lundi 21 avril 2014

24 heures du Confluent à Portet-sur-Garonne - 5&6 Avril 2014

En Octobre aux 24 heures de Grenoble (support du championnat de France 2013) on nous avait annoncé que le championnat 2014 aurait lieu à Portet-sur-Garonne. Comme c'est pas loin de Toulouse, et que j'avais bien aimé l'ambiance championnat avec son suspense dans la course "élite", j'avais décidé d'y aller. Départ de Grenoble le vendredi pré-précédent, pour rejoindre Paris pour l'Ecotrail samedi et une réunion de travail mardi ; puis translation directe vers Toulouse mardi soir pour 3 jours de boulot ; et enfin arrivée à Portet vendredi soir, veille de la course, pour la pasta party (en discutant avec des bénévoles du PAC) et une nuit sur place. Ayant bien récupéré de l'Ecotrail en quelques jours, l'envie est vraiment montée et je ne suis même pas tellement stressée, j'ai plutôt hâte de commencer !

UN 24 HEURES, HEURE PAR HEURE

8h, H-3
Après une nuit agitée et peu reposante, passée à faire divers rêves ou "cauchemars" sur la course et tout ce qui pourrait mal se passer (comme d'hab), c'est enfin le matin. Je descend pour le ptidej, 3h avant le départ c'est bien. Impossible de trouver mon ticket, je ne savais même pas qu'il en fallait un, on me renvoie le chercher, je me vois déjà appeler mon équipe de soutien pour me faire livrer du pain, mais finalement on m'en dispense (de ticket, pas de ptidej). J'avale quelques tartines baguette-confiture et un peu de thé en discutant avec d'autres coureurs, et je retourne m'allonger pour passer le temps.

 


10h, H-1
Un petit tour dehors pour installer mon ravito perso, mais les bénévoles sont encore en train d'installer les tables.


Je remonte et je reste allongée dans ma chambre jusqu'au dernier moment. Du coup quand je finis par redescendre c'est vraiment l'effervescence. Je retrouve mon équipe de soutien qui vient d'arriver et on part tous en procession vers le départ au centre village. 


Le briefing a lieu sous la halle, puis rassemblement entre les barrières, premier pointage, discours officiels, et attente...

11h, H
Originalité, le départ est donné dans le parc du confluent Ariège-Garonne, derrière les vélos et rollers qui nous ouvrent la route..

Je suis tout derrière le peloton, avec Cédric et François qui se demandent s'ils devraient sprinter le 1er tour :-) Je pars tranquillou à mon rythme, en admirant la Garonne qu'on longe sur 1km avant de sortir du parc par une petite côte !


Tout le monde est sage, je suis à 10km/h voire moins. On fait encore un petit kilomètre de ville avant d'entrer sur le circuit, on passe un portail et je me dis "ça y est, c'est parti, nous voilà sur la boucle qu'on ne quittera plus pendant 24 heures".
On en fait déjà le tour une fois avant d'être chronométrés pour la première fois. Mais je n'aurai jamais à aucun moment de lassitude du circuit, marre de tourner en rond, non, le circuit est assez sympa avec plein de virages et de chicanes, de changements de terrain, de points de vue différents, on ne s'y ennuie pas.

LE CIRCUIT
A partir de l'entrée par le portail, c'est d'abord du bitume tout pourri où il faut faire attention de ne pas trébucher. Puis on arrive au bord du terrain de rugby, on tourne à droite pour le contourner, bitume bordé de gravillons/sable. On passe sous l'arche jaune gonflable du sponsor 

avant de tourner à droite pour entrer dans le long couloir de tentes et de tables de ravitaillement personnel. 

A la sortie de ce couloir, on passe sur des pavés tout gondolés, avec le bloc toilettes à gauche, 

puis retour sur le bitume pour s'éloigner du terrain de rugby. On longe un bar avant de tourner vers la droite-gauche-droite, en essayant à chaque fois d'optimiser la trajectoire. Une petite descente nous amène à un arrêt de bus, 
puis on court sur la route (voitures en circulation alternée sur l'autre voie), le long d'une haie. On est à l'opposé du parcours, puis virage à angle droit à droite, on longe toujours la haie à droite, et le parking des camping cars à gauche, sur une longue ligne droite bitumée (ou sur le trottoir ombragé, tant que la montée de la marche n'était pas rédhibitoire). Au bout on tourne encore à droite sur la piste cyclable qui nous ramène vers le centre du circuit. Encore une chicane droite-gauche avec souvent des embouteillages de coureurs, et on arrive entre les barrières sur le tapis rouge, à gauche l'estrade du speaker, à droite les informagiciens du PAC qui gèrent le chronométrage, plusieurs écrans pour afficher les classements. Puis le ravito de l'organisation sous tente à droite et son immense présentoir à gobelets numérotés. 

Toujours sur la piste cyclable, on longe le bâtiment où oeuvrent les kinés (qui abrite aussi les chambres, le ptidej, et des toilettes), et d'autres bâtiments, avant de tourner à droite pour passer le portail, avec son tapis rouge pour adoucir un peu le passage de sa glissière au sol, mais plusieurs y trébucheront quand même. Et rebelote...

On fait donc 1km avant d'entrer sur le parcours, plus un tour complet du circuit, avant d'être chronométrés par les informagiciens pour la 1e fois au niveau du ravito officiel. 300m après c'est le long couloir des ravitos persos, mais mon équipe de soutien revient du parc en marchant, ils ne sont pas encore arrivés.

Je me suis retrouvée par hasard derrière Chantal Tregou dossard 207, dont un mec me dit avec une pointe d'admiration qu'elle courait 200km en partant tranquillement comme ça (on est à 9.5 km/h). Comme son rythme me convient bien (et sa distance aussi, dans mes rêves ^^) je me cale sur elle, ça m'évite de réfléchir.

Je fais assez tôt une pause toilettes et je la perds, dans la foulée je m'arrête aussi en express au ravito de l'organisation (mon équipe de soutien n'est pas encore arrivée sur le circuit) pour quelques abricots secs et amandes, histoire de garder mon niveau de sucre correct. Et finalement je rattraperai Chantal un peu plus tard, et finirai même par la doubler, et vice-versa. Pour l'instant aux hauts-parleurs il y a surtout de la musique. On a droit à "we no speak americano", je dois me retenir pour ne pas accélérer, puis une belle musique sur laquelle je n'arrive pas à mettre un titre, je m'arrête au ravito pour leur demander ce que c'est, en vain. On entend la musique à plusieurs endroits du parcours qui dessine plus ou moins un 8 autour de ce centre. Plus tard le speaker prend le relais pour mettre l'animation.

Midi, H+1 - 108e avec 9km - 1eH 12km, 1eF 11km
Mes supporters se posent sur l'herbe pour le pique nique. Je les salue et ils m'encouragent à chaque tour, ça fait plaisir.

Pour l'instant je m'arrête peu, à peine quelques secondes pour boire ou manger de temps en temps, au feeling, pas du tout fait de plan de m'arrêter tous les X tours. J'ai toujours ma foulée avant-pied, et je remarque que j'alterne régulièrement avec une foulée plat de pied plus reposante pour les mollets mais plus lente. Puis j'abandonne progressivement complètement la foulée avant-pied à mesure que le temps passe, et ma vitesse diminue déjà un peu, mais toujours à 9+ km/h.
Au fond du parcours on longe un arrêt de bus le long de la route (en circulation alternée du coup), où des voitures nous encouragent régulièrement en klaxonnant. Les traits de peinture au sol indiquent le chemin le plus court mesuré officiellement, avec des marques de distance. Ici on est sur la marque des 650m, et j'ai très tôt une prémonition que c'est là que je vais finir la course demain.


Tout le monde est concentré, rentré dans son rythme, mais je suis surprise d'entendre des coureurs essoufflés... Un Chris me double régulièrement avec une foulée qui me paraît bien trop lourde et trop rapide, et j'arrêterai d'ailleurs de le voir au bout de quelques heures (vérification faite, il a arrêté avec 63 km). Partir trop vite ça ne pardonne pas.

13h, H+2 - 106e avec 18km, 1eH 24km, 1eF 22km
Notre voisin de table (table 57, et moi 58), qui discute avec mes supporters, trouve d'ailleurs que je suis partie trop vite pour mon objectif de 180km. Ils me disent que je fais les tours en 6'30, moi je trouve ça impeccable, je sais que je peux le tenir longtemps (et dans ma tête je me dis que si c'est trop vite pour 180 km, j'en ferai plus ^^). Il est là pour soutenir sa femme Martine Guilhambet (dossard 219), et me recommande de la suivre, que je dois comprendre que la course commence au bout de 17h. Je sais bien que ça ne fait que commencer. 

On se fait régulièrement doubler par les têtes de course hommes qui courent en petit groupe tous ensemble. Ils serrent la corde et ne perdent pas le moindre centimètre, j'admire, pendant que je fais des détours pour doubler, discuter, etc, tout en essayant de rester à la corde autant que possible quand même. Je fais des calculs, 10 cm perdus par tour, et au bout de 200 tours c'est 2 km non comptés, c'est énorme...

14h, H+3 - 100e avec 27km, 1eH 36km, 1eF 31km
Je discute avec Mimi qui se plaint des règles FFA qui lui interdisent de dormir dans son camping car, on ne peut se poser que dans la salle de repos prévue à cet effet. Le fait d'accueillir le championnat de France impose forcément une plus grande rigueur sur le règlement...

On commence à voir les 1e dégâts pour ceux partis trop vite. J'ai rattrapé Cécile, 1e femme sur les 2 premières heures, qui en est maintenant à 23km et abandonnera à 72km.

Notre voisin est maintenant content de ma vitesse, alors que je n'ai pas l'impression d'avoir ralenti, je suis rentrée dans ma bulle. Le début se passe comme sur un nuage, j'ai pas du tout mal au ventre (ça me change), peut-être car je n'avale quasi rien de solide. En fait j'ai décidé vu la chaleur de me ravitailler essentiellement liquide : ma poudre overstims récupérée à la fin de l'écotrail, avec laquelle ma super équipe me remplit mon verre à chaque fois que je le vide. Plus tard je leur passe mon jeu de coinche quand ils commencent à s'ennuyer, du coup ils sont concentrés :-) mais j'arrive quand même à leur demander des refills de loin, un peu gênée de les tirer de leur partie. Au départ on respecte le dosage recommandé, puis comme il fait très chaud je le demande 2 fois plus dilué, et j'alterne avec de l'eau gazeuse. Je m'arrête de temps en temps au ravito officiel aussi, toujours express, juste le temps d'un verre (ou demi-verre) de Quezac.

Il fait de plus en plus chaud, on recherche l'ombre en courant sur le trottoir le long de la haie au fond du parcours

Mais la marche devient aussi de plus en plus dure à monter au fil des heures :-) une barrière empêche de couper le virage, il faut donc descendre du trottoir et y remonter pour passer le virage... ça me fait penser à Clem qui pensait qu'on pouvait gagner quelques centaines de mètres en coupant les virages : eh non. Heureusement le vent commence à souffler et à nous rafraîchir. D'autant qu'il balaye régulièrement des nuages devant le soleil. Les bénévoles installent aussi 2 gros bacs d'eau juste après le portail pour s'arroser.

Je fais de temps en temps un petit tour avec un autre coureur, Ricardo l'espagnol, puis son ami Serge le coureur du désert, Xavier qui a aussi fait l'Ecotrail le week-end passé (arrivé 5mn après moi), Jean-Claude déjà vu à Grenoble toujours avec son t-shirt UT4M, etc mais je ne m'attarde jamais, je préfère rester à mon rythme sans aucune distraction, concentrée, ne pas me laisser accélérer ni ralentir par d'autres coureurs. Mêmes mes préférés, les animateurs Cédric et François,

qui entonnent les Champs Elysées à fond à chaque fois qu'ils traversent le couloir de ravito perso, quelques supporters reprennent avec eux au début, puis ils finissent par se faire engueuler par ceux qui s'en lassent.

J'encourage régulièrement d'autres coureurs, Franck qui complimente ma foulée, Patrick impressionnant avec son attelle qui m'encourage à coups de "allez ma grande", Christelle et Nathalie 2 filles en open que j'entends discuter ensuite "Carole elle m'a encouragée à chaque tour" :-),

Jeannick qui discute à chaque fois... 2 gars (Didier 521 et Philippe 553) qui se moquent genre "regarde comment elle se la joue", et mes 2 animateurs qui me suivent de temps en temps pour un tour avant de ralentir à leur rythme, Xavier de l'ecotrail, Jean-Claude de l'UT4M, Piero qui m'encourage en me passant "allez Carole", et je répond toujours la même chose, "allez Piero super", parfois Chantal Tregou, dont j'admire la foulée, ou Stéphanie Le Floch, dont je suis contente de voir qu'elle se rappelle de moi (elle était à Grenoble), ou encore Florence Gay, que des filles super fortes que j'admire.

15h, H+4 - 100e avec 36km, 1eH 49km, 1eF 41km
Je tourne toujours avec une régularité d'horloge :-) Au milieu de cette 5e heure j'arrive au 40e km et j'ai hâte de venir annoncer mon 1er marathon à ma table quand je vois Clem et Max décoller, le temps de finir mon tour je les retrouve devant leur voiture sur le parking qu'on longe à l'opposé du parcours.

Peu de temps après je tombe le t-shirt, ça fait longtemps que j'en avais envie, mais on est pas exactement aussi tranquille qu'en montagne ici :-) Puis j'ai vu un gars avec une perruque et torse nu, en fait c'est Christian qui non content de finir 15e avec 203 km, a passé toute la course à alterner les déguisements.





Une autre fille court aussi en brassière, du coup j'ose en faire autant, sans la perruque. Le souffle du vent fait un bien fou. Jeannick me dit qu'elle aimerait bien aussi tomber le t-shirt mais elle ferait fuir tout le monde, alors que moi au contraire je leur donne tous envie de venir. Manu au contraire m'envoie un message moqueur :-p Je sais pas mais j'ai trop chaud, alors je m'en fous.

Mon équipe me livre à manger depuis le ravito de l'organisation, sans même que j'aie à demander. J'essaye quelques tucs avec du fromage histoire de refaire les stocks de sel, quand je sens les contractures monter. Plus tard des tranches de banane (non épluchées). 

Karl et Fabrice courent toujours en binôme, le speaker note que c'est bien de courir en groupe, ils se motivent.

16h, H+5 - 90e avec 44.6km, 1eH 59km, 1eF 51km (34e)
L'organisation a mis en place une PAC-aux-lettres, une gigantesque boîte aux lettres avec un casier par numéro de dossards, et une page sur le site de la course où les supporters peuvent envoyer des messages.

Des bénévoles se chargent ensuite de les imprimer et de les livrer dans la PAC-aux-lettres. Et plus tard des gamins à rollers se chargent même de livrer les messages de la PAC-aux-lettres directement à la table de ravito de chaque coureur ! Après avoir longtemps guetté la boîte vide, je reçois mon premier message de la part de Maeva, la femme d'une bénévole avec qui j'ai diné la veille. Super sympa, ça fait plaisir d'avoir enfin un message de soutien ! Je prends aussi le temps de répondre au SMS de Mika pour lui dire de passer lui aussi plutôt par la boîte aux lettres.
Premiers moments de lassitude après l'atteinte du premier objectif, premier marathon (sur 4 ou 5...) en un peu plus de 4h. Du coup je demande à Vic de me préparer mon ipod pour le prochain tour, et notre voisin se moque de moi style "tu peux pas le chercher toi-même, fainéante" :) (il m'avait prévenue qu'il allait me traiter de fainéante, avant la course, quand j'avais installé mon barda à côté de lui). La playlist sur l'ipod touch est assez réduite et tournera vite en boucle, mais ça redonnera quand même un coup de boost.

17h, H+6 - 84e avec 53.7km, 1eH 71.9km, 1eF 61.8km (23e)
Je tourne un peu avec François. Des gamins continuent à tourner en trottinette le long de la piste cyclable et du parking, ils vont faire un 24h aussi si ça continue (mais la version pour enfants, "avec un circuit plus court parce que c'est pour les enfants" ^^). Oui, plus le temps passe et moins il en faut pour nous faire rigoler.

 Christian continue de changer régulièrement de déguisement.

Je finis par remettre mon t-shirt quand le vent se lève de plus en plus et rafraîchit l'atmosphère. Sans même m'arrêter, attrapé au vol et remis. Un Benoit me demandait à chaque fois qu'il me passait (2 fois) si j'avais pas froid... non, vraiment pas, et je suis pas la seule...

Juste quand je commençais à me poser la question, on nous annonce au micro que le Stade Toulousain a perdu au Munster, j'ai à peine fait gaffe au speaker, mais mon compagnon de course du moment me répète l'info (vu que j'en avais parlé avant, j'espérais bien avoir des infos sur le match en direct). Zut... Décidément y a une malédiction du rugby les jours de 24 heures... (cf France-Tonga avant celui de Grenoble en 2011).


18h, H+7 - 80e avec 61.8km, 1eH 83km, 1e F 70.9km (21e)
J'ai dépassé les 60 km, je commence à avoir du mal et j'attends mon massage des 77km avec impatience, tout comme Cédric et François qui attendent le leur aux 50 km. Devant certains craquent aussi. Pascale Bouly qui menait la course chez les filles depuis plusieurs heures est bloquée à 63km depuis 1 heure.

Je commence à demander mon classement à Vic pour me motiver : 13e femme et 5e senior, je sais pas si je suis pas plus déçue que remotivée :) mais ça va sûrement remonter dans la nuit, le moment où si tu ne craques pas de sommeil, tu peux gagner plein de places. Il faut savoir partir lentement sans s'inquiéter. La plupart des coureurs partent trop vite. On part toujours trop vite pour 24 heures, c'est difficile de gérer dès le début, d'imaginer ce qui nous attend et de partir sur un rythme qu'on pourra maintenant tout ce temps sans faiblir. Au début il nous semble tellement trop lent, et à la fin tellement trop rapide... ça demande de l'expérience de savoir partir lentement et de laisser le temps faire son oeuvre sur ceux qui sont partis plus vite. Les premiers seront les derniers. D'ailleurs, peut-être fruit de ma longue expérience de 3 participations aux 24h de Grenoble, je suis partie plutôt plus lentement que d'habitude.

Mais j'ai maintenant l'impression d'être en panne d'énergie, je n'ai rien mangé depuis un bail, pris une fois des tucs au fromage au ravito, et essayé le pain de poisson mais ça ne passe pas (trop sec). Mais rien ne me tente au ravito... je leur demande ce qu'ils ont et finit par leur commander une soupe, qu'ils préparent pour le prochain tour, puis je demande à Vic de me la récupérer là-bas.

Bien plus tard François me dit que les bénévoles m'avaient appelée "Carole ta soupe" mais j'avais rien entendu, et entre temps j'avais reçu celle livrée par Vic en croyant que c'était la même... En plus la soupe était quasi solide comme de la purée, je ne réussis pas à la boire... finalement c'est le bouillon de vermicelles qui me sauvera.

19h, H+8 - 76e avec 69km, 1eH 93km, 1eF 80km (16e et 17e)
En perte de vitesse, je guette les messages dans la boîte aux lettres pour me remotiver. Autour de moi j'en entends plusieurs qui disent qu'ils "ne font pas toute la course", Cécile par exemple. Je ne sais pas pourquoi... Peut-être que l'équipe de France s'économise pour une autre épreuve, mais il me semblait que le championnat du monde ou d'Europe (?) prévu bientôt venait d'être annulé. Enfin du coup ils courent plus vite que nous...
Dans la soirée une ambulance dans le coin opposé du parcours, puis 2 gars qui courent pour nous faire nous rabattre sur la droite le long de la haie pour lui laisser le passage. On espère que c'est pas trop grave... Et on court, encore et toujours, autour de ce stade de rugby sous le soleil déclinant du soir.

20h, H+9 - 71e avec 78km, 1eH 104km, 1eF 90km (16e et 17e)
Vers 20h ça y est j'atteins mon objectif intermédiaire des 77 km, je m'étais fait réserver le kiné un peu à l'avance pour éviter la queue, mais finalement je n'ai plus tellement envie de m'arrêter tout de suite, plutôt profiter du soleil avant qu'il se couche (à 20h23), et terminer 84 km soit 2 marathons avant de m'arrêter.

Mais trop tard pour changer d'avis, Vic est déjà parti le réserver. Dans les dernières lumières du soir, je passe Cédric et François qui marchent, qui me disent qu'ils y vont maintenant.

Du coup j'y vais aussi, mais comme on me dit 5 mn d'attente, je fais un 78e tour et revient juste à temps. J'arrive finalement en même temps que Cédric et François mais repars avant eux. 

Après une demi-heure de pause, je repars du kiné requinquée, avec mon thermals Mizuno à la place du t-shirt, toujours en short, et j'ai vite bien chaud, même si la nuit est maintenant complètement tombée.

21h, H+10 - 74e avec 83km - 1eH 115km, 1eF 100km (12e et 15e)
Pour la première fois de la course j'ai perdu des places au classement, il faut dire que je n'ai couru qu'une demi-heure et 5km sur la dernière heure. Mais j'en ai profité pour me refaire une santé. Alors est-ce qu'il valait mieux faire une pause plus courte et marcher pour me refaire, ou faire une pause plus longue pour ensuite courir plus vite pour rattraper le temps "perdu" ? Je pense qu'une vraie petite coupure fait du bien non seulement aux jambes mais aussi au mental un peu lassé de tourner en rond.

Mon GPS a buggé pendant que j'étais dans le bâtiment. Peu de temps après en être sortie je suis toute contente d'annoncer à ma table que j'ai déjà fait 10 tours depuis la sortie du kiné (d'après ma montre), mais au tour suivant le tableau d'affichage m'annonce que pas du tout, seulement 6 tours... Big stress, est-ce qu'ils m'ont oublié des tours ? Mais non, il est 21h15, environ 45 mn pour 6 tours c'est tout à fait plausible, je suis rassurée, c'est ma montre qui déconne et pas le chrono officiel.

A l'arrière du parcours il commence à y avoir du monde au bar rugby, et une désagréable odeur de friture en monte qui me retourne l'estomac... Après des heures à ne faire quasi que courir, je commence enfin à marcher de temps en temps à l'arrière du parcours. En même temps je crains de tomber sur mes supporters qui me verraient marcher :-) pas envie de les décevoir. Mais ça fait du bien d'alterner un peu et de faire travailler les muscles différemment.

22h, H+11 - 67e avec 91km, 1eH 125km, 1eF 108km (11e et 12e)
Les crêpes cuisinées par une bénévole bretonne, annoncées pour 22h, sont en retard. Je les attend avec impatience : un peu de nouveauté dans ce monde de tucs et d'abricots secs, ça fera pas de mal ! Je prends un doliprane contre les douleurs, pour la première fois en course. Est-ce que ça tient du dopage? Je suis pas fière mais bon, tout le monde a l'air de le faire...

Nos voisins de table s'en vont, Martine (219) vient d'abandonner, son mari dit qu'il regardera mes résultats pendant la nuit. Plus tard c'est Marianne Chopard (qui est à la table en face pour soutenir Florence Gay, dossard 206) qui vient discuter.

Mon rythme s'est (enfin) ralenti du fait de l'alternance marche/course. Mon nouvel objectif du moment, je vise les 100km peu après 23h soit 12h de course. Je me mélange entre les 2 affichages, celui de l'heure du jour (ou de la nuit), et celui du temps de course, j'ai plus les idées très claires... Du coup à Cédric et François j'avais dit que j'atteindrais le 100km sans doute entre minuit et 1h du mat, 1 heure de décalage... 

Un arrêt toilettes et tartinage de Nok pour remédier à des échauffements douloureux. Puis une partie de mon équipe de soutien commence à tomber de sommeil et va se coucher dans leur tente, il ne reste que Vic qui bouquine en écoutant de la musique, et est aux petits soins pour moi en même temps ;-)

23h, H+12 - 62e avec 98km, 1eH 134.7km, 1eF 117.5 (9e)
Voilà la moitié de la course (en temps). Devant chez les filles, Sandrine Gard a maintenant pris un peu d'avance sur Nathalie Zimmer, longtemps au coude à coude. Toutes les 2 ont dépassé les 115km ! Christian Dilmi lui est toujours seul en tête et agrandit son avance. Piero est 8e avec 121km.

Je suis bien loin derrière, à 23h15 je passe les 100km, la moitié du temps imparti, le jour où ça sera aussi la moitié de ma distance finale je serai contente ! Un objectif peut-être réalisable un jour, avec encore pas mal d'entraînement d'abord. Je vais m'assoir un peu à ma table avec Vic pour fêter ça, je me donne jusqu'à 23h30, et j'en profite pour envoyer des SMS et autres messages sur facebook pour tenir au courant les supporters à distance comme Manu. Je mange aussi un peu de purée, à défaut de crêpes, et ai droit à un petit massage rapide des jambes au baume du tigre. L'équipe de soutien est à nouveau au complet, réveillée de nous entendre rigoler.

Minuit, H+13 - 57e avec 103km, 1eH 144km, 1eF 126km (9e)
Les crêpes arrivent enfin, mais il me faudra 2 fois 2 tours à plusieurs tours d'intervalle pour réussir à manger ma crêpe au sucre presque en entier. Une 2e crêpe à la confiture arrive, commandée avant qu'il n'y en ait plus, mais je croque une seule fois dedans, plus rien ne passe. Plus tu aurais besoin de manger et moins tu peux manger, logique non ? En même temps le corps ne peut assimiler qu'un nombre limité de calories en un temps donné, et à courir sans discontinuer pendant 24 heures on se met forcément dans le rouge...

1h, H+14 - 51e avec 111km, 1eH 154km, 1eF 135km (9e)
On est au plus fort de la nuit, le moment creux où tout le monde semble succomber au sommeil les uns après les autres. Le circuit se fait moins fréquenté. Un coureur s'est endormi dans l'arrêt de bus, je le signale aux bénévoles qui vont s'assurer que tout va bien. Au tour suivant il n'y est plus.

Mais de mon côté je n'ai pas du tout de somnolence, contrairement à mon habitude, j'ai plutôt la forme, c'est génial et j'en profite. J'ai couru 8km entre minuit et 1h du mat', un bon rythme. Je me fais quand même 3 isostar à la caféine goût fraise grenadine dans la nuit, ça a dû aider, mais sans doute pas autant que d'arriver sans dette de sommeil, après une vraie semaine de récupération (méritée après l'Ecotrail), pas comme à Grenoble en 2013 où j'étais arrivée épuisée d'un mois de boulot intensif et de nuits trop courtes. Du coup comme prévu c'est pendant la nuit que je peux remonter des places.

2h, H+15 - 46e avec 118km - 1eH 164km, 1eF 143.8km (8e)
Et encore 7km de plus en 1 heure. Je recommence à avoir faim, une envie de purée, mais ils l'ont jetée car elle était froide, du coup on va m'en chercher un autre bol, annoncé comme le dernier, lucky. Elle est bien chaude, nickel, ça fait du bien. Il ne fait plus si chaud dehors, comme je cours encore à bonne allure je n'ai pas froid du tout mais tous les supporters derrière leurs tables ont sorti les vestes. Je mange un peu de ma purée en demandant de ne surtout pas la jeter même froide, au cas où.

Puis c'est au tour de Vic d'aller se coucher, à un moment où je commence moi aussi à être moins en forme, et où j'attend de nouveau avec impatience mon prochain massage (prévu après 123km à 2h34). J'aurais dû tomber pile dessus, sauf que le kiné se libère un tour trop tôt, 122km à 2h27, alors que je fais du 7mn par tour, si ça c'est pas de la précision suisse :) Alors comme il est libre maintenant je fais la pause tout de suite.

Mais cette fois j'ai l'impression que le kiné me fait du mal... c'est le même jeune que tout à l'heure. il mobilise mon genou droit qui craque et fait vraiment mal... Je ressors du kiné, marche un peu pour me relancer, et repars en courant. 

3h, H+16 - 49e avec 123.6km - 1eH 174km, 1eF 151.9km (9e)
Je termine l'heure avec seulement 5km de plus au compteur, après la pause kiné, du coup j'ai reperdu 3 places. Devant les meilleurs ne ralentissent pas, ou à peine. Piero est 5e à 159km. Sandrine Gard a maintenant 6km d'avance sur Nathalie Zimmer.

Il n'y a plus grand monde sur le circuit. On voit beaucoup les mêmes prénoms, il doit y avoir au moins 3 Chantal (4), plein de Christian (10 !), des Patrick (5), 4 Laurent, 4 Philippe, 2 Martine (toutes les 2 ont abandonné), 2 Nathalie (plus la femme de Piero), mais je suis la seule Carole. Je commence à encourager Don le texan, "looking good", qui me retourne le compliment "you look happy", "hey I'm running" je réponds :) puis je continue à l'encourager régulièrement avec sa coéquipière Sara. C'est vrai, on est là à faire ce qu'on aime, courir, on n'a rien d'autre à faire ou à penser que courir, boire, manger, que demander de plus ? En plus j'aime beaucoup courir la nuit, dans cette ambiance particulière. Avec cet état d'esprit positif, j'avale 7km de plus dans cette 17e heure, à peine moins que les 8km de la 1e femme, mais cumulé sur 24 heures, ça s'additionne vite...

Un moment que j'ai pas vu Piero me doubler, peut-être qu'on tourne à peu près au même rythme, c'est facile d'être relativement synchronisé et du coup ne pas se voir pendant plusieurs tours... En tous cas je vois toujours Nathalie qui l'attend, donc il doit tourner aussi. 

4h, H+17 - 41e avec 130.7km, 1eH 183km, 1eF 160km (8e)
4h du matin, pendant que certains dorment, je remonte, on m'annonce 7e femme et 3e senior, trop bon ! :-D
Je reçois encore des messages d'encouragement, par exemple Vincent de Toulouse que je n'ai pas vu depuis des années, ça fait plaisir. Je reçois même un message de Daniel, le speaker des 24h de Grenoble ! Merci Daniel ! :-)

Tous ces messages font d'autant plus de bien que je commence à vraiment souffrir. J'attaque mon 3e isostar caféiné, à petites gorgées réparties sur plusieurs tours. Mon genou droit est super douloureux, ça devient dur de courir. J'avale un 2e doliprane, après avoir réfléchi que le précédent date d'il y a suffisamment longtemps (il ne faudrait pas que ça me file mal au ventre non plus...).

On est en plein coeur de la nuit, le moment où il y a sans doute le moins de monde sur le parcours. C'est le moment où ça y est, on a assez vu la nuit, on aimerait bien qu'elle se termine. On sent que le jour n'est plus très loin mais pas encore très proche non plus. On commence à compter les heures à rebours vers la fin. Quelques coureurs tournent encore, beaucoup ont succombé au sommeil, à la fatigue, à la lassitude, au froid, à la nuit, à l'ennui, faites votre choix. Du coup il y a aussi d'autant moins d'équipes de soutien, ceux qui restent sont emmitouflés. Mais du côté du PAC c'est toujours l'effervescence, les bénévoles sont aux petits soins pour nous, nettoient les toilettes, nous préparent à manger et à boire, nous encouragent, toujours aussi bien réveillés et motivés !

5h, H+18 - 40e avec 135.7km, 1eH 192km, 1eF 167 (7e)
Vers 5h je n'en peux plus, je m'écroule la tête dans les mains sur la table du ravito, je ne sais pas quoi manger, les bénévoles sont aux petits soins. Je leur dit que j'ai la tête qui tourne, ils me proposent une chaise pour m'assoir, j'ai à peine le temps de dire non que je suis déjà assise (ou plutôt tombée) dessus :-) je finis par manger de la compote et repartir péniblement, le genou vraiment très douloureux. J'en suis à 135km, il m'en reste encore 45 à faire en 6h pour atteindre mon objectif de 180km (message de David qui lui courra les 24h de Saint-Fons dans 15 jours avec le même objectif, cf son CR), mais je n'ai fait que 5km dans la dernière heure, et je me dis que c'est impossible, que jamais je peux souffler, que c'est trop dur... J'attendais juste le moment où je pourrais me dire "c'est bon, maintenant même en marchant tu vas atteindre les 180km" mais je me rends compte maintenant que ce moment ne viendrait pas, qu'il faudrait se battre jusqu'au bout des 24h. Mais comment, avec un genou dans cet état ? impossible... Et commencer à avoir des pensées négatives, c'est une très mauvaise idée...

Après quelques tours dans cet état, les bénévoles me disent que ça fait un moment que ça ne va pas, je devrais aller voir les kinés/médecins. Je ne réfléchis même pas (alors que je venais de dire à ma table que je n'avais pas le temps de m'arrêter) et j'y vais direct. Erreur fatale. Je m'écroule sur la table du kiné, il touche un peu mon genou, je suis en larmes tellement j'ai mal, il me met une poche de glace, me demande si je veux repartir ou pas, j'en sais rien, je tombe, on me file une couverture de survie, je comate, je sais pas si je m'endors... mes supporters passent au bout d'un moment, puis m'apportent mon téléphone et chargeur de montre et polaire (j'ai trop froid), je poste sur facebook que ça va plus du tout. J'en suis à attendre le jour pour me motiver... je tremble de froid...

6h, H+19 - 43e avec 138.8km, 1eH 202km, 1eF 176km (7e)
Je suis toujours sur la table du kiné, toujours emmitouflée dans les couvertures, le compteur bloqué là où il était à 5h26 la dernière fois que j'ai passé le chrono. Puis je me rappelle que je m'étais promis de ne rien regretter, je me rappelle mon classement, je me rappelle que c'est le championnat de France là dehors qui continue sans moi pendant que je suis là comme une loque, et je décide de repartir. Je demande d'abord qu'on me réveille pour 7h, puis finalement je me lève avant, me rhabille avec un T-shirt en coton Akileine offert par le kiné (pour que je puisse me changer) + ma polaire + un gros k-way prêté (le mien est tout humide juste de la rosée du matin), et ressors juste avant 7h.

7h, H+20 - 53e avec 138.8km, 1eH 211km, 1eF 183km (7e)
Mon compteur est resté bloqué pendant plus d'1h30, pendant que les premiers continuaient à tourner sans cesse, et que les autres se réveillaient les uns après les autres pour rejoindre le circuit. Résultat j'ai perdu 10 places.

Enfin, je repars. Avant de m'en rendre compte je suis de nouveau dehors, en marchant vite, au téléphone avec Mika. Je me fais engueuler par un juge arbitre au niveau des pavés parce que mon dossard est caché par le k-way trop grand ("je le redirai pas" d'un ton pas très gentil...). M'en fous je suis même pas sur le championnat... Au bout de d'1 tour et demi comme ça je laisse Mika, rend le téléphone à ma table, au tour suivant je rend aussi le k-way et me remet dans la course. Il fait jour, ça motive d'autant plus. 

Il y a de nouveau plein de monde sur le circuit, ça c'est moins cool (j'aimais bien l'ambiance nocturne, l'impression d'être presque seule au monde, à tourner encore et encore pendant que le monde entier dort). Mais bon, j'avais qu'à pas perdre autant de temps chez les kinés... Après un peu de temps en polaire j'ai trop chaud et l'enlève aussi, ainsi que le bonnet dans la poche. Tout le monde est très couvert mais je me réchauffe c'est bon signe, je retrouve la pêche. A ce rythme je réussis à aligner 8km en 1 heure ! C'est reparti ! Un bénévole me fait remarquer que j'ai piqué le T-shirt des kinés :)

8h, H+21, ou H-3 - 48e avec 147km - 1eH 221km, 1eF 192km (7e)
Après quelques tours dans le t-shirt en coton ça commence à chauffer sous les bras, en arrivant à ma table je l'enlève et attrape à la volée mon t-shirt bleu que j'avais demandé au tour d'avant, et je l'enfile sans même m'arrêter, je cours pour l'instant mais la transition marche-course est une torture alors je ne peux pas m'arrêter.
D'ailleurs pour le ravito ça devient difficile. Je tourne aux compotes, attrapées à la volée à ma table, livrées là par mon équipe, et toujours la boisson overstims par petites gorgées en alternance avec eau gazeuse (jusqu'à tomber en panne). J'ajoute encore 7km à mon compteur. Devant la 1e fille accélère, ça sent la fin !

J'ai un premier "second souffle", je cours grâce à ma musique, je passe 3 fois de suite l'Envie de Johnny avec le volume poussé à fond. Je me mets à chanter à voix haute, un coureur me dit que j'ai raison, il ne risque pas de pleuvoir, je peux me lâcher :-) Mais on est encore loin de la fin et je finis par craquer de nouveau à cause de la douleur, et ralentir / marcher. C'est devenu impossible d'atteindre mon objectif des 180km alors je me rabats sur 170km. Je suis à peu près sûre de dépasser mon record à 167km, mais 170 km est un objectif motivant et pas évident à atteindre, il va falloir se battre jusqu'au bout (et je compte beaucoup sur ma capacité à sortir un beau sprint final). Un autre objectif est de rattraper la senior devant moi pour finir en tête de l'open, je demande des infos à Mickael, qui m'envoie un message pour me dire qu'elle est 7 tours et quelques devant moi au pointage de 8h.

9h, H+22, H-2 - 47e avec 154km, 1eH 230km, 1eF 200km (7e)
Torture, torture. Sans doute à force de compenser pour le genou droit, c'est maintenant le dessus du pied gauche qui fait vraiment mal et me gêne plus que le genou.
En même temps je commence à avoir des encouragements de presque toutes les tables du couloir de ravito perso, déjà Nathalie au début,

rejointe par Yves un autre Grenoblois (que j'étais joyeusement surprise de trouver là),
puis ma table et celle de Marianne qui soutient Florence juste en face, et plein d'autres que je ne connais même pas. Du coup je cours encore, ou alors je marche vite... 

Au passage du ravito de l'organisation, tous les bénévoles s'y mettent pour m'encourager, le speaker "est-ce qu'on arrive à faire courir Carole?", des dizaines de schtroumpfs rouges des 2 côtés qui m'encouragent, et miracle, je cours, je pleure mais je cours. A partir de là je mets un point d'honneur à reprendre la course au début de la piste cyclable et à arriver dans la zone en courant. On y est accueillis comme des stars, et on leur doit bien toute l'énergie qu'on est encore capables de donner.
J'essaye ensuite de maintenir la course jusqu'à ma table soit au total une moitié de tour en courant, avant de finir le tour en marchant. Je me crie dessus pour me pousser à avancer, à courir encore, chaque transition est difficile.

Un petit moment en marchant avec Patrick, toujours avec son attelle, et je me dis que je ne devrais vraiment pas me plaindre, il m'encourage, et je repars.

Cédric est blessé mais François tourne bien, il m'entraîne de temps en temps avec lui, je lui explique qu'il me faut 2-3 tours pour passer de marcher à courir et que mes muscles se réhabituent à la douleur, il trouve que ça fait beaucoup. Il m'attend sur un tour complet puis s'arrête au ravito et je repasse à la marche. Malgré tout je termine cette 23e heure avec 8km de plus.

10h, H+23, H-1 - 44e avec 162km - 1eH 240km, 1eF 208.7km (8e)
On attaque la dernière heure. Bientôt mon record. Je force aussi pour essayer de rattraper la senior devant moi, Laure (n°519), je l'ai doublée plusieurs fois déjà, elle marche, et ça me motive, il faut bien s'accrocher à quelque chose. Elle avait 7 ou 8 tours d'avance à 7h quand je suis repartie, maintenant je ne sais pas, je suis dans le flou total (elle aura finalement à peine 600m d'avance quand la course s'est terminée...).

A 164km un peu avant 10h20 du matin je met au point ma stratégie de fin de course : je décide d'y aller "tranquille" (en m'autorisant à marcher la moitié du tour, tours en 8'30 environ) jusqu'à mon record à 167 km, puis de courir la toute fin à fond pour essayer d'accrocher le 170, d'après mes calculs il me restera 20mn pour faire 3 tours, pas sûre que ce soit possible. 

Puis je passe mon record, fais une dernière micro-pause, finis le verre d'isostar, dis à Vic que je ne m'arrête plus c'est plus la peine d'en refaire. Je lis mes derniers messages, me mets un coup de pied au cul, et accélère. Je repasse en foulée avant-pied, ça change les muscles utilisés c'est pas mal en fait, je suis transcendée par l'ambiance, je ne cours plus je vole.

Les bénévoles mettent une telle ambiance de folie que j'accélère au-delà de mes espérances et de mes limites, et finis en sprintant vraiment, je survole les 2 derniers tours.

Je dois m'arrêter pour récupérer mon témoin à 169km, il y a toujours foule dans la zone, une haie d'honneur de bénévoles PAC en rouge de plus en plus nombreux, mais d'autres bénévoles se placent un peu partout sur le parcours, j'entends le juge arbitre leur dire qu'ils doivent être en vue les uns des autres.

Je passe une bénévole au niveau du portail d'entrée sur le stade, je lui demande "3mn?" en espérant finir pile sur le tapis rouge, elle me dit qu'il reste 5mn, c'est plus qu'il ne m'en faut pour finir le tour, je voudrais que ce soit moins pour pouvoir m'écrouler sur le tapis rouge des chronos, mais je repasse à fond par la ola / haie d'honneur à 170 km avec encore 3mn à tirer ! 

Portail, arche jaune, couloir, ma table, je réussis encore à dépasser le couloir des ravitos persos (les Champs Elysées ^^) , coup de pistolet, je comprends pas je m'arrête en fait il reste 1mn, Vic me fait des grands signes, je repars j'en peux plus à bout de souffle, je dépasse encore les toilettes, les pavés, et je vais m'écrouler sur le bitume à la marque des 550m, à 100m de l'arrêt de bus marqué 650m où j'avais eu la vision que j'allais terminer cette course depuis le tout début.

11h, Heure H - 41e avec 170.66 km - 1eH 250.47km, 1eF 218.47km (8e)
C'est fini. Je m'allonge, ou plutôt je m'écroule par terre de tout mon long, et y pose mon bâton. Vic est sur moi dans la seconde, il me suivait en courant. 

Les bénévoles du PAC sont disséminés sur tout le parcours pour mesurer les distances de chacun, qui seront affichées bientôt. En attendant, il faudrait penser à pas rester couchée par terre éternellement, ou je vais finir par tomber dans les pommes sur place. J'ai tellement de mal à me lever que les secouristes compatissants viendront me chercher sur une chaise roulante pour me rapatrier à l'autre bout du circuit. La prochaine fois, faut vraiment que je calcule mon coup pour m'écrouler sur le tapis rouge, ça me fera moins loin :-) Je mange un peu, passage chez les kinés, sieste sur les tatamis en attendant les podiums. 

Résultat
J'ai couru un total de 170,66272 km, c'est d'une précision redoutable. 170 kilomètres, 662 mètres, et 72 centimètres. Je suis finalement 41e au scratch, 9e femme, dont 7 faisaient le championnat de France, donc 2e de l'open, 600m derrière Laure que j'ai bien failli rattraper, ça m'apprendra à dormir comme une loque au lieu d'avancer :-) Chez les senior je suis 4e, Laure 3e, la 1e a 190km au compteur, y a du boulot ! Piero lui finit 3e du championnat de France avec plus de 238 km, bravo !! Tous les résultats ici ou , et des milliards de photos par .

Et après ça...
Et bien j'ai passé le reste de la journée à boiter et me traîner comme je pouvais, le lendemain train pour rentrer à Grenoble en pestant contre les gens qui s'entassent sur les escalators alors qu'ils ont le choix, eux... J'ai mis 2-3 jours pour me remettre à marcher normalement, puis à courir, et le dimanche qui suivait c'était reparti pour le Lyon Urban Trail, quelle idée de me laisser entraîner par les potes... mais quand on aime... ;-)