jeudi 13 avril 2017

24h du Confluent à Portet - 1er avril 2017

Après une dernière semaine stressante (beaucoup de boulot, un changement de logistique et assistance de dernière minute, et des prévisions météos pas rassurantes) j'arrive à Portet en voiture avec ma petite soeur le vendredi soir avec l'envie d'en découdre, pluie ou pas pluie, vent ou pas vent. 
La météo prévue à Portet ce week-end...

Je retrouve avec plaisir le circuit et mes bénévoles et organisateurs adorés lors de la remise des dossards, où on nous offre une doudoune, c'est prémonitoire ? Puis on rejoint l'hôtel, le restaurant pour la pasta party avec vue sur l'orage qui gronde dehors, et nos lits pour une bonne dernière nuit au son de la pluie qui tombe jusqu'au matin... Le samedi matin Gilles vient nous récupérer à l'hôtel pour nous amener sur le circuit, merci ! Ambiance humide, le ciel est gris et il fait frais, mais pour l'instant il ne pleut plus, ce qui facilite les derniers préparatifs. 
Notre installation
On s'installe dans le tipi de Thierry qui nous accueille avec aussi plusieurs coureurs (dont Aude) et marcheurs (dont Florence et son éternel sourire). Puis on rejoint à pieds le briefing sous la halle du marché au milieu des poissons (d'Avril) et des vendeurs et acheteurs, où JC honore les quelques coureurs qui ont terminé toutes les éditions, des figures connues, Patrick le marcheur, le grand Christian, Jacques fraîchement retraité, Mathieu Véron qui avait passé les 200km la dernière fois sous la poussée de tout le PAC, Mimi, Michel, etc. 
Briefing sous la halle du marché
Et puis c'est l'heure de s'aligner sur la ligne de départ dans le parc du Confluent. Je tombe ma polaire puis remonte la "foule" des coureurs (on est quand même pas loin de 200 !) pour poser le pied sur la ligne de départ, chaque centimètre va compter ! ;-) Céline n'est pas loin et immortalise l'instant. La fameuse musique qui me fait vibrer depuis la dernière édition il y a 2 ans commence à retentir (Road game, Kavinsky), je me concentre...
Au départ à côté de Thierry
Concentration maximale

Vidéo du départ par Céline

Et hop, c'est parti. Comme disait Céline, on s'élance à pas de tortue. 
Vidéo du départ par le PAC. La tortue Pikachu passe à 1'21"

Ma montre réglée sans GPS pour tenir les 24h ne me donne donc pas mon allure (elle servira principalement de chrono pour avoir mon temps par tour) mais j'ai tellement répété mon allure de départ que je l'ai dans les jambes sans avoir besoin d'y réfléchir. Je m'étonne quand même que si peu de monde me double. On remonte le long de l'eau (l'Ariège ou la Garonne ?), une petite montée pour sortir du parc et rejoindre le village, quelques centaines de mètres dans les rues, et nous voilà à l'entrée du complexe sportif, accueillis par une rangée de bénévole. 

Un premier tour de circuit, le long des tentes installées sur la droite de 3 lignes droites successives, puis les pavés, l'arrêt de bus, la "descente" le long des camping cars à l'ombre de la haie, la piste cyclable, la chicane, et on passe le tapis de chronométrage pour la première fois. On est équipés d'une puce sur une chaussure, et d'un bracelet sur l'autre cheville, ils ne veulent pas nous perdre ! Plus un dossard devant et un autre derrière. 
Le circuit avec quelques annotations personnelles supplémentaires pour mieux comprendre la suite
Je termine ce premier tour en une douzaine de minutes, Céline est déjà de retour, et c'est parti maintenant pour tourner en rond jusqu'à demain. Pour l'instant Céline me prépare des petits bidons de ma boisson Isostar "pas du tout naturelle" ^^ Une fois réchauffée je tombe le kaway que je garde à portée de main, puis le gilet sans manches, pour garder finalement juste le kway (il vente sérieusement), on ne sait plus comment s'habiller... 


Je me mets dans ma bulle, sous ma casquette, et tourne le hamster. Je mange aussi une première purée en guise de déjeuner, sans m'arrêter pour autant. Céline me passe aussi mes premiers messages arrivés dans la PAC aux lettres, que je lis et relis pendant 1 tour avant de les lui rendre. Parfois c'est David qui me met mes messages dans la main quand je passe sous l'arche. Une fois il me donne d'ailleurs un message assez cryptique avec des choses gribouillées à la main que je n'ai pas réussi à déchiffrer malgré tous mes efforts. Enfin jusqu'ici tout va bien, je double plus que l'inverse.

Les premières heures passent facilement à la même allure, en buvant régulièrement, même s'il ne fait pas chaud. On prend assez rapidement une première averse mais sinon le vent dégage les nuages et nous garde au sec. 

Céline immortalise la fin des 2 premières heures et continuera à alimenter Facebook avec des nouvelles en photo toutes les 2 heures. A ce moment je suis première fille, j'ai pas l'habitude de commencer comme ça !
H2 : première femme ! :-)
Puis elle bouquine à l'abri dans le tipi mais elle a installé Pikachu et ma licorne sur la table dehors. Mes pieds chauffent rapidement (l'humidité ?) et je dois faire une première pause après à peine plus de 2h pour remettre vite fait de la Nok dans ma chaussette ; je ne couperai pas aux ampoules... Malgré tout, Christian, le speaker habituel, m'annonce régulièrement première femme et m'encourage à plusieurs reprises, annonçant aussi ma participation à l'Intégrale de Riquet (pas mon meilleur souvenir...). 

C'est bien la première fois que je suis en tête d'une course dès le départ ! Enfin j'imagine que nous sommes toutes dans le même tour à quelques dizaines de mètres d'écart, comme je suis partie tout devant, et que ça ne va pas durer. J'annonce à une coureuse que je double et qui commente ma première place que "les premiers seront les derniers". En tous cas c'est souvent comme ça : ceux qui partent trop vite le payent ensuite. Mais je ne pense pas être partie trop vite, loin de là ! Au bout de 4h j'ai 37 tours et autant de km.
H4 : toujours première femme, toujours le sourire
Le plan étant de tenir cette allure pendant 4h, à 15h je m'accorde ma première micro-pause, et ralentit un peu l'allure. J'ai dans l'idée de maintenir maintenant une moyenne de 7'30" par tour pour en faire 8 par heure. Cela me permet de marcher de temps en temps quelques pas sur la ligne droite contre le vent, qui est violent. Je vois plusieurs barnums et tentes s'envoler, les barrières tombent les unes après les autres, les bénévoles font le tour du circuit pour les arrimer. Ils ont aussi mis des cales dans chaque fente de la PAC aux lettres pour empêcher nos précieux messages de s'envoler. Au top le PAC !
Deux petits aperçus du vent sur le circuit
Pour nous, c'est usant de lutter contre le vent (j'essaye vainement de me cacher derrière un autre coureur pour profiter de son aspiration ^^ en fait je vais soit plus vite soit moins vite qu'eux...), et ça m'empêche de me réchauffer. La ligne droite opposée (le long des camping cars), vent dans le dos, est plus agréable et donne envie de tomber la veste, alors que je suis obligée de remonter mon col voire ma capuche dès que je reviens dans le stade. 
Derrière Manu, le long des ravitos persos
Enfin au moins, le vent écarte les nuages, et il fait toujours sec. A 5h20 de course je suis passée 3e avec 47 tours, derrière Nathalie Zimmer 49 tours, et Stéphanie Dessartine 48 tours, 2 anciennes de l'équipe de France.
Nathalie Zimmer ne change pas de rythme
Je discute un peu avec quelques coureurs ou les encourage au passage : une coureuse qui porte le numéro 1 (je n'ai pas compris comment ils ont attribué les numéros de dossard, et en plus comme on a eu l'opportunité de choisir notre numéro il y a un peu de tout et pas forcément de continuité dans la numérotation, on s'y perd), une 2e Carole qui n'a pas l'air causante, Amandine la marcheuse, Serge dont je suis la "coureuse préférée", Pierre le coureur des Baronnies, Manu m'encourage plusieurs fois en passant, Sabrina à qui je résume l'épreuve en "la journée c'est que le début, la nuit, puis le matin il ne reste pas grand chose", vu comme ça c'est facile... Jean-Marc que je croise assez peu car on doit tourner à peu près à la même allure.
Jean-Marc aux couleurs de Toulouse, et Christian toujours le sourire
Amandine la marcheuse, en compagnie de Pierre Russias le coureur des Baronnies :-)
Il y a aussi Aude qui me raconte avec découvert avec surprise en lisant mon récit de la précédente édition que je connaissais Igor, qu'elle connaît aussi ! Le monde est petit. Je lui dis qu'il doit passer avec Victor, mais finalement on les attend toujours... dommage... 

Mais globalement je reste dans ma bulle et finit par sortir l'ipod pour couvrir le bruit du vent et me relancer un peu quand ça devient difficile. Toujours un premier moment de doute en milieu d'aprem quand l'allure de départ devient difficile à tenir mais qu'il ne faudrait quand même pas trop ralentir déjà. J'attends presque la nuit avec impatience, comme un premier repère, et puis j'aime bien l'ambiance tranquille de la nuit, on sera moins nombreux et en plus quelqu'un m'a dit que le vent devait tomber vers 23h.

Première alerte stomacale après 1 ou 2 heures de plus, je rechigne à avaler quoi que ce soit, rien dans mon ravito ne me semble plus appétissant, et je m'arrête même vomir une fois. Puis Céline commence à me soigner aux huiles essentielles et à me nourrir de force à coups de jus d'orange-carotte bio dilué (beaucoup plus naturel ^^ et dont j'apprendrai un peu plus tard qu'elle y ajoutait sucre et sel de l'Himalaya) et de soupes et bouillons, parce que plus mon estomac est vide et plus j'aurai envie de vomir. Soit, après tout je l'ai embauchée pour réfléchir à ma place. 
Un bon bouillon chaud
Et résultat miraculeux : le mal de ventre finit par se dissiper et je réussis à manger ou plutôt boire suffisamment d'énergie pour continuer à tourner. 


Merci super ravitailleuse !
Domy des Foys Sonnés, et ma super ravitailleuse qui me guette derrière
Clem et Max passent sur le bord du circuit à ce moment-là, ça fait plaisir de les voir même si je ne prends pas le temps de m'arrêter. Mais au moins ils tiennent compagnie à Céline. Je les laisse discuter et profite de les voir à chaque passage, instantanés de la vie des spectateurs. J'aurais préféré qu'ils profitent en plus du soleil, mais au lieu de ça ils ont droit à une averse. 
Clem et Max devant notre tipi
Mais les coureurs courent toujours, sauf ceux qui marchent, et les marcheurs marchent toujours, et on voit encore des sourires et de l'énergie.  
Florence et Patrick, deux super marcheurs
A 6h de course je suis 3e femme avec 54 km, un classement plus normal.
H6 : les photos comme les heures se suivent et se ressemblent
Clem et Max repartent avant que je fasse ma première vraie pause, après une soixantaine de tours en 7h de course. Je commence par m'écrouler sur une chaise devant notre table installée dehors par Gilles, puis me relève aussitôt pour aller m'installer dans le tipi et en profiter pour me changer complètement, il est encore loin de faire nuit mais j'ai froid. J'échange le short - T-shirt - kway contre un collant mi-long, un T-shirt sec et mon sweat à capuche, et remplace la casquette sensée me protéger de la pluie contre un buff, puisqu'il ne pleut plus. Par contre j'entends le vent secouer le tipi que je vois trembler, c'est là que je me rends vraiment compte de la tempête qui souffle dehors : on court vraiment là-dedans ? J'en profite aussi pour noker les 2 pieds et changer de chaussettes. Pendant ce temps Céline me lit quelques messages arrivés sur facebook où elle poste une photo toutes les 2 heures : multi-tâches ! En une dizaine de minutes c'est tout bon et je repars un peu requinquée et en tous cas réchauffée. 
Photo by Jacques

Heureusement il y a encore du monde et de l'énergie sur le circuit, on peut discuter de temps en temps. Mathieu Véron que j'encourage régulièrement m'attend quelques minutes, il pensait que mon iPod m'empêchait de l'entendre, on discute un peu puis il reprend son rythme plus rapide. Cédric court pour François avec sa photo sur son dossard, leurs Champs-Elysées me manquent aussi. Une coureuse porte un gilet Ut4M, j'essaye d'engager la conversation mais elle est dans sa musique. Et puis chacun son allure, je repense aux conseils de Piero, rester concentrée, ne pas se laisser entraîner dans un faux rythme.
 
Mathieu Véron, Mimi, Cédric, et un gilet Ut4M

 
A 18h, début de la 8e heure de course, il y a encore bien du monde qui court et marche sur le circuit. Les températures plus faibles que les années passées ont épargné les corps, même si pour ma part j'aurais quand même préféré avoir un peu plus chaud.

Je n'arrive déjà plus à tenir l'allure de 7'30" par tour. Je multiplie les pauses aux toilettes où je profite pour me détendre les jambes, et marche un peu trop souvent la ligne droite au vent (je commence à en avoir marre de ce vent). Je fais mes premiers arrêts au ravito de l'orga pour boire un peu de jus de fruits. 
Rangées de verres bien alignés au ravito officiel, auquel je m'arrête très peu
Je ne ferai que 6km sur la 7e heure, et de nouveau 8 sur la 8e heure, ma moyenne chute. Résultat, à 8h de course j'ai fait 68 km. 
La photo des 8 heures, ça devient un peu plus dur
Il est à peine 19h, on a fait un tiers et il en reste 2 à tenir, et je commence à douter. C'est dans ces moments-là que les messages font du bien, savoir qu'il y a tant de monde derrière moi, qu'on me suit à distance : Piero mon coach, mais aussi les Samedis du Jogging, les TEE, les ambassadeurs Ut4M, Fabrice qui n'est pas là cette année mais m'encourage à distance, Marc, Hélène, Christine... Mike m'envoie une énigme que je renonce à résoudre, mes capacités de concentration sont prises ailleurs pour l'instant, Stef me fait marrer avec ses blagues, et je continue. Malika passe sur le circuit pour nous encourager, avec tout un fan club de Jean-Marc. 
Photo by Malika à 8h30 de course
Heureusement qu'il y a les supporters. Un gars installé dans un barnum dans le coin en face du terrain de rugby met de la musique à fond, danse, se balade avec sa radio sur l'épaule, je suis morte de rire, ça distrait momentanément de ces tours qui deviennent lassants.


Je cours mais je doute. La barre des 200 revient me taquiner, passera, passera pas ? Je doute... Ce n'est pourtant pas le moment de réfléchir. Alors j'avance comme je peux. Je doute mais je cours. La nuit tombe, le circuit se calme, la fatigue commence à se faire sentir, beaucoup accusent le coup. Du côté des Foys Sonnés, je vois Christian qui se rhabille et s'apprête à aller dormir. 

Céline est toujours là pour me soutenir et me ravitailler. A 10h de course j'ai fait 82 km et je suis repassée 2e, je crois que Stéphanie a arrêté. A nouveau plus haut que bas, un vrai grand 8 cette course.
Photo des 10h by Céline
A 21h30 j'ai 86 km soit 12 tours de retard sur Nathalie qui a gardé le même rythme depuis le début, et 2 d'avance sur la 2e Carole dont je ne sais même pas à ce moment qu'elle me talonne. C'est son premier 24h, elle vient du triathlon. Et à ce moment-là je me fiche encore du classement, mais je crois qu'elle est en chasse.
Pendant ce temps chez la réflexologue...
Je fatigue, quand je reçois un message de Marc qui me souhaite une bonne nuit tout en me disant de ne surtout pas dormir. C'est le plan, mais mon corps n'est pas très d'accord... Stef lui, me dit que j'ai fini l'échauffement et que je vais pouvoir attaquer maintenant, oups. Mais je me relance effectivement un peu à coups de musique (les Barbapapa, rien de tel pour me faire penser à mes neveux et me rebooster un peu). Je passe 8km en 1h et prend un tour à ma poursuivante et à la première (mais sans le savoir à ce moment-là). A 22h30 j'ai fait 94 km (105 pour Nathalie, 91 pour Carole B). 

On atteint la mi-course, 23h, ça fait toujours du bien de se dire qu'on a fait la moitié, et puis on peut commencer à extrapoler. J'en suis à 98.5 km, je passe les 100km à 23h18 (soit à peu près pile pareil qu'en 2014, mais en étant partie moins vite cette année mais avec moins de pauses, pas de massage ^^). Un petit message de mon Stef qui me demande si j'ai le droit de faire demi-tour maintenant que j'ai fait la moitié, je me marre toute seule dans le noir, sacré Stef :-) J'ai maintenant 4 tours d'avance sur Carole B, et 13 de retard sur Nathalie, intouchable. Avec même pas 100km sur la première moitié, je peux déjà dire adieu aux 200km, tant pis, je peux encore faire un bon 190, et puis de toutes façons y a pas à réfléchir, juste à avancer.
Moitié ! 98.5 km, 2e femme, et le sourire :-)
Pendant ce temps, on se prend averse sur averse, heureusement légères, mais c'est tout de même usant, jamais le temps de sécher, mais je ne pense pas à me changer pour me réchauffer, sans doute peur de ne pas rester sèche longtemps entre 2 averses. Je lutte pour ne pas dormir, en enchaînant les shots de caféine et les soupes (dans lesquelles Céline me mélange de la purée, je me disais bien qu'elles étaient vachement bonnes et épaisses). J'ai l'impression de perdre du temps à chaque fois qu'elle me passe une tasse de bouillon car je dois marcher le temps de la boire. La prochaine fois il faudra faire du bouillon en bidon. Du coup je marche une moitié de tour après le ravito, et je relance toujours en courant à partir de l'arrêt de bus sur une petite descente. La nuit se passe comme ça et le classement ne change pas. A 00h30 j'ai fait 107 km (105 tours), Nathalie s'éloigne toujours sur la même allure (14 tours devant) et la 3e reste à 4 tours derrière.

C'est là que Céline commence à fatiguer et part se coucher, en me laissant à portée de main ma veste (que j'ai refusée à chaque averse, toujours finie aussi vite qu'elle était commencée), mon pantalon de pluie, et un stock d'eau chaude, de boissons, de purée, de caféine, bref tout ce qu'il faut pour tenir en son absence. Mais je commence à fatiguer aussi, je voudrais bien faire comme elle, sa tente m'appelle, et le circuit manque un peu d'animation. Mes yeux se ferment malgré les shots de caféine (et de sucre) que j'ai commencé à boire. Je fais un tour entier en marchant (n°107), ce qui a pour effet de m'endormir encore plus, erreur fatale, et m'arrête finalement au ravito. 

Ecroulage au ravito
Plus exactement, je m'écroule au ravito, sur une chaise et adossée à la toile de tente, mais j'ai la chance qu'Henri soit au ravito à ce moment et vienne tout de suite me parler, me demander ce que je veux. J'en sais trop rien à vrai dire, un oreiller ? Il m'apporte un bol de soupe de pâtes archi-plein, j'en mange un peu, puis une crêpe, un café serré de chez serré, je reste presque une vingtaine de minutes mais ça va mieux, je repars, d'abord en marchant, puis en alternant marche et course avec à nouveau des tours en 9 minutes. Pendant ce temps CaroleB est remontée moins d'un tour derrière (110 tours à 109 à 1h30). Mais encore une fois je n'y fais même pas attention, je lis rarement l'écran pendant la course. Puis Céline est de retour vers 1h30 après une petite sieste qui n'aura pas duré plus d'une heure, à temps pour immortaliser la 14e heure et 112 km.
H14++ il pleut... mais tout baigne :-)
Je reçois encore quelques messages des couche-tard qui abandonnent un à un leur ordi pour aller dormir un peu. La course doit être intéressante à suivre s'il y en a qui ne dorment pas encore (en tous cas moi si) : vers 2h30 du matin, changement de classement, CaroleB me dépasse et est quelques minutes devant moi. D'autant que je recraque (peut-être parce que je suis passée 3e ? je préfère en général passer la course à remonter du fond du classement que faire le parcours inverse. Mais bon, au général par contre je remonte, et Nathalie est 3e au scratch avec déjà 140km, une machine !). 
Nathalie toujours aussi régulière
Je refais 2 tours d'affilée en marchant, et le reste du temps je marche toujours la même ligne droite à l'arrière du circuit, avec vue sur la lune qui nous surplombe, et en regardant le ciel pour saluer ceux qui nous y regardent peut-être. Ciel qui nous arrose aussi toujours copieusement, je ressors le kway pour essayer de rester au sec.

3h du mat', le coeur de la nuit, plus de sono depuis bien longtemps, même les photographes se sont arrêtés, mon cerveau aussi sans doute, car je n'ai aucun souvenir, je ne devais pas être bien réveillée, ou concentrée. Comme les quelques coureurs encore dehors sous la pluie, je tourne en pilote automatique, en courant un peu, et marchant beaucoup. Ce qui laisse ce regret après coup d'avoir tant marché, pourquoi n'arrivais-je pas à me motiver à courir ? Après coup c'est plus facile de se dire qu'il suffisait de faire comme les quelques autres qui couraient quand même, de se motiver. Mais sur le coup c'est difficile de garder la motivation pendant toute la durée de la course, n'ayant pas d'objectif de chrono ou de classement à ce moment. Erreur fatale, encore.
Les secouristes veillent
Parmi les rares fantômes qui hantent encore le circuit, un coureur en pyjama. Et Nathalie qui me double de plus en plus souvent, en m'encourageant à chaque fois. 

Mais la magie du 24h, c'est que ça revient comme ça s'en va, et ça finit toujours par repartir. A 3h du matin, je reprends la 2e place, on est au coude à coude avec l'autre Carole.
H16 by Céline

A 3h30 je suis de nouveau un peu moins d'un tour devant, et encore quelques minutes de plus devant à 4h. Nathalie avec 20 tours d'avance est intouchable, elle file vers les 200km et me dépasse encore régulièrement, se réjouissant en remarquant que "c'est reparti". Le "Rémi bot" fait aussi son apparition dans la PAC aux lettres avec quelques messages déjantés. Puis je recommence à m'endormir et à ralentir, et la 2e place m'échappe peu à peu, le grand 8 est de retour. 
H18 by Céline

CaroleB a un tour d'avance à 5h, 2 à 5h30, 3 à 6h. Et je recommence à craquer complètement. La nuit que j'attendais avec impatience commence à se faire longue : quand va donc se lever ce soleil ? Debout les oiseaux, réveillez vous et chantez !

En plus vers 5h30 Céline retourne se coucher (c'est qu'elle a 9h de route à faire cet après-midi pour nous ramener à la maison. "Cet après-midi", qui semble si loin, comme une autre vie). Puis Christian m'annonce 3e fille (avant ça, je n'avais même pas capté, quand je disais que j'étais dans ma bulle...), et c'est là que je capte la bataille qui se jouait depuis quelques heures déjà. et une nouvelle fois je craque. Décidément mon mental laisse quand même un peu à désirer... Après quelques tours de plus en plus au ralenti (9mn, puis 10, puis 11, puis 12) je retourne m'écrouler au ravito. 

C'est la fête, les bénévoles dansent sur les Lacs du Conémara, plusieurs coureurs sont attablés tranquillement, mais je ne suis pas dans l'ambiance. Malheureusement Henri n'est pas là cette fois pour me remonter le moral. Je m'écroule sur une chaise et m'adosse à la toile de tente, avant de m'écrouler sur la table en face de moi et de commencer à trembler de tous mes membres.  Après, je sais plus trop mais on m'a mis une couverture, envoyé les secouristes, qui m'escortent à l'intérieur, et en un rien de temps je suis allongée sur un lit de camp au poste de secours avec Sylvie le PAC médecin à ma droite et une secouriste à ma gauche qui me prend la température dans l'oreille. Résultat : 35.3 °C, apparemment c'est pas terrible... Bouillotes, couverture de survie et 2 couvertures par-dessus, bouillon, rien n'y fait, je ne me réchauffe pas, ma température oscille entre 35.3 et 35.6. En plus à chaque fois que je m'assied j'ai envie de vomir, pas de tension non plus mais ça c'est plus habituel. J'ai envie de dormir et envie de pleurer en même temps, je vais pas rester là 2h à attendre que ça passe, mais cela dit je n'arrive pas à me résoudre à ressortir dans le froid alors que je n'ai pas encore arrêté de trembler. JC et Valérie passent et prennent de mes nouvelles, j'ai toujours aussi froid, Valérie me passe une doudoune rose parce que Céline dort et que je ne sais pas où sont mes habits chauds. Je veux repartir, je ne peux pas rester là, j'ai une course à finir. Je me rassied et commence à m'habiller mais j'ai toujours envie de vomir. Et là ma sauveuse arrive en la personne de Céline, réveillée par un message de Clem qui s'inquiétait de ne plus me voir tourner depuis 6h10. Elle m'a cherchée partout, fait tout le tour du circuit avant de me trouver ici. Je la renvoie me chercher ma veste la plus chaude (je l'aurai fait courir la pauvre...) et mange un peu en attendant. Elle me donne aussi quelques messages à lire. 
H20 by Céline - chez le doc
Pendant ce temps dehors le jour se lève petit à petit sur le circuit trempé.

Les secouristes me laissent repartir en compagnie de Céline après presque 1h30 d'arrêt, avec pour consigne de commencer tranquillement en faisant un tour ensemble. On fait le tour en marchant en 12'43", d'autant que j'ai bien mal aux jambes à cause de l'arrêt, je ne sais pas encore comment je vais repartir. Mais ça va revenir, ça revient toujours, et puis je veux faire un beau finish. Je me réchauffe petit à petit, j'ai toujours mon sweat humide, puis ma veste chaude et la doudoune par-dessus, et j'ai en plus le bonnet Pikachu magique. 
Pikachu s'échauffe
Un coureur avait dit à Céline un peu plus tôt que quand je porte ce bonnet, je vole. Etrange prémonition, sachant que je ne l'avais encore jamais porté en course. Mais prémonition véridique, car après ce tour en marchant, j'envoie Céline en éclaireuse au ravito me faire un thé, puis je commence à trottiner, dépasse le ravito et Céline qui n'a même pas le temps de me tendre le thé, et disparaît en courant. On dirait que c'est reparti, tour suivant en 8'48". 
Pikachu est chaud, ça va chauffer !

J'ai raté le lever de soleil, et le circuit s'est déjà bien réveillé en mon absence. Christian a repris son micro.
Christian Reina au micro
Christian Dal Corso est de retour sur le circuit, toujours avec le sourire. D'autres sourires n'ont pas quitté le circuit de la nuit.


La météo n'est pas super sympa avec nous, il fait vraiment froid, humide, et le camion de cryothérapie qui sur le papier avait l'air d'une bonne idée pour la récup semble maintenant plutôt nous narguer un peu... alors que beaucoup tournent avec doudoune, parapuie, poncho ou couverture de survie.
Cryothérapie quelqu'un ?



Mais Pikachu se réchauffe en courant.




En revenant au tapis de chrono, je dis à Céline que j'ai dû passer quarante-douzième au classement, mais elle me rassure, je ne suis que 4e, 3 tours derrière Mimi. OK, game on ! et je repars de plus belle. Après 3 tours en plus ou moins 7mn (le premier je tombe la doudoune, le 2e je tombe la veste), le suivant et 148e tour passe en 5'34" ! Malheureusement je passe à côté du tapis en doublant un gros embouteillage sur le tapis (tout le monde commence à se réveiller et revenir sur le circuit, et on est obligés de slalommer) et ce tour ne sera pas compté... snif, mon meilleur tour... :-/ 
Embouteillages...
Le tour suivant encore en moins de 6mn, et ça continue sur le même rythme, je ne marche presque plus à part pour me ravitailler, je refuse même les messages qui continuent d'arriver, pas le temps de ralentir. 

Je demande à Céline de me mettre sous "perfusion de sucre". Pompote, boisson isostar, jus de carotte, shot caféine, j'enchaîne les trucs sucrés pour être sûre de tenir le rythme et ne pas faire une hypoglycémie maintenant. Je cours et je m'éclate à nouveau, j'ai mis la playlist magique spéciale finish et je chante avec. Par contre ça devient pénible de doubler les embouteillages : tout le monde est de retour sur le circuit pour la fin, mais peu de monde court encore. Je double quasiment tout le monde maintenant, même Nathalie qui a finalement un peu ralenti, mon tour de l'encourager. Je double aussi Carole quelques fois, et surtout je double Mimi, qui s'en fiche visiblement pas mal de défendre sa 3e place et se balade avec le sourire :-) 

Je lui reprend progressivement 1 tour, puis 2, puis 3, et je continue encore et encore à courir, on dirait que rien ne peut plus m'arrêter, ça n'aurait pas pu arriver avant ?!
Check sur le tableau de passage
Pikachu repasse 3e
Les tours passent comme dans un rêve, je cours, je vole, je double, je ne m'arrête que pour passer aux toilettes, plusieurs fois (ma digestion fonctionne à plein régime, c'est bon signe je suppose, ou bien c'est le 2e effet kiss cool de la haute dose de caféine descendue pendant la nuit). Les spectateurs aussi sont de retour au bord du circuit, et tout le monde encourage Pikachu, mon bonnet a du succès ! :-D Malika est de retour, je lui répond des "pika pika", je m'éclate.

Ravito perso - photo by Malika

A 9h du matin, je suis 3e et j'ai toujours la pêche. Céline immortalise les derniers instants au sec avant de plier la tente, belle inspiration.
H22 by Céline

Pliage de tente, belle inspiration
Là-dessus il recommence à pleuvoir, mais pas une petite averse comme cette nuit, ça tombe de plus en plus fort, ça finit rapidement par tourner au déluge. Je demande à Céline ma casquette pour éviter de prendre la pluie dans les yeux, mais je reste en sweat de plus en plus détrempé, j'ai dû gagner 2 kgs rien qu'avec la flotte qu'il a absorbée. Pas le temps de réfléchir. Bizarrement, ça m'éclate. Je parle aux nuages et au ciel, allez-y, balancez-nous ce que vous voudrez, rien ne peut m'arrêter, je m'en fous, je m'éclate. Je double 1 ou 2 fois des coureurs qui commencent à s'énerver tous seuls, marre de la pluie. D'autres sont enveloppés dans des ponchos de pluie, une couverture de survie, de grosses vestes d'hiver, ou bien courent sous un parapluie. 

C'est le déluge, mais les bénévoles du PAC sont là, certains avec un sac poubelle enfilé par-dessus leur veste dans une vaine tentative de se garder au sec, d'autres sous des parapluies, mais ils sont là, sous le déluge, et ils dansent. Ils dansent au bord du parcours avec un sourire jusqu'aux oreilles, en nous encourageant, comme si de rien n'était. J'ai envie de pleurer, ils sont merveilleux, vous êtes tous fantastiques les PAC runners ! 





Alors le moins qu'on puisse faire, c'est bien de courir, courir encore, courir jusqu'au bout. Chaque passage du chrono on est accueillis, encouragés, portés, par une double rangée de bénévoles, j'adore. Céline s'est aussi jointe à eux pour profiter de l'ambiance. 



Vive le PAC
 Des flaques se sont formées un peu partout sur le parcours, d'abord évitables au prix de quelques détours, puis plus vraiment, alors je cours en plein dedans en prenant juste garde de ne pas éclabousser les autres. J'ai retrouvé ma légère foulée pointe de pied, ça aide. La pluie tombe toujours, de plus en plus drue. Mon bel enthousiasme du début commence à laisser la place à un peu d'agacement. Je suis trempée jusqu'à l'os, j'aimerais bien que ça s'arrête maintenant, c'est bon, on a compris. Mais les bénévoles sourient toujours.
 

 Mon rythme ne ralentit pas malgré la pluie.

Arrive la dernière heure, la dernière demi-heure, le dernier quart d'heure. Une bénévole me met mon bâton dans la main en me disant quelque chose à propos de ne pas oublier la photo, je ne sais pas bien de quelle photo elle parle, mais je ne suis plus en état de réfléchir. 
Distribution des témoins

Je passe la ligne bâton en main alors qu'il reste juste 11mn, et je me demande si je peux encore boucler 2 tours ?
Photo Céline : << elle nous prépare un 5'30" >>, elle croyait pas si bien dire !
J'accélère encore, un tour à 10km/h, je repasse devant Céline avec moins de 4 mn à tirer avant la fin, un rapide calcul, je vais finir toute seule à l'opposé du circuit et devoir revenir à pieds au départ, ça ne va pas du tout. Alors je commence à accélérer, à accélérer encore, à sprinter carrément, je double, la corne retentit pour la dernière minute, je passe la chicane, revient dans la ligne droite finale... à 4'48"/km... et la corne retentit, 15 secondes trop tôt, je m'arrête net à quelques mètres du tapis rouge, trop court, mais quel dernier tour ! 

Tout le monde s'arrête net sur place, les jambes capables de sprinter quelques secondes avant la corne ne peuvent soudain plus nous soutenir un mètre de plus. La force du mental...


Céline me rejoint, elle était partie à ma rencontre, ne pensant pas que j'arriverais à finir le tour. Je m'allonge par terre de tout mon long, dans l'eau, trempée pour trempée après tout... Un bénévole arrive et pose sa veste sur moi, un 2e vient m'abriter avec son parapluie, un 3e immortalise l'instant. Une 4e bénévole récupère les puces sur mon cadavre pour les poser avec mon dossard et mon bâton et marquer ma position finale.


Je ne m'attarde pas par terre, j'ai réussi à m'écrouler juste en face des douches, bien visé, et je m'y dirige sans tarder. Céline m'apporte mon sac post-course avec mes affaires de rechange (un short, j'ai été optimiste...) et de quoi manger et boire. Une bonne douche bouillante plus tard, des vêtements secs, je retourne au poste de secours pour soigner quelques jolies ampoules et prendre un peu de repos avant les podiums. Pas de malaise cette fois, alimentation bien gérée, merci à ma ravitailleuse de choc ! Pendant ce temps les bénévoles du PAC ont réussi à déménager le buffet, le podium et des dizaines de chaises (prévu dehors) vers une halle abritée des frasques de la météo, au top jusqu'au bout ! 
La halle pour la cérémonie finale
Suit la (longue) cérémonie des podiums (hommes, femmes, catégories - course, marche, régional), le passage de pouvoir de JC qui quitte la présidence du PAC (snif...), et le buffet dehors au soleil qui a finalement décidé de se montrer (c'est malin...). Après manger, on récupère notre voiture garée juste devant sur le parking des officiels, et c'est parti pour 9 très longues heures de route.
3e femme, 1e senior (H et F), et 12e au scratch. Nathalie 1e avec 203km, 3e au scratch !
Au final, une édition qui restera dans les mémoires très longtemps pour sa météo dantesque. Une course faite avec la meilleure ravitailleuse que je pouvais espérer avoir, merci Céline ! Aucune blessure, aucune douleur articulaire, une super prépa, merci Piero. Quand même un fond de regret d'avoir craqué à 6h du matin et de m'être arrêtée si longtemps alors que j'aurais encore pu défendre la 2e place et chercher un meilleur kilométrage. Et une très grande impatience de recommencer sur le circuit de Portet avec ce club que j'adore, merci le PAC ! D'ici là, il va falloir gagner un peu de vitesse et revoir la stratégie pour passer la nuit dans de meilleures conditions. Rendez-vous en avril 2018 ! :-D