse côte des aqueducs. Je discute avec un 2e Laurent, qui a aussi fait la CCC, mais qui vient de Marseille. On discute trails, je lui parle de l'UT4M, il me parle de l'UT2M, un off organisé par son club de Marseille. On passe la côte ensemble, puis on recommence à trottiner sur les hauteurs de Chaponost, je lui raconte nos batailles de boules de neige de l'an dernier, difficile à croire alors que cette année on est en plein soleil, un vrai bonheur. Je lui dis aussi que j'en garde sous le pied pour la descente finale, il croit d'abord que je blague, parce que lui s'il va lentement c'est juste qu'il est cuit :-)

Mais on atteint bientôt ma super descente que j'attendais avec impatience. Lyon s'étale à nos pieds, juste séparée de nous par une magnifique pente de bitume, qu'il s'empresse de m'inviter à dévaler, et je ne me fais pas prier :-D Je double des coureurs fatigués, des joggeurs du dimanche, des piétons, et arrive bien trop vite en bas, quelques marches d'escaliers (le roadbook m'avait fait craindre qu'on descende tous les lacets par les escaliers, mais non, ouf, on a quand même eu droit à ma descente). Les escaliers sont bien larges et je double facilement quelques coureurs en difficultés (difficile les marches quand les muscles et/ou les articulations se font raides) avant d'atteindre déjà la ville. 

Encore un tout petit bout de descente, on traverse un pont, et un gros point de côté me prend, je commence à marcher à regrets... C'est là que Laurent me rattrape et me double en m'encourageant. Je le laisse filer mais essaye de reprendre la course, mais je n'aime pas ce plat final... En plus reconnais les quais de l'édition 2011 : on passe dans des travaux, en face de hideux bâtiments industriels, et on longe le fleuve au plus près... Les panneaux kilométriques se succèdent, il reste 3 km à l'entrée sur les quais, puis il faut 1km5 pour atteindre le panneau suivant, alors que des passants nous donnent des indications contradictoires. Le panneau 1km nous attend à l'entrée du parc de Gerland, cette interminable traversée où on voit le stade au "loin". Je cours parce qu'il faut bien, ce n'est pas le moment de se dégonfler, mais mon point de côté me tire toujours. De plus en plus de monde nous encourage (surtout les coureuses, très peu nombreuses, seulement 7% sur le 75km solo).

Arrivée - Lyon - 10h45
Et soudain un panneau "100m", tout le monde accélère, et moi encore plus, je redouble tous ceux qui m'avaient passée à l'instant, les jambes de feu, en pleine forme. Le tapis rouge, l'entrée du stade, l'arche, et ça y est c'est fini ! Je ne m'écroule même pas à l'arrivée, mais je m'arrête quelques instants contre la barrière pour reprendre mon souffle. Les coureurs arrivent en flot continu. Quelques mètres plus loin un écran nous donne notre temps officiel (et sans doute classement mais je ne fais pas gaffe) et j'ai la bonne surprise de découvrir que je gagne quelques minutes par rapport à mon Garmin lancé dès le top départ : 10h39'15. Bon, c'est pas encore ça pour l'objectif "moins de 10h", mais étant donné le parcours rallongé (au final 76 km et 2000m+) c'est pas si mal, non ?

Post-arrivée
Direction le chapiteau à l'extérieur du stade, pour récupérer mon sac et celui de Mika, ainsi que nos 2 paniers repas, et je reviens charger comme une mule me poser dans un coin du stade, juste devant la remise des prix. Je mange, me change, et m'allonge pour siester. Réveillée par Stéphane qui arrive une heure plus tard, puis par Mickael F (qui était déjà arrivé depuis longtemps), puis enfin par Mika qui termine en T-shirt sous le soleil de midi. Le temps qu'il mange aussi et on repart pour Grenoble, sans les gros bouchons et la neige sur l'autoroute de l'an dernier. A 15h je suis dans mon lit, et j'y reste jusqu'au lendemain matin où il faut bien aller bosser. Une bonne nuit de sommeil qui a fait du bien, et je suis déjà en pleine forme, à peine une petite douleur au releveur droit à cause de tous les chocs sur le bitume sans doute. Du coup le soir-même direction la salle de sport pour un Body Attack + Bike, et bizarrement je suis en pleine forme :-) 

Conclusion
J'hésite entre "à l'an prochain" ou "plus jamais ça"... Il faudrait vraiment limiter le nombre de coureurs, ou faire des départs en plusieurs vagues à intervalles de 30mn pour faire de la place sur les chemins, parce que là c'est plus possible. Mais c'est quand même une course sympa, les lumières de l'arrivée dans le lointain, et les serpents de frontales, les étoiles au-dessus de nous (si on prend la peine de les regarder), et le lever de soleil après une longue nuit froide.

Trace Runkeeper ou Garmin.

dimanche 3 novembre 2013

24 heures de Grenoble 2013

Avant la course

Depuis l'UTMB, je me suis relativement reposée (à part la Verticale du Grand Serre, le 10km d'Annecy, et un week-end à Toulouse, j'ai peu couru) et je devrais donc arriver en pleine forme pour cette 2e échéance la plus importante de l'année. Mais ça serait sans compter sans un boulot débordant et stressant, et le fait que j'aie réussi à choper la crève juste 2 jours avant le départ... Du coup je n'ai pas réussi à dormir plus de quelques heures au total sur les 2 nuits d'avant-course. Ajoutez le stress de ne même pas pouvoir prendre le départ de MA course fétiche, dans mon jardin, et de là tout s'enchaîne. Je me dis que quitte à contre-performer, autant ne pas me priver, et j'accepte une invitation à partir en rando vendredi après-midi à la Dent de Crolles, "pour voir" ; et je vois... Le soir je partage la "pasta party" avec Etienne, un coureur venu du 400 et du 800m, avant de rentrer sous la pluie pour ne pas réussir à dormir. Pour ne rien arranger les prévisions météo pour demain sont assez catastrophiques, "pluies abondantes" dans la nuit et nombreuses averses le reste du temps... Tout ça se combine pour me faire stresser toute la nuit.

Samedi matin je me réveille avec du mal à respirer, les bronches bien prises, et une grosse trouille mais une grosse envie de faire la course quand même. Pti dej et direction le parc Mistral avec mon sac rempli d'affaires de rechange (il va pleuvoir, autant prévoir de quoi se changer beaucoup et souvent), 2 paires de chaussures, de la Nok, de l'huile de massage, 2 ipods, des gants... Je me rends juste compte en cours de route que je n'ai pris aucun pantalon ou collant long... Tant pis, pas besoin :-) Première étape en arrivant : installer tout ça proprement pour trouver facilement tout ce que je veux pendant la course. Puis mettre mes 2 dossards sur ma ceinture porte-dossard, 1 devant et un derrière. En plus ils sont gigantesques, on se sent comme un panneau publicitaire (connaissant le sponsor de la fédé d'athlétisme, en plus...), mais pas le droit de les plier comme à mon habitude, Daniel me rappelle à l'ordre tout de suite ^^

15 mn avant le départ, on nous appelle dehors pour la photo. Surprise : il y a foule, et l'aire principale est plutôt différente de l'an dernier, des tentes sont alignées sur toute la longueur de l'anneau de vitesse, des 2 côtés, pour abriter des tables pour les ravitos personnels de tous les coureurs qui ont une équipe de soutien (bande de veinards ^^). Je suis un peu surprise et surtout impressionnée devant le spectacle. Après la photo de tous les coureurs (175 quand même !) sous un ciel menaçant, je porte encore mon kway sans manches (gagné aux 3 jours de Chartreuse) mais décide qu'il va me tenir trop chaud et rentre le poser, sans regrets. Je rencontre Nadège, une traileuse qui se demande ce qu'elle fait là, comme moi il y a deux ans. Je la rassure.


La course - journée de samedi

Et c'est parti. Je cours avec Mickael pendant au moins 300m avant de le laisser filer, il va beaucoup trop vite pour moi. Je lui dis qu'il part trop vite mais il préfère profiter tant qu'il a des jambes. De mon côté je préfère m'économiser et cours donc déjà toute seule. Au début les kms passent très vite, déjà 28 la première fois que je me demande où j'en suis, sans même que je m'en soit rendu compte, en maintenant un tempo de 8 ou 9 tours dans l'heure (9, 8, 9, 9...) selon que je réussisse à passer la ligne juste avant le changement d'heure ou pas. Pendant longtemps je me concentrerai sur ces micro-objectifs de "terminer tel tour avant la fin de l'heure", comme principale motivation.


Je m'applique aussi à m'arrêter au ravito régulièrement mais pas trop souvent, pour boire un coup et manger un peu. Premier arrêt au tour 5 (j'y avais même pas pensé avant, forcément, j'ai pas de ravito d'habitude pour tourner en rond autour du parc...), du coup ensuite je me fixe un tempo d'un arrêt tous les 4 ou 5 tours en alternance : tour 9, tour 13, tour 18, tour 22, tour 27, bref, j'ai vite fait de me perdre dans mes comptes et de ne plus savoir si c'est ce tour-ci que je m'arrête ou pas... Au menu d'abord des abricots secs et amandes, puis un peu plus tard des tucs au fromage (comme à la Verticale du Diable). Je ne sais pas si c'est le 2e effet fièvre, mais pendant une grosse partie de la course, chaque arrêt au ravito à un tour est suivi d'un arrêt toilettes au tour suivant... Mais comme ce sont pour l'instant mes seules pauses... Au bout d'un moment les bénévoles commencent à préparer de la purée chaude. Je me disais justement que j'avais faim et effectivement un coup d'oeil à ma montre m'indique qu'il y a une bonne raison : il est midi, c'est l'heure de manger ! A mon premier arrêt (tour 18) la purée n'est pas encore prête, on me l'annonce pour le prochain tour, mais je ne veux pas m'arrêter 2 tours de suite, donc j'en refais quelques-uns de plus, mais je m'arrête quand même assez vite (sans faire les 5 tours réglementaires) pour éviter qu'il n'y en ait plus :-) Je marche pour la première fois le long du boulevard Clémenceau, le temps de manger ma purée. Ce sera aussi la dernière fois que je marche avant longtemps.



Tous ces savants calculs de tours et de ravitos me font bien passer le temps. Du coup je suis encore très concentrée et discute assez peu avec les autres coureurs. On sent l'enjeu d'un championnat de France, tout le monde est aussi concentré et parle peu. Heureusement que Daniel est là pour mettre l'ambiance. Il annonce les coureurs et leur palmarès, balance de la musique motivante, raconte des histoires, commente la tête de course... Assez au début, alors que je traverse l'aire principale, Daniel me dit d'éteindre mon ipod, parce que c'est "ma chanson" (il m'avait annoncé avant le départ qu'il avait une chanson pour moi), en fait c'est une chanson que je ne connais pas mais qui parle d'une Carole ("j'ai tant besoin de toi")  :-) A un moment je double un gars avec un T-shirt UT4M et engage la conversation : Jean-Claude me dit qu'en fait cet ultra était moche, trop de passages de vallées, tout ça pour une course au dénivelé... Puis je continue ma course seule, Mika me double 2 ou 3 fois seulement. Je passe de temps en temps Nadège, à qui son coach a conseillé une stratégie de marcher 1 mn tous les tours.


Les conditions météo jouent aussi sur l'ambiance déjà tendue. Après un départ chanceux où on se prend à espérer que le ciel menaçant ne se déverse pas sur nous, il commence finalement à pleuvoir peu après midi, une grosse averse, où chacun serre les dents et avance. Je ne prends même pas la peine d'aller passer un k-way, je cours toujours avec mon t-shirt de la Saintelyon (j'en ai vu d'autres d'ailleurs, ainsi que plusieurs UTMB et au moins un UT4M). Pendant l'averse un gars nous double alors que je suis au même niveau qu'un mec, en lançant "allez les gars!", je répond "merci toi aussi" , déclenchant un "ah, y avait une fille aussi". On court entre (voire dans) les énormes flaques qui se forment sur l'anneau de vitesse. Au début on joue à les éviter, en agilité sur la pointe des pieds, puis on essaye de les éviter au mieux, puis on lutte pour les éviter sans se faire mal, puis on ne se donne même plus la peine de les éviter... Résultat on a très vite les pieds trempés... Pourtant les bénévoles font un super boulot pour enlever la flotte, mettre du sable par-dessus les pires endroits, construire une digue au bord de la piste pour nous protéger de l'eau, génial. Ils s'activent déjà pendant l'averse, et encore plus une fois l'averse finie. Grâce à leurs efforts le sol restera sec à cet endroit jusqu'à la fin.



L'averse finit donc par se calmer. Mika me rejoint un peu plus tard et court un peu avec moi. Il commence à en baver. Manu nous double avec un "allez Carole" alors que je cours avec Mika, qui commente que tout le monde me connaît (plusieurs bénévoles aussi me reconnaissent d'année en année), Manu répond que je suis "connue comme le loup blanc ici". Mika et moi on court un peu ensemble en profitant de l'accalmie. Mais il vient d'enlever son kway quand il recommence à pleuvoir, sacrée loi de Murphy. J'avais eu le temps de sécher de la première, donc cette fois je vais me couvrir. On rentre dans la halle, moi pour passer mon kway sans manches en 3 secondes et repartir aussitôt, lui pour troquer son kway sans manches contre son gore-tex long, et me rattraper. Je lui interdis en rigolant de l'enlever à la fin de l'averse, sinon il va se remettre à pleuvoir :-) A un moment Daniel ponctue mon passage dans l'aire principale d'un commentaire sur le fait que je suis malade, et que j'ai fait une rando hier. (il m'avait vue partir, m'avait appelée mais je ne l'avais pas vu). Si ça peut amuser le public, au cas où il ne nous trouve pas déjà assez fous... :-) Et puis l'averse s'arrête et cette fois c'est moi qui finit par semer Mika qui commence à souffrir et à marcher beaucoup.



Mon plan de course est très simple. Ou très compliqué. En fait en plus du timing des ravitos tous les 4-5 tours, et des micro-objectifs toutes les heures, j'ai aussi divers objectifs à plus long terme : les 3 tiers (60km, tiers de mon objectif de 180km) en 7h pour le premier, puis 8h pour le deuxième, puis 9h pour le dernier. 77km en environ 9h. Première moitié (90km) en 11h et 2e moitié en 13h. Donc 100km sans doute en environ 12h++ contre près de 14h l'an dernier. Je passe mon temps à faire de savants calculs dans ma tête, ça passe le temps, et j'ai toujours un objectif à viser pour me motiver. Ne jamais s'arrêter pile quand l'envie se fait sentir, mais toujours se fixer un objectif : finir le tour / tel nombre de tour / finir l'heure d'abord. Tout en évitant de forcer trop pour vouloir à tout prix réussir un objectif manifestement trop dur (qui demande d'aller trop vite pour caser les tours manquants dans le temps restant, ou qui demande de continuer sur un niveau de fatigue démesuré). Tout est donc une question d'équilibre et de compromis.



Je fais donc ma première vraie pause à 60 km à 17h (mon premier tiers d'objectif en 7h de course comme prévu) pour passer en mode "il refait beau" : je change mon t-shirt mouillé trempé à manches courtes contre mon débardeur, et tombe le short que j'avais par dessus le caleçon. Je change aussi de baskets contre les nouvelles asics seches et des chaussettes sèches, après avoir mis une bonne couche de Nok, ça fait du bien. Un petit massage par moi-même avec l'huile que j'ai ramenée, et c'est reparti, avec ma montre qui en a profité pour recharger un peu. Il fait presque chaud pendant les 2 petites heures de jour qui restent. 


Je passe de temps en temps Mika qui marche, le récupère et on court un peu ensemble avant que je le reperde. Puis vers 18h++ je le rattrape juste avant l'anneau de vitesse, mais cette fois il ne se joint pas à moi, et me dit qu'il va abandonner... snif :-( Je marche quelques mètres avec lui, puis reprends ma course. Je previens Daniel en passant dans l'aire, pour qu'il lui dise un mot de ma part quand il rendra son dossard, Daniel me répond que "non il peut pas abandonner, qu'est-ce qu'il a ?", je lui réponds qu'il est malade et continue ma route. Je me sens un peu seule. Heureusement qu'il y a tous les bénévoles et les coureurs connus des années passées.


Vers 19h j'admire le coucher de soleil magnifique. Les nuages orange-mauve se détachent sur le ciel sombre derrière le Moucherotte, les falaises orangées du Saint-Eynard brillent dans les derniers rayons, Belledonne est aussi illuminée d'une magnifique lumière. A chaque passage au coin sous l'arbre, j'échange quelques mots avec le bénévole que je connais des années précédentes. "Vous avez vu le Saint-Eynard comme il est beau ?" je lance cette fois. "On serait tellement mieux sur un trail" il me répond. Un peu plus tard j'annonce que "ça commence à devenir dur" (en regrettant de pas l'avoir gardé pour plus tard quand ça deviendrait vraiment dur, parce que ça va encore empirer, c'est sûr). Il me répond que mais non, "à côté des 37h de l'UTMB c'est pas si long !" Je retrouve le sourire tout de suite : "Ah oui vu comme ça... et en plus c'est plat !" je lance en m'éloignant. En fait ça va encore plutôt bien. Je double Stéphane qui marche un peu difficilement : "cheville?" je lui demande, car il craignait qu'elle ne tienne pas. "Non, brûlures". J'ai le problème aussi d'ailleurs, à force de passer aux toilettes :-) Puis la nuit tombe. En cette saison, elle sera aussi longue que la journée, c'est donc parti pour 12 heures dans le noir. Mais j'aime bien. 



La course - nuit

Vers 20h, je double Nadège, la traileuse qui se demandait ce qu'elle faisait là au départ. On discute 2 mn de nos distances et classements respectifs, elle me demande combien-tième je suis "16e  - mais non c'est moi 16e !", elle en conclut que je viens de lui prendre sa 16e place, et effectivement le tableau le confirme à mon prochain passage de la ligne. Je passe même 15e dans la foulée. Je décolle enfin de la 17e place à laquelle j'étais bloquée depuis des heures :-) Ce qui était déjà pas mal vu le niveau de concurrence, mais moins bien que ce que mon numéro de dossard laisse supposer qu'on attendait de moi : les dossards sont dans l'ordre des meilleures performances passées, donc mon n°211 signifie que j'ai la 11e meilleure performance féminine. Et puis j'ai un plan secret de rentrer dans le top 10 féminin de ce championnat de France ^^

C'est aussi en ce début de nuit que je rencontre David, j'engage la conversation quand je le double, en lui demandant si ça va toujours, et il commence à courir avec moi. Après un ou 2 tours à peine ensemble, au prochain passage au ravito, alors que j'avoue que ça fait un moment que je n'ai pas avalé grand chose pour cause d'estomac récalcitrant (mais j'arrive quand même à bien avancer), David me passe une compote de bananes, qui passe bien. On continue ensemble presque toute la nuit, quand je le rattrape je l'entraîne avec moi et on tourne ensemble un moment, j'ai souvent l'impression de le suivre puis il finit par me dire qu'il faut qu'il marche, ou qu'il s'arrête, et c'est moi qui le sème, mais je profite aussi bien de la compagnie ! Il a pour l'instant 2 tours de retard sur moi sur moi, mais on découvre qu'on a le même objectif de 180 km. Notre objectif devient tendu mais il me semble encore jouable. 


Mais pour l'instant restons concentrée sur des buts à plus court-terme ! Mon prochain micro-objectif maintenant : la moitié (90 km) pour 21h. Je me concentre tellement dessus que j'en oublie ces belles promesses de juste équilibre et de compromis. Je ne sais plus trop si je dois essayer de me tenir à mes objectifs intermédiaires autant que possible tôt dans la course pour ne pas rendre déjà impossible mon objectif kilométrique final, ou si je dois au contraire m'écouter pour ne pas me fatiguer trop et en payer le prix plus tard, ce qui aurait aussi l'effet de m'empêcher d'atteindre mon objectif kilométrique. En résumé : trop lentement, je m'économise, mais je n'aurai pas le temps de rattraper le retard ; trop vite, je me grille, et je risque de devoir ralentir avant la fin et de perdre plus que j'ai gagné. Dans le doute, comme j'ai tendance à être têtue, je m'accroche. Trop. Je veux absolument caler mes 90km dans11 heures, finalement je crois que j'échoue pour quelques secondes, mais surtout je m'arrête à 21h et quelques minutes dans un état bien trop proche de l'épuisement pour une course qui dure encore 13 heures...

Je rentre dans la halle pour ma pause bien méritée, mets ma montre à charger, enlève mes chaussures trop serrées et mes chaussettes, puis plus rien. Je suis complètement claquée, je ne sais pas trop si je dois dormir ou pas, alors je m'allonge par terre mais sans dormir, ce qui tient de la totale perte de temps. En plus mon corps a vite fait de se refroidir et je commence à grelotter, voire même à trembler copieusement. J'envoie un ou 2 SMS à Mika, qui est rentré chez lui depuis, en lui disant que je me demande comment je vais repartir. Je me désole de perdre beaucoup de temps à ne rien faire, et essaye de repenser à combien une sieste m'avait fait du bien à l'UTMB, mais ne pousse pas ma réflexion jusqu'à installer les mêmes conditions propices au sommeil que j'avais eues à Vallorcines. Au contraire, de peur de ne pas pouvoir repartir ensuite, je grelotte allongée sous ma serviette et refuse coup sur coup toutes les propositions de couvertures. C'est d'abord un bénévole que je ne connais pas qui a pitié de moi et me propose une couverture. Puis le gars des 2 Alpes (l'organisateur de la verticale du diable et des 6h du diable) qui me propose son duvet qui est dans sa voiture. Puis une fille sans doute équipe de soutien me donne sa couverture que je prends avec reconnaissance, et je me décide enfin à faire une petite sieste, avec un réveil pour 20mn plus tard. Mais je n'arrive même pas à fermer l'oeil et je grelotte à peine moins. 


Ensuite un bénévole du GUC que je connais me demande si ça va, je secoue la tête, non pas du tout. On discute 2 mn, il me dit à quel point j'ai progressé depuis l'an dernier, "un truc de malade". Ah bon ? je m'étonne. Mais ça me remotive vachement, il ne faudrait pas gâcher de tels progrès :-). Du coup quand il me conseille d'aller plutôt me faire masser j'y vais, il n'y a pas tellement de queue contrairement à ce que je craignais. Je repose la couverture et vais attendre assise, jusqu'à ce qu'un des étudiants de Jean-Max me prenne en charge. Au début je regarde l'immense chrono rouge qui trône à l'entrée de la halle, dans le but de repartir avant 22h pour ne perdre qu'une heure. Mais je n'ai vraiment pas la force de lui dire d'aller plus vite, et je me détends pendant qu'il me masse les mollets et adducteurs (qui ont le plus souffert). Il détecte aussi une cheville gauche très sensible à l'appui (très faible) sous la malléole interne, et Jean-Max vient faire une petite manip, ça claque imperceptiblement puis ça va mieux ! Je termine par un petit passage chez les secouristes où la médecin me prend la température, je croyais avoir de la fièvre, en fait j'ai 36.5°C... Elle me file un Advil pour faire passer les crampes/contractures musculaires dûes à la crève. Après tout ça je retourne enfiler mes chaussures (mauvaise idée les chaussures neuves... j'ai des ampoules déjà, ou bien c'est l'humidité persistante...du coup je garderai l'autre paire jusqu'à la fin) et reprendre ma montre qui a eu le temps de bien recharger. Je regarde aussi la réponse de Mika à "comment je vais repartir" : "avec du courage et de la caféine". Pas bête, j'avale donc un V shoot avant de ressortir affronter le froid de la nuit noire. J'ai troqué la casquette pour le buff, mis la polaire pour réussir à ressortir, et regrette presque de ne pas avoir de pantalon. 
non non ce n'est pas moi ^^
Après cette longue pause, ça fait longtemps que je n'ai rien avalé. Et je suis surprise et soulagée de voir que j'ai faim, et j'arrive à manger. Il y a encore quelques bouts de pizzas, froids, restes des pizzas livrées pendant ma longue pause. J'en attrapes quelques-un et les mange en marchant le long du boulevard Clémenceau (ce n'est que la 2e fois de la journée que je marche), le temps de relancer la machine. Arrivée au tournant au Palais des Sports, je relance en courant. En fait je suis totalement requinquée ! Les bouts de pizzas combinés avec le V shoot ont contribué à me réveiller complètement de ma somnolence, Après 1 ou 2 tours je suis déjà réchauffée et je repasse (en courant) dans la halle y jeter ma polaire. Je croise Jean-Max et le remercie en lui disant que ça va beaucoup mieux. En plus j'ai la bonne surprise à mon premier passage devant le tableau d'affichage sur la ligne de découvrir que je n'ai pas perdu la moindre place, je suis toujours 15e, à ma grande surprise et mon grand soulagement. Si j'avais trop reculé ça m'aurait sans doute un peu cassé le moral. Par contre je gagne le tour le plus lent de la galaxie : 1h15 pour ce dernier tour :-D


Mais au contraire j'ai donc gardé ma place, et je commence même à remonter au classement. Je passe les 3 ou 4 heures suivantes à ne faire que courir. J'ai un super second souffle, j'ai la pêche, je ne fais que doubler, quasi tout le monde, en particulier toutes les filles de la tête de course féminine, je double Christine, Sylvie, Ilaria... toutes au moins 1 fois. Je retrouve régulièrement David, qui a pris 4 ou 5 tours d'avance sur moi pendant ma pause, et on avance plutôt bien en s'entre-motivant. Ensemble on grignote tous les 2 des places au classement. De 15e à 22h, je passe 14e à 23h, puis 12e à minuit, et encore 11e à 2h du matin, place que je garde encore quelques heures. C'est aussi pour ça que j'aime bien la nuit : pendant que les autres fatiguent, craquent, dorment, moi je regagne des places, juste en ne m'arrêtant pas. C'est comme ça que j'avais remonté Ilaria à ma première participation. Mais cette année c'est moi qui ai craqué, malade et fatiguée avant même de commencer... Du coup je commence à stresser de perdre ma place au classement, et je regrette de ne pas avoir d'informations sur mes "concurrentes" : c'est toujours mieux de savoir si on est loin de rattraper celle de devant, ou d'être rattrapée par celle de derrière. Je pourrais m'arrêter pour aller voir les affiches dans la halle qui donnent la distance de tous les concurrents à chaque nouvelle heure, mais pas envie de m'arrêter. Ceux qui ont une équipe de soutien récupèrent ce genre d'infos par leur équipe. Mais j'ai au moins droit à des supporters: Marianne et son copain passent en vélo et m'encouragent plusieurs tours de suite avant de rentrer.


Ce regain de forme dure pendant près de 4h, le temps de défiler les 30 km restants jusqu'à mon 2e tiers (que mon plan me voyait finir en un total de 15h soit à 1h du matin). 4 heures que je ne vois pas passer. Exploitant mon regain de forme, je sème régulièrement David, qui me répète inlassablement son conseil de ne pas me griller, et je réponds inlassablement que non non, j'y vais tranquille, je suis à peine à 9km/h, tout va bien. Intérieurement je n'en suis pas si sûre mais j'essaye de faire taire mes doutes et de profiter de la forme tant qu'elle est là. Et à chaque fois je finis par rattraper David et on refait un bout de route ensemble, chacun ayant l'impression de suivre l'autre, de profiter du rythme qu'il fixe. On se reprend un peu de pluie pendant la nuit mais ce n'est qu'une petite bruine supportable. J'hésite à repasser mon kway mais ça passe sans. On s'arrête ensemble aux toilettes, en courant jusqu'à la porte, on croise un bénévole qui nous dit en rigolant qu'on a le droit de marcher ici. Et on repart encore ensemble, ça fait vraiment du bien de ne pas tourner tout seul à ce stade de la course. Peu avant minuit une fanfare s'installe sous les arbres à l'entrée de l'anneau de vitesse et met une animation bienvenue, bien que les jeunes autour aient l'air un peu bourrés, et manquent me déboiter l'épaule en me tapant un high five pour le moins énergique :-) 


Régulièrement je sème David et continue toute seule jusqu'à le rattraper quelques tours plus tard. Je grignote l'avance qu'il avait prise sur moi pendant ma pause jusqu'à n'être plus qu'un tour derrière lui. A chaque passage devant le palais des sports une bande de jeunes encourage "allez Steeve", le gars doit être juste devant moi et synchro avec moi. Daniel anime toujours la course, cette fois il rappelle les consignes, pas de ravito hors zone, en particulier dans les voitures personnelles, sinon ce sera un carton rouge; et les accompagnateurs doivent bien rester derrière la ligne au sol pour ne pas encombrer le passage pour les coureurs, il y a trop de monde dans la zone. Tout est tout de suite beaucoup plus strict quand c'est un championnat de France. Je double aussi régulièrement une paire de gars avec des boosters roses qui marchent tranquillement, et les encourage à chaque fois, puis ils finissent par m'encourager eux aussi. Nadège m'encourage elle aussi, elle a commencé à beaucoup marcher on dirait, elle me dit que c'est super que je courre encore. J'entends un gars s'impatienter qu'il fasse jour mais à ce moment je ne suis pas d'accord, j'aime bien la nuit, tout est plus calme, la tour Perret brille de mille feux au dessus de nous, illuminée en bleu. 


J'atteins mon 2e tiers d'objectif, les 120 km, à 1h45 du matin. Je m'étais promis une pause pour fêter ça, mais sur le coup je ne veux pas casser mon bon rythme et mon regain d'énergie, et je décide de continuer encore un peu. Je passe 11e fille au classement, je tiens finalement le rang indiqué par mon dossard. Je fais encore 4 ou 5 tours avant de commencer à avoir sommeil, un peu mal aux jambes, et de me mettre à vouloir une pause. J'ai reperdu David quand je décide de m'arrêter vers 2h30 du matin, 125km au compteur. Je m'accorde un stop chez les kinés pour un massage des pieds avec une étudiante kiné, qui réveille ensuite Jean-Max pour regarder de nouveau ma cheville (qui est OK), puis direction les secouristes pour un autre Advil, ils doivent réveiller la doc qui dormait sur un des brancards, oops, je réveille tout le monde... :-/ Je commence à avoir vraiment des ampoules, donc je me mets encore de la Nok avant de renfiler mes chaussures. Je ne me sens pas beaucoup mieux mais ça fait pas loin d'une demi-heure que je suis arrêtée, il est temps de repartir. J'embarque un autre V shoot (on doit m'aider à l'ouvrir au ravito, les mains grasses à cause de la Nok), mais cette fois ça ne suffit plus à me réveiller et je galère un moment. J'ai gardé la polaire car ça s'est vraiment rafraîchi dehors, et que j'ai un peu l'intention de marcher. 



Il est maintenant 3h du matin et je fatigue. Heureusement je ne tarde pas à retrouver David, je lui annonce que je viens de me faire une demi-heure de pause, mais ça ne va pas mieux. Il a pris 2 tours d'avance sur moi pendant ce temps, mais notre objectif de 180 km semble aussi irréalisable pour lui que pour moi maintenant, et on se rabat sur 170 km, soit dans mon cas environ 45 km en 7h, jouable avec une moyenne de marche rapide et en comptant sur une accélération finale dûe à l'adrénaline de la fin. On adopte donc un rythme un peu plus tranquille où on court 2 tours avant de s'arrêter au ravito et de marcher le long de Clémenceau un tour sur 2, puis on recourt à partir du Palais des Sports sur le sable jusqu'au ravito 2 tours plus tard de nouveau. On tient ce rythme pendant très longtemps, 3 bonnes heures, mais je fatigue de plus en plus. Reprendre la course devient de plus en plus difficile après la marche, c'est le changement d'allure qui est dur, car après quelques mètres de course ça va déjà mieux. Je fais la réflexion à David qu'il ne faut surtout pas s'arrêter aux premières douleurs mais attendre d'avoir chauffé de nouveau, et en fait ça passe. Mais de tour en tour ça devient plus dur, les pauses qu'on faisait d'abord pour ne pas se fatiguer et parce qu'on avait le temps sont maintenant attendues avec de plus en plus d'impatience, je m'arrêterais bien à chaque tour...

Puis je commence à sentir que je ne vais pas pouvoir redémarrer. Mais je sais que si j'"abandonne" maintenant, si je lâche David, je dis adieu à mon objectif (déjà revu à la baisse) de 170km, parce que plus rien ne m'empêchera de ralentir de plus en plus, et il deviendra au fil du temps de plus en plus dur, voire virtuellement impossible, de recommencer à courir. Je réfléchis donc à tous ça et m'accroche encore un peu. En plus un peu avant 6h du matin je passe dans le top 10 féminin, yahoo ! Je l'annonce même à Daniel à un moment :) Mais ça ne suffit pas à me réveiller, malheureusement. 


La course - petit matin dimanche

6h du matin. J'en suis à 146km et David à 148. Mais cette fois je ne peux vraiment plus redémarrer, impossible de me remettre à courir... Il a revu son objectif à la baisse pour 170 km mais a déjà peur de ne pas l'atteindre. Je ne veux pas le ralentir, et je le laisse partir devant en l'encourageant à aller chercher ses 170 km. Et je continue toute seule en marchant, en dormant complètement debout. A partir de ce moment c'est de la torture. Stéphane qui a recommencé à courir me passe une ou 2 fois, et Nadège aussi, et la plupart de ceux que je passais cette nuit. Je passe encore les "chaussettes roses" mais cette fois-ci je marche à peine plus vite qu'eux. J'attends le lever du soleil avec impatience en espérant que la lumière du jour me réveille. J'ai déjà planifié les derniers points forts de la course : à 7h le jour se lève, à 8h je devrais battre mon record de l'an dernier (161 km), à 9h Mickael devrait arriver (il a dit qu'il viendrait voir la fin de la course), et à 10h ce sera la fin, enfin ! Mais pour l'instant il reste encore 4 bonnes heures, qui pour moi tournent à la torture. Les tours ne passent que très lentement, toutes les 15-20 mn, et l'animation (et l'adrénaline) procurées par la zone d'assistance est d'autant plus éparse elle aussi. Je me demande comment je vais tenir encore 4 heures... Je ne rêve que d'une chose, m'arrêter : arrêter d'avancer, arrêter d'avoir mal, et dormir. Mais l'envie de conserver ma place dans le top 10 et d'au moins dépasser mon kilométrage de l'an dernier (161km) à défaut d'atteindre mes 180km, est la plus forte, et je continue à avancer. 


A propos de garder ma place, à un moment la fille au dossard 206 passe la ligne pile en même temps que moi, et sur le tableau je vois qu'elle est 11e à juste 2 tours derrière moi, et qu'elle vient de faire le dernier tour en 6'30" environ contre 8'30" environ pour moi en marchant. Du coup je ne me fais pas trop d'illusion, et je me dis que bon, c'était déjà beau d'être entrée dans le top 10 à un moment, mais là elle ne va pas tarder à me reprendre la place qui lui est dûe. D'autant qu'elle me double un peu plus tard, donc me reprend encore un tour. Mais finalement je ne la vois ensuite plus jusqu'à la fin, et elle finira 10 km derrière, et toujours 11e. Jusqu'à la fin je me demande à combien de km sont les autres filles autour de moi. En fait j'aurai la réponse sur le podium, la 2e Ilaria avait 6km d'avance (173km), et la 1e Corinne encore 5 de plus (178km), donc pas loin. En fait si j'avais tenu mon objectif de 180km, je gagnais :-)

Mais pour l'instant j'avance de plus en plus lentement : j'avais fait 7km entre 4h et 5h, puis 6km de 5h à 6h, puis seulement 5km de 6h à 7h et autant de 7h à 8h, avant de tomber carrément à 4km l'avant-dernière heure (avant de remonter à 7km pendant la dernière heure). Au petit jour Stéphane marche un peu avec moi, je lui dis que c'est de la torture, je suis un zombie, j'avance en dormant debout.



De temps en temps j'arrive à me réveiller, en chantant à voix haute, et j'essaye de marcher un peu plus vite. Pendant un de ces mieux, je passe un gars en orange en train de vomir entre les voitures sur le parking, et je le signale aux bénévoles du ravito, qui me disant qu'ils l'ont déjà vu pas bien au tour d'avant. Je m'essaye même à courir un peu en arrivant sur le sable comme toute la nuit ; j'ai très mal, au genou droit surtout, mais en repensant aux commentaires échangés avec David quelques heures plus tôt, je me dis que ça va passer, et je me force à insister au moins jusqu'à l'anneau de vitesse, sur les 2 ou 300m de sable le long du palais des sports, mais même ça c'est trop, j'ai vraiment trop mal et je reprends la marche. Et je recommence à m'endormir... J'essaye de chanter à voix haute pour me réveiller (pas de Mika et Thierry à côté de moi pour en souffrir cette année ^^).


Il fait jour maintenant et les premiers spectateurs extérieurs recommencent à arriver. Des gars bourrés qui n'ont pas dormi non plus mais pas pour les mêmes raisons, nous encouragent sur Clémenceau, sous surveillance de bénévoles un peu inquiets ^^ Un couple est debout derrière la barrière à l'entrée de l'anneau de vitesse et nous applaudit à chaque passage. Le bénévole d'hier est de retour sur sa chaise sous l'arbre. Puis Yves, me demande si je me rappelle de lui, oui mais ce n'est que quand il mentionne les gants blancs que ça me revient complètement : on a couru ensemble une bonne partie de la nuit 2 ans plus tôt ! Puis c'est Joël qui arrive au même endroit qu'hier, alors que je suis au plus bas et que je marche depuis un moment, je n'ai que la force de lui faire un petit signe, puis de lui dire un mot au tour suivant.


Bon, ce qui est rassurant c'est que je ne suis pas la seule à souffrir. Christine (championne de France en titre) a l'air de souffrir de plus en plus mais elle s'accroche, c'est difficile en tête de course, Sylvie n'est vraiment pas loin, elles s'échangent la 1e place régulièrement, et Daniel commente avec enthousiasme tous les retournements de situation. 


8h50. Je traverse l'aire comme d'habitude, en marchant comme depuis quelques heures maintenant, avec un coup d'oeil au tableau, qui indique que je viens de passer les 159km. Et là je craque... Il reste quasi 1h10, mais je sais que je vais finir, je sais que je vais battre mon record, et je me mets à pleurer sans pouvoir m'arrêter. C'est comme si je venais d'apercevoir la ligne d'arrivée depuis le sommet de la dernière descente, l'émotion commence à monter, et les larmes avec. J'avance toujours aussi lentement, par contre. Je ne prends plus le temps de m'arrêter au ravito, me disant que je perds déjà bien assez de temps en me traînant comme ça.

Heureusement que j'ai un vrai fan club dans la zone d'assistance. J'ai droit aux encouragements de Daniel le speaker, de Martine et son mari de l'asso des enfants du Tamil Nadu, du gars des 2 Alpes qui me demande de recommencer à courir mais je lui réponds que je ne peux pas, du clan de Céline et Manu, de plein de monde que je ne connais même pas forcément, qui dans les derniers tours finissent par me demander mon prénom puis m'encouragent de plus belle, d'autres personnes qui m'encouragent un peu plus loin en m'appelant Caroline, tout le monde y met du sien, c'est génial, merci à tous ! Puis Piero le grand organisateur en chef rejoint aussi la zone à côté du tableau et m'encourage à chaque passage. Je retente de courir en sortie de zone dans le virage pour faire plaisir au public, mais je ne tiens que quelques mètres avant que la douleur me ramène à la marche. Mieux vaut marcher aussi vite que je peux plutôt que de risquer de m'achever en tentant de courir à peine plus vite finalement.


Deux tours plus tard, peu après 9h, Mika arrive juste à temps pour quand je vais passer mon record. C'est la première chose que je lui dis, et je lui demande une photo de mon passage au tableau, qui affiche 162 km pour la 1e fois ! 

Je me sens enfin un peu mieux, et je recommence à chanter à voix haute pour me réveiller. Je vois les autres tomber des épaisseurs de vêtements à mesure que le soleil se lève, mais je garde mes manches longues et ma polaire, j'ai peur d'avoir froid, je ne cours plus alors je me réchauffe moins bien... Puis finalement je la passerai à Mika sur le bord un peu plus tard.

Et ça y est, 9h30, les bénévoles nous donnent le bâton marqueur avec notre numéro. 

Je passe le bénévole assis sous l'arbre et lui annonce que je finirai à son niveau, je compte faire encore 2 tours pile dans la petite demi heure qui me reste. Mais finalement j'en ai marre de marcher, je veux profiter de cette dernière demi-heure, et juste après l'avoir passé je recommence à courir ! Je passe Joel 10m plus loin en courant, et j'insiste, j'ai mal mais j'insiste, j'arrive à accélérer, de toutes façons marcher fait mal aussi... Bien sûr le gars des 2 Alpes à qui j'avais dit que je ne pouvais plus courir un peu plus tôt ne manque pas de me faire remarquer "tu vois que tu peux encore courir !" à mon passage dans la zone :-) 





Je double David qui avait pris de l'avance pour réaliser son objectif de 170 km (à défaut du 180 km annoncé comme moi pendant la nuit quand on avait commencé à courir ensemble). Je lui demande tout de suite en le voyant marcher "c'est bon ?" et il acquiesce. Il a donc atteint son objectif, génial ! :-D Et cette fois je le double et continue ma course. Dans les derniers tours l'aire de ravito est devenue une standing ovation géante, tout le monde applaudit quand on passe, encourage, applaudit, crie nos noms, Daniel est déchaîné à commenter les 2 batailles pour les titres de champion(ne) de France (joué à 400m près pour les filles, et 1km près pour les mecs ! :-o )

Dernier tour. Le couple de supporters à l'entrée de l'anneau de vitesse me voyant bien courir me dit "encore un tour", mais je leur réponds que c'est impossible, me disant qu'ils ne se rendent pas bien compte. Je ne sais pas combien de temps il reste exactement, je ne suis même pas sûre de repasser la ligne avant la fin, mais c'est mon but, alors j'accélère, encore, la ligne s'approche, Daniel est en folie, les spectateurs aussi, je passe la ligne, 167km ! 
167km au tableau !
Mais la corne ne sonne toujours pas, zut, j'aurais bien voulu finir juste là. Mais tant que ce n'est pas fini, ce n'est pas fini ! :-) donc je continue, descend le parking, arrive sur Clémenceau, longe tout le boulevard, et d'un coup ça sonne. C'est fini !


Après la course

Pas besoin de me dire de ne plus bouger, je m'écroule sur place, sur le marqueur des 350m. 

Je pose mon témoin à côté de moi et m'allonge par terre de tout mon long. C'est fini, j'ai tenu, j'ai battu mon record, j'ai recommencé à courir, j'ai fini à fond, c'est trop bon. 


Puis Mickael arrive, puis Joel. On a même droit à notre photo dans le Dauphiné le lendemain :-)


Nathalie passe récupérer les dossards et les témoins, même pas besoin de bouger, elle le décroche sur mon cadavre ^^ 

Il va falloir rentrer dans la halle avant de prendre froid, et histoire de boire et manger un peu, ce que j'ai un peu oublié de faire depuis je ne sais pas combien d'heures. Ils doivent s'y mettre à 2 pour me remettre debout et me soutenir jusqu'à la halle. Il y a pourtant à peine 200m, mais qu'est-ce qu'ils peuvent paraître longs ! Une fois sur place je vais me faire masser, puis soigner mes ampoules (j'en ai un paquet !) par les secouristes. Alors que la médecin regarde mes pieds, je me sens partir, j'ai le temps de lui annoncer "je vais tomber dans les pommes", puis plus rien. Je l'entends de loin me demander "vous m'entendez ? serrez-moi la main" comme dans les cours de secourisme, mais je n'ai pas la force de répondre ou de bouger... Je me réveille apparemment pas mal de minutes plus tard allongée sur un lit de camp avec les jambes surélevées, et Mika qui a l'habitude qui a rassuré Joel qui l'a moins ^^ 

Après deux verres de sucre dilué dans de l'eau, je me sens assez bien pour aller voir la remise des prix du championnat de France, avec Marseillaise et tout et tout, en attendant les podiums de la catégorie Open dans laquelle je suis. Ils doivent mettre une chaise sur la 1e marche pour Christine mais elle tiendra finalement à rester debout. Avant de rejoindre la chaise roulante qu'on lui a prêtée. 

Tout le monde est mal en point, on nous aide à monter et descendre des podiums. Daniel me félicite, avant de me dire que je n'aurais pas dû randonner la veille, c'est de la fatigue inutile. 




En même temps, dans l'état où j'étais déjà avec ma crève carabinée et mon manque de sommeil, je ne pensais pas que ça serait ça qui ferait une différence. Le week-end se conclut par un buffet pizzas - salades (je mange trop d'un coup pour me refaire), puis ils plient déjà tout et c'est l'heure de rentrer. En voiture avec Mika :-D et cette année mon ascenseur marche. Direct au lit !

Merci à Piero, Nathalie et toute l'équipe d'organisation, aux bénévoles, à Daniel pour avoir inlassablement mis l'ambiance, à David Stéphane Manu Nadège et tous les autres coureurs, à Joel Marianne Yves et tous mes supporters connus et inconnus, à la météo de ne nous avoir trempés que de jour, et à Mika d'être revenu me soutenir malgré son abandon, d'avoir fait des photos, de m'avoir ramenée...

Et à l'année prochaine !