jeudi 30 avril 2015

24 heures du Confluent 2015 - partie 2

Début du récit

22h - 90.2km, 4e femme, 23e scratch
Classement femmes : 1) Nadine 99.4km, 2) Nathalie 97.3km, 3) Laure 93.3km, 4) Carole 90.2km, 5) Sylvie 85.2, 6) Sandrine 84.2km, 7) Claire 84.2km, 8) Mimi 80.1km

Christian doit arrêter le micro et la musique pour la nuit, et avec le silence qui s'installe on commence à vraiment sentir la nuit et le calme sur le parcours. Il y a de moins en moins de supporters, mais les bénévoles sont toujours au taquet à tous les postes. Merci en particulier à David qui me tient informée sur l'avancée de Piero aux mondiaux de Turin.

Le PAC, toujours prêt
On n'a plus le droit à la musique et au micro pendant la nuit, mais les supporters et joueurs du match qui vient de se terminer continuent à chanter une bonne partie de la nuit dans le bar en bord de terrain. On dirait que c'est l'équipe locale qui a gagné. Même mon équipe de soutien commence à fatiguer. Il faut dire qu'ils ont dormi 3h avant de venir ce matin... Mais ils veillent toujours.
Vic parti chercher du ravito, Igor veille

Les coureurs eux continuent à avancer tranquillement, beaucoup marchent, même en tête de course.
Nathalie, 2e femme, marche avec Christian
Nadine, 1e femme

























Moi aussi j'ai un passage à vide je marche un peu pour récupérer, mais au moins je n'ai même pas sommeil (ça c'est cool) du coup je n'ai pas encore pris de shot de caféine, en fait j'ai eu peur du contre-coup post boost et que ça fasse l'effet inverse. Plus tard on a droit à des crêpes au miel, Victor m'en livre 2 (il n'aura pas dormi longtemps !). En fait c'est plutôt du miel à la crêpe ! :-) Je pars avec une seule crêpe, l'essore et l'essuie sur l'assiette pour pouvoir la manger, mais ça fait du bien. Je ne prendrai la 2e que bien plus tard, mais tellement sucrée que je n'arriverai pas à la finir et la laisserai dans une poubelle...


Je commence à me dire que ça me ferait du bien de discuter un peu pour ne pas m'endormir, quand Jean-Marc me double en me disant "tu me diras quand ça ira mieux je t'emmènerai un peu", du coup je lui emboîte le pas aussitôt, il ralentit un peu pour se mettre à mon rythme et on fait 1 tour ensemble, avec un arrêt au ravito pour une soupe, puis un 2e tour encore avant de se séparer, je m'arrête à nouveau au ravito puis repars plus lentement et il accélère à nouveau, ça m'a fait du bien de discuter un peu ! J'ai fait une grande partie de la course toute seule dans ma bulle. Mes supporters français dorment, mais des messages commencent à arriver depuis l'Australie qui se réveille déjà dimanche matin.


23h - mi-course, 97.3km, 4e femme et 21e scratch
Classement femmes

A 23h je n'ai fait "que" 97km, même pas la moitié des 200km, bon là c'est officiellement mort. J'ai adopté un rythme marche-course, sur chaque tour je marche la portion cabossée de l'entrée du stade, c'est plus malin que de marcher le long du parking de camping car sur un bitume parfait comme je faisais plus tôt dans la soirée quand j'avais commencé à fatiguer (parce qu'à l'arrière du parcours il y avait moins de supporters, on était cachés pour marcher ^^). Puis je reprends la course soit dans le stade, soit au bout de la ligne après le ravito perso, soit quand quelqu'un me double et me donne une leçon de courage. A ce stade, tout le monde a mal, mais ce n'est pas pour ça qu'il faut arrêter de courir. Nathalie me passe et je l'encourage, et elle-même me félicite aussi, wow, de la part d'une coureuse de l'équipe de France ça me touche encore plus :-)



Puis après une soirée de galère, avec la fraîcheur et le calme de la nuit, ou bien à l'approche des 100km, je me sens super bien, regain d'énergie, second souffle, j'accélère et je double à gogo. Il m'arrive même de doubler Fabrice, le 1e homme, membre de l'équipe de France, quand il ralentit un peu. On s'encourage en passant.

Mes 2 supporters m'attendaient pour me masser mais je fais 3 tours de plus avant de m'arrêter pour un massage, re-pommadage des pieds, update facebook...


Nadine est arrêtée en même temps que moi pendant que les 2 me massent à 100km, elle me dit qu'elle a les pieds qui chauffent, mais pas du tout mal aux jambes. Mais comment fait-elle ? Elle a sûrement encore beaucoup plus d'entraînement que moi, déjà... Et des années d'expérience aussi.



Plus tard alors qu'on court ensemble, elle me raconte qu'elle fait beaucoup de courses des 6h comme entraînement pour faire du long intensif. Je note !

Minuit, 104.4km, 2e femme, 18e scratch, 8km de retard
Classement femmes : 1)Nadine 112.5km, 2)Carole 104.4km, 3)Nathalie 103.4km, 4)Laure 100.4km, 5)Sylvie 95.3, 6)Claire 94.3, 7)Sandrine 93.3, 8)Mimi 92.3

Je continue à tourner, ça va mieux maintenant qu'il fait frais, et puis j'aime bien l'ambiance plus calme la nuit. Je suis tranquille pour chanter ;-) Puis d'un coup alors que je passe à ma table, Vic me dit que je suis passée 2e. "Pas possible" je lui réponds, je le crois même pas. Mais du coup à la fin du tour je demande quand même à tout hasard ma position aux PAC-magiciens du chrono, et ils me disent 2e aussi :-o  Je leur demande où est la 3e et ils me disent que ce n'est plus Laure mais Sylvie et qu'elle est loin derrière. Quand j'en discute avec un autre coureur un peu plus loin, il m'explique qu'en fait Nathalie a arrêté. Zut, je lui demande si elle s'est fait mal mais non, ouf, par contre sans doute souffert de la chaleur. Pendant ce temps à Turin plusieurs français abandonnent sur blessure aux mondiaux. Et Piero est en tête de l'open ! Nathalie Lattarico m'envoie des news via la PAC-aux-lettres, et David du PAC se démène pour suivre les news sur le site (sauf quand ils ont une panne de courant de 40 minutes et tournent à la frontale !) et sur facebook (pas de new de l'open sur le site de la course), et me donner des infos quand il me voit passer !
La buvette du PAC, de l'ambiance toute la nuit !
Donc me voilà 2e et presque assurée de faire un podium si je ne craque pas. La nouvelle me redonne un coup de boost (c'est plus confortable que de se battre pour la 3e place où là c'est du tout ou rien). Comme dit le coureur qui m'a expliqué que Nathalie a arrêté "le malheur des uns fait le bonheur des autres". Même si je ne peux pas me réjouir qu'elle abandonne, ça me donne une chance unique d'aller chercher un podium. Plus loin 2 autres coureurs me disant que Nadine aussi n'est pas bien, mais je l'ai vu tourner comme un avion ! :-) Donc je tourne de mieux en mieux, alors que mon équipe tombe finalement de sommeil après une très courte nuit hier, et prennent des tours pour dormir un peu.
Les secouristes veillent au grain


1h du matin, 112.5 km, 2e femme, 15e scratch, 7km de retard
Classement femmes : 1) Nadine 119.6, 2) Carole 112.5, 3) Laure 104.4km, 4) Sylvie 101.4km, 6) Mimi 99.4km, Abandon de Nathalie

Nathalie qui s'est arrêtée est encore là dans sa tente en face de la mienne et m'encourage quand je passe (j'ai mis un moment à comprendre que c'était elle, je ne suis plus très lucide je suppose).

Tout le monde me demande si je n'ai pas froid ? mais pas du tout.

Vic me prépare le 1e shot de caféine, plus pour le sucre que pour la caféine à vrai dire, toujours pas fatiguée. Je me suis vite rendu compte qu'il suffisait de me remettre à courir pour faire passer tout début d'envie de dormir. Il reste peu de monde avec qui discuter sur le circuit, et je remonte au scratch sur ceux qui dorment.
Pascal guide un coureur malvoyant
Nadine et Fabrice courent toujours
Vic et Igor dorment à tour de rôle un peu roulés dans la couverture, sous la table, ou l'un sur l'épaule de l'autre sur leurs chaises (oubliées sur place après la course). Je les laisse un peu tranquilles et m'arrête plus souvent au ravito de l'orga pour avoir de la soupe bien chaude.
Henri et les bénévoles du ravito
2h du matin, 119.6km, 2e femme (7km de retard), 14e scratch
Classement femmes : 1) Nadine 126.7km (7km dans l'heure), 2) Carole 119.6 (7km dans l'heure), 3) Sylvie 106.5km (5km en 1h), 4) Mimi 105.4km (6km en 1h), 5) Laure 104.4km (0km en 1h)

Peu de souvenirs, je tourne et tourne toujours...

Nadine tourne à la même vitesse que moi

A part ça le circuit est plutôt désert.

Ceux qui restent sont de plus en plus couverts, mais je n'ai toujours pas froid. Courir ça réchauffe.


3h du matin, 127.8km, 2e femme (6km de retard), 13e scratch
Classemt femmes: 1)Nadine 133.8km (+7), 2)Carole 127.8km (+8), 3)Sylvie 111.5km (+5), 4)Mimi 111.5km (+6)

Victor dort et c'est Igor qui s'occupe de mon ravito. Je tourne toujours en rond en mode automatique, l'impression que ces quelques heures de nuit sont passées comme un rêve éveillé. Mais est-ce que j'étais bien réveillée ? Oui en fait pour une fois pas du tout de somnolence. Cela dit je demande quand même à Igor un 2e shot de caféine, il le cherche en s'excusant de me faire perdre du temps parce qu'il ne le trouve pas tout de suite... mon équipe est trop gentille avec moi ! Et je repars en buvant le liquide super sucré.
Mimi, ou l'autre remontée fantastique, accompagnée de Sandrine
Pendant ce temps au ravito... 
La rue qui mène à l'estrade et à la zone chronométrage

4h du matin, 134.9km, 2e femme (-6km), 12e scratch
Classemt femmes : 1) Nadine 140.9km (+7), 2) Carole 134.9 (+7), 3) Sylvie 117.6km (+6), 4) Mimi 117.6km (+6)

Après ces quelques heures rapides, je recommence à souffrir. Du coup je ralentis et je refroidis un peu. Mais surtout je me dis qu'il va faire de plus en plus froid jusqu'au lever du jour et que je ferais bien de me couvrir de suite. Je fais une petite pause stretch et demande aux garçons de me retrouver mon cycliste, le ravito est devenu un immense bordel, ça me stresse, on n'y retrouve plus rien, il y a un mélange de linge sale et propre sur une chaise avec des câbles pour charger montre et téléphone, la pommade jamais à portée de main, un bazar désorganisé :-) Mais on retrouve mon cycliste et je le met à la place de mon short un peu à cause du froid mais surtout dans l'espoir illusoire que la compression va faire du bien à mes quadris. Mais bon, le cycliste et la compression magique, forcément, ça marche pas du tout. Donc un peu plus tard j'attrape un paracétamol n°2 au vol avec de l'eau gazeuse, et je charge Vic de regarder l'heure (c'est comme ça que je sais qu'il était précisément 4h38, parce que même 2 jours plus tard en écrivant mon CR il pouvait encore me le dire... ^^) et de pas me laisser en prendre un autre avant au moins 2h de plus. Je n'ai AUCUNE idée de l'heure qu'il est à ce moment... Et c'est pas comme si j'avais une montre au poignet... Je crois que ça ne m'étais même pas venu à l'idée d'y regarder l'heure... :-) 

Je souffre et je marche de plus en plus souvent. A un moment je rattrape Florence en courant mais par contre en marchant je n'arrive plus à la suivre maintenant, comme je lui fais remarquer. Elle avance toujours à un bon rythme ! Mais elle me dit que je vais repartir, et oui, j'y arrive au bout d'un moment. Et de toutes façons je ne suis pas la seule à souffrir. Fabrice Puaud le premier, commence à souffrir lui aussi et à marcher, il m'arrive de le doubler, il m'encourage et me demande ma position, et si je suis loin de la 1e, mais j'avoue qu'à ce moment-là je n'en sais rien du tout, je sais juste que je suis 2e mais je suis incapable de lui répondre pour l'écart... Je suis vraiment en pilote automatique, je cours encore à 8 ou 9 à l'heure quand je cours, mais je m'arrête de plus en plus souvent quelques secondes au ravito, et marche à plusieurs endroits du parcours pour récupérer (les pavés en sortie de ravito, et le bitume cabossé en entrée de stade).


5h - 139.9km, 2e femme (-6km), 12e scratch
Classemt femmes : 1) Nadine 146km (+5), 2) Carole 139.9km (+5), 3) Sylvie 122.7km (+5), 4) Mimi 121.7km (+4)



Comme j'ai ralenti un peu, je me refroidis aussi plus et je finis par sortir la veste, les 2 garçons dorment, je l'attrape dans mon sac et repars sans les déranger, ils sont trop mignons ;-)

Mon ravito perso à droite, mon équipe dort

Je double et double et tourne toujours toute seule, le circuit est désert, presque plus de bénévoles en dehors du QG, plus de micro ni de musique depuis 22h (alors que les footeux étaient au bar presque toute la nuit). Du coup la nuit se fait longue, il serait vraiment temps que la course se termine. Je n'ai toujours pas sommeil heureusement mais je suis fatiguée, j'en ai marre. Je marche non plus une mais 2 portions du circuit, le passage cabossé dans l'entrée du stade, et les pavés en sortant des ravitos persos. Voire je ne me remets pas à courir pour les 300m qui séparent ces 2 passages difficiles... L'enchaînement course-marche est de plus en plus difficile et j'ai souvent besoin de motivation extérieure pour me remettre à courir, comme de voir passer Nadine, ou Fabrice, toujours en courant, alors qu'ils souffrent aussi. 
Nadine commence à souffrir du dos
A un moment je marche avec Marie la marcheuse le long de l'arrêt de bus, elle a très froid et je lui conseille de mettre un bonnet, puis je me relance en courant, et quand je la redouble au tour suivant elle a l'air un peu réchauffée.


6h - 147km, 2e femme (-5km), 12e scratch
Classement femmes: 1) Nadine 152.1 (+6), 2) Carole 147km (+7), 3) Sylvie 127.8km (+5), 4) Mimi 127.8km (+6)

Le matin est proche, de nouveaux fantômes se joignent à nous après s'être reposés une ou plusieurs heures pendant la nuit. L'estrade est toujours déserte.

Quelques centaines de mètres plus loin on entre sur le stade illuminé pour nous.

Puis on tourne dans l'allée des ravitaillements perso ou quelques courageux accompagnateurs veillent encore.

On en ressort sur des pavés le long du bloc des sanitaires.

Et on repart pour un nouveau tour, à droite par un chicane, puis sur la voie de bus fermée à la circulation pour nous, en longeant un arrêt de bus où certains s'arrêtent parfois sur le banc. A droite encore le long du parking des camping cars, une haie à notre droite nous cachant le stade. Et encore à droite pour revenir le long d'une rue de Portet vers l'estrade.

Mes pieds ont beaucoup chauffé et j'ai mal. Je finis par m'arrêter chez Vic et Igor pour percer une ampoule, je n'ose pas ouvrir l'autre chaussure, et je le sens comme une perte de temps... Il est 6h30, il reste à peine quelques heures pour faire encore un maximum de kilomètres. Je calcule sans cesse l'allure minimale que je dois maintenir pour atteindre enfin les 180km, et je me désespère qu'elle ne diminue pas. Et ce n'est pas en m'arrêtant que ça va s'arranger, mais je n'ai guère le choix, ça chauffe sévèrement et c'est pas joli. On perce avec l'aiguille de mon dossard, puis je change de chaussettes. Mais en fait en repartant j'ai tellement mal à mes ampoules que j'ai envie de pleurer, je n'arrive pas à courir et je n'ai pas envie que ma course s'arrête sur une connerie d'ampoules... c'est frustrant ! Bon, je termine le tour tant bien que mal pour arriver jusqu'aux podologues, je passe le chrono à 6h29 avec 150km au compteur ou quasi, et je bifurque dans le bâtiment. Je n'avais pas envie de rentrer, peur d'avoir trop froid en ressortant, peur de perdre du temps, mais je ne peux pas continuer comme ça.
l'équipe des podologues
J'aimerais que ça aille super vite, mais je ne veux pas non plus bousculer les bénévoles, alors je mets à profit cet arrêt forcé pour m'allonger sur la table et me relaxer un peu. Apparemment j'ai des ampoules sous le pied aussi, des ampoules géantes, "un soleil", bref, il met un moment à me patcher les 2 pieds, puis Jacques qui passait par là lui montre une autre ampoule qu'il avait ratée entre les orteils, il la patche aussi. On ignore celles qui sont en train d'apparaître sur les petits orteils, et je repars après 15 ou 20mn de pause, la plus longue depuis le début de la course, et la 1e depuis les 100km. 

Je ressors des podologues vers 6h50. Les premiers pas sont difficiles et très (très) douloureux... je me demande même si ce n'est pas encore pire qu'avant l'arrêt. En plus je suis frigorifiée, je grelotte un peu, je dois faire quelques centaines de mètres comme je suis pour aller à ma table prendre ma polaire, accrochée au dossier de ma chaise elle a pris l'humidité ambiante, même erreur que l'an dernier (un jour j'apprendrai...). Bon, cette fois je n'ai rien d'autre donc je passe la polaire humide par-dessus ma veste histoire de rester au sec, et je mets aussi mon bonnet, réchauffer la tête c'est le principal. Me voilà un peu réchauffée, par contre j'ai toujours aussi mal aux pieds, et je finis le tour en marchant en espérant que la douleur finisse par passer.


7h - 150.1km, 2e femme (8km derriere Nadine), 14e scratch
Classemt femmes: 1)Nadine 158.2km (+6), 2)Carole 150.1km (+3), 3)Mimi 132.8km (+5), 4)Sylvie 132.8km (+5)

Je repasse la ligne juste avant 7h, l'écran m'annonce 150.1km, je suis déçue, je croyais que j'avais déjà fait 150 avant de m'arrêter chez les podologues. Je dois encore faire un 2e tour au ralenti, puis d'un coup j'en ai marre de marcher, alors je dis merde à la douleur et je repars en trottinant, puis de plus en plus vite, en remettant la musique pour me lancer. Et je me mets aussi à chanter à tue-tête. Du coup je peux enlever la polaire après seulement 2 tours avec, je la jette au passage à ma table, mais je garde le bonnet jaune fluo pour pas prendre froid non plus.

Le jour se lève peu à peu et le parcours se réveille, frigorifié par l'évaporation de la rosée nocturne qui rafraîchit l'atmosphère.
 

Il y a de plus en plus de monde sur le circuit. Beaucoup de coureurs reviennent avec le soleil. Et mon second (troisième ? quatrième ?) souffle revient aussi. Je chante et cours en regardant le lever de soleil. A un moment je double 2 marcheuses au debut de l'allée des camping cars, en pointant le soleil levant avec un sourire jusqu'aux oreilles en admiration devant le spectacle, et en chantant à tue-tête, et je les entend se marrer :-)

C'est sûr que j'étais plus tranquille la nuit pour chanter :-) Un gars que je double quand il marche avec une fille me dit que je "chante pas bien", en rigolant je suppose, et je répond que je me sauve vite alors, puis je les perds vite effectivement. Florence la marcheuse quand je la double me dit qu'elle n'a même plus besoin de se retourner pour me voir arriver car elle m'entend chanter et elle sait que c'est moi. Pascal lui me fait remarquer que je chantais du Moustaki tout à l'heure (c'était "nous avons toute la vie pour nous amuser, nous avons toute la mort pour nous reposer", là c'est passé à Goldman "je marche seul") et que c'était joli.
Florence, la marcheuse au grand sourire et super foulée

Quelques tours plus tard alors que je tournais un peu avec Nadine que je venais de rattraper, je me rends compte que mon GPS a 2 tours d'avance, ou l'écran de télé 2 tours de retard. Du coup je me persuade qu'ils ont oublié de me compter des tours, et je commence à cogiter, c'est très mauvais pour le moral, et je ralentis alors que je tournais bien depuis un moment. Alors quand je repasse sur la ligne je demande à JC qui est assis avec les PAC-informagiciens combien de tours ils ont pour moi ? ils en ont 2 de moins que ma montre (156 vs 158 ou quelque chose comme ça). "vous m'en avez sucré alors", je stresse vite... Aussitôt il me rassure, me dit qu'ils vont tout vérifier, et je repars presque gênée en lui disant "ou alors c'est ma montre qui déconne". Mais ça me stresse et ça suffit à me faire marcher au lieu de courir et je reperds Nadine...


Et au tour suivant effectivement JC vient à ma rencontre et marche quelques dizaines de mètres avec moi pour m'expliquer qu'ils ont vérifié et que je suis bien en 6mn par tour depuis les 10 derniers tours, pas de raté. C'est tout ce qu'il me fallait pour me rassurer, je m'excuse de les avoir stressés avec ça et je repars rassurée. En fait c'est sans doute mon GPS qui a buggé pendant que j'étais dans le bâtiment, mais je n'avais pas fait gaffe sur le coup.


8h - 158.2km (-7), 2e femme, 12e scratch
Classmt F: 1)Nadine 165.3km (+7), 2)Carole 158.2km (+8), 3)Mimi 138.9km (+6), 4)Sylvie 136.9km (+4)

Je continue sur ma lancée, la musique à fond, je chante et je m'éclate. Il y a plein de monde de retour sur le circuit avec le jour, et tellement de spectateurs à l'entrée de la zone de ravito que c'est dur d'accéder à ma table par moments... Et aussi de plus en plus d'encouragements, et ça c'est cool !
Par contre devant les premiers commencent à souffrir et marchent de plus en plus. Angel qui était dans les premiers la veille, ne fait plus que marcher, je les double plein de fois, ils sont 2 ou 3 ensemble et discutent en marchant tranquillement. Nadine et Fabrice souffrent.
Fabrice, 1e au scratch
Nadine, 1e femme, 6e au scratch
A 8h20 je passe les 160km, Victor poste l'update sur Facebook.
déjà 160km, plus que 20, à 8h20




A ce moment je compte les kilomètres pour atteindre les 180km, mais de plus en plus de monde me dit que je ne suis pas loin de Nadine et que je vais bientôt la rattraper. Mais dans ma tête c'est impossible, c'est Nadine, elle est trop forte, dans une autre ligue... Mais c'est vrai que je suis plus en forme qu'elle.


A force de courir aussi vite, je me réchauffe de plus en plus, je tombe le bonnet, je le balance à côté de ma table, mes deux pauvres supporters ont l'air frigorifiés sous leur couverture. Je tombe la veste peu de temps plus tard.


Je repars de plus belle, en essayant de ne pas (trop) m'emballer trop tôt. A 8h50, j'enchaîne 2 tours en 6'07" puis 6'05" (dixit Garmin !), mes tours les plus rapides depuis le départ, et il faut encore tenir quelques heures. Je double Nadine 2 fois assez rapprochées, je suis maintenant remontée à 6 tours derrière elle mais je n'y crois toujours pas vraiment (ou je refuse d'y croire de peur d'être déçue), il reste si peu de temps. Remonter 6 tours en 2 heures, est-ce que c'est seulement possible ? Pour l'instant je me contente d'aller chercher mon record et cette barre des 180km qui m'a échappé plusieurs fois.

Et je chante toujours. Jusqu'à ce qu'en plein au milieu de ma chanson préférée dans ma séquence I Muvrini (pratique parce que personne comprend ce que je chante ^^), mon iPod tombe en panne. Arrêt à ma table pour en changer immédiatement, pas moyen que je continue sans musique à ce moment, Victor met du temps à le trouver, je m'impatiente... en silence :-) On ne tape pas les bénévoles et les accompagnateurs ! Mais je n'ai pas une seconde à perdre. Je ne sais pas pourquoi je ressentais cette urgence à ce moment-là, alors que j'étais déjà quasi assurée de passer mon record (177km à Grenoble en octobre dernier), que j'avais abandonné l'idée des 200km depuis bien longtemps, et pas encore adopté celle de finir en tête... 


Mais tout le monde me pousse ! On me dit que je ne suis que 6 tours derrière Nadine mais ça me semble injouable de la rattraper. J'essaye juste de faire ma marque, je me bats contre moi-même plus que contre quiconque. Des bénévoles font le tour du circuit en sens inverse, et me refont courir dès qu'ils me surprennent à marcher, à un endroit différent à chaque fois "eh oui on se déplace !" "on peut jamais se reposer avec vous !" je dis, mais je repars en courant, il n'en faut pas plus des fois... Et je leur suis reconnaissante de me pousser comme ça.

Je revois aussi Claire qui s'était arrêtée pour la nuit après avoir fait 100km, son objectif pour son premier 24 heures. Elle tourne bien ce matin, bien reposée (et finira à 129km).

Nadège court comme une folle aussi, à une super vitesse, mais super concentrée, elle ne répond pas trop quand j'essaye de l'encourager ou de discuter. De temps en temps c'est moi qui la double, de temps en temps l'inverse. Je me demande même à un moment si c'est elle la 3e au classement qui me remonte dessus, pour être si motivée... (En fait non, elle est 6e et finira avec 150km, mais je n'en savais rien.) A un moment on passe ensemble la ligne et tout le monde scande mon prénom, elle me dit que je suis "une star ici" :-)
Nadège, 6e F, 130km
Carole, 2e F, 160km
























J'en suis presque gênée, c'est vrai que j'ai droit à une ovation à chaque passage, les bénévoles scandent mon nom. Eric m'envoie un message dans la PAC aux lettres "Carole, Carole, Carole" parce que c'est ce qu'il entendait au live :-) J'ai un peu l'impression de me faire mitrailler par des photographes aussi, mais je pose volontiers ;-) tout ça m'empêche de réfléchir, de penser que j'ai mal. Et j'avance bien ! 8km dans l'heure, sachant que je marche par moments et que je m'arrête souvent boire un coup ou manger un truc (ou juste faire un câlin à Vic pasque j'ai trop mal), ça veut dire que quand je cours, je cours vite... A cette allure mes quadris hurlent de douleur à nouveau... plus fort que les ampoules, que j'oublie un peu du coup. Voire un peu trop fort. Du coup pendant un de mes nombreux arrêts à ma table, je cherche un 3e paracétamol, et le fais descendre avec quelques gorgées du chocolat chaud que Vic m'a servi. Un chocolat chaud, c'est bien parce que ça change, mais je préfère éviter d'abuser de tout ce qui pourrait me rendre malade (c-à-d à peu près tout à ce stade...)


9h - 166.3km, 2e femme (-4), 12e scratch
Classement F: 1)Nadine 170.3km (+5), 2)Carole 166.3 (+8), 3) Mimi 146km (+7), 4) Sylvie 141.9km (+5)

Maintenant je sais exactement ce que je veux manger, il me faut du sucre, je demande à Vic des pâtes de fruit en pensant à celles que j'ai dédaignées pendant la nuit, mais entre temps elles ont disparu ;-) et il n'y en a plus au ravito... Bon, je me rabats sur les compotes que j'ai apportées en espérant que ça soit assez sucré, terrifiée à l'idée de faire une hypoglycémie avant la fin qui me stopperait net dans mon élan (il faut dire que je suis une habituée...).
9h08, high five avec mes super supporters
Je discute un peu en marchant avec Pascal qui a guidé plusieurs coureurs malvoyants





Le circuit est de plus en plus peuplé, avec des allures de course très disparates.
Nadine, 7e avec 170.3km, souffre du dos...
Mathieu et sa super foulée, 8e avec 170.3km
Jean-Christophe du PAC, 3e avec 183.5km,
va chercher les 200 !
Pascal, 16e avec 152.1km, tout en
servant de guide de temps en temps
En tête de la course, Fabrice est vraiment mal et c'est Patrick, marcheur avec son attelle au genou, qui l'emmène dans son rythme pour qu'il continue à avancer.

Je les passe régulièrement, on s'encourage mutuellement, Fabrice me demande si je suis loin de la première. Cette fois je sais que j'ai environ 4 tours de retard, je progresse, mais je ne sais pas si je remonte assez vite, il reste moins de 2 heures... Alors je reste réticente, j'ai toujours ce dilemme entre tenter d'aller la chercher, y croire au risque de rater et d'être déçue, ou refuser d'y croire et ne même pas tenter pour ne pas être déçue si je n'y arrive pas avant la fin. Je suis partagée entre l'envie que la torture se termine (il paraît que ça fait quand même plus de 22 heures qu'on court), et le besoin d'avoir plus de temps pour remonter... il ne faudrait pas que ça se termine juste un peu trop tôt...

Alors que je passe la ligne, les bénévoles m'annoncent que je n'ai que 4 tours de retard sur Nadine, puis quelques centaines de mètres plus loin en rentrant dans le stade sur le tapis rouge, j'entends le micro derrière moi accueillir Nadine en lui disant qu'elle a 5 tours d'avance (sur moi, donc). ça me redescend le moral et je me dis que c'est impossible je n'arriverai pas à la rattraper, on va à la même vitesse, l'écart ne décroit plus, et il ne reste plus que 2h. Alors que les bénévoles, et Victor, et tout le monde, ils n'arrêtent pas de me dire que je n'ai "que" 4 tours de retard, ils y croient, et je n'arrive pas à y croire avec eux, je me crie dessus, je me parle à moi-même, non c'est pas possible, j'y arriverai pas ! Puis d'un coup sans m'en rendre compte je me retrouve à 2 ou 3 tours seulement derrière Nadine et j'ai un déclic, je me dis (enfin) que c'est possible. En fait Vic me dira plus tard qu'elle s'était arrêtée un petit peu (juste avant 9h en fait). Le seul fait de voir enfin se réduire l'écart me motive à aller la chercher. Et tous les bénévoles me poussent à y aller, à la chercher. Alors je finis par me prendre au jeu de la course-poursuite. Après tout pourquoi pas ? Qui ne tente rien n'a rien, et surtout je ne voudrais pas avoir le regret de n'avoir même pas tenté quelque chose.

Pour vraiment passer en mode course rapide, j'abandonne le confort de mon t-shirt long qui me garde au chaud même quand je marche, je tombe les manches longues que je remplace par mon débardeur. A un passage je demande le débardeur à Vic, au suivant j'enlève mes manches longues avant d'arriver et je fais l'échange standard au vol. J'enfile le débardeur en remontant le couloir de ravito en courant, il fait déjà tellement bon que j'aurais pu continuer sans le débardeur, mais je vais m'éviter quelques remarques :-) d'autant que de nombreux coureurs, ou plutôt marcheurs, sont encore en tenue de nuit, collant long, polaire, et ont l'air frigorifiés...
De plus en plus de monde de retour sur le circuit après le désert de la nuit, mais du coup aussi de plus en plus de monde à doubler, slalommer, ceux qui se poussent en entendant arriver les rares qui courent encore, ceux qui sont à moitié endormis et qu'il faut doubler, ceux qui courent aussi mais plus lentement, les petits groupes qui se sont formés partout de marcheurs qui avancent tranquillement en attendant juste que ça se termine. Christian au micro dit et répète aux marcheurs de se mettre sur l'extérieur pour laisser la corde aux coureurs, et pour moi ça devient de plus en plus dur de changer de trajectoire, je finis par crier "pardon" pour libérer un passage, mais ça ne marche pas toujours. D'autres voient mon ombre arriver ou m'entendent chanter ;-) je passe en les remerciant de faire l'effort que je n'arrive plus à faire de changer de trajectoire... c'est plus facile en marchant. Des fois je suis obligée de m'arrêter pour passer les chicanes où des "bouchons" se forment, et repartir est toujours difficile, rupture de rythme... mais tout le monde cherche à minimiser l'effort maintenant, c'est normal.
En route pour doubler Nadège


Christian (Dal Corso) a sorti les déguisements avec 2 coureuses, bon moment pour "réveiller les esprits" :-) mais il marche de plus en plus.

Christine et le SATUC dans leur tente au bout à gauche de l'allée des ravitos perso, m'encouragent quand je passe, et les équipes de soutien à gauche et à droite de cette fin d'allée aussi pendant les dernières heures m'applaudissent à chaque passage :-o Je suis devenue la star du circuit, tout le monde me pousse à remonter, je suppose que pour les spectateurs c'est plus fun de voir une remontée fantastique qu'un classement déjà établi. A chaque passage Christian m'encourage, me dit combien de tours de retard j'ai.
Encouragée par Christian
 



Et je me fais mitrailler par les photographes du PAC :-)
 

 


10h - 174.4 km, 12e scratch, 2e femme (2km derrière Nadine)
Classement F: 1)Nadine 176.4km (+6), 2)Carole 174.4 (+8), 3) Mimi 151.1km (+5), 4) Sylvie 146km (+4)

Là c'est game on. Je suis à fond, concentration maximale sur l'objectif, la seule chose qui compte.


Je cours (relativement) vite, mais m'arrête presque à chaque tour pour boire de l'eau gazeuse, de temps en temps prendre une compote, et souvent pour m'asperger les jambes à la bombe à froid (déjà la 2e).
Sur le point de doubler Jean-Marc le coureur savoyard

La dernière heure d'un 24 heure, c'est celle où tu profites. Tu as couru 23 heures pour en arriver là, maintenant il n'y a plus qu'à finir. 

Courir (ou marcher) avec le sourire.


C'est l'heure des olas.


L'heure de réclamer les encouragements de la foule


C'est l'heure des accélérations fantastiques boostées par les endorphines.
Nadège en pleine accélération


L'heure de ne plus se poser de questions et d'y aller à fond, de donner tout ce qu'il te reste, de rendre aux bénévoles et aux spectateurs.
"nymphe des bois" comme dit ma soeur en me voyant sur la photo
L'heure d'atteindre ton objectif, l'heure où un rêve se réalise. Jean-Christophe du PAC court pour atteindre la barre des 200km, son club le pousse et le porte et il les atteindra tout juste, magnifique ! mais ça je ne le verrai qu'après, quand il sera tout ému sur le podium avec la salle lui chantant "il est vraiment phénoménal". Trop concentrée sur ma propre course, et lui sur la sienne, pour réaliser avant, même si je l'avais vu passer avec son dossard 31 comme Toulouse :-) ils étaient rares ceux qui me doublaient encore à cette heure là. Il y a aussi Mathieu avec son dossard 100 et sa super foulée (qui finira 5e avec 191.8km).
JC et Christian
Mais ça peut aussi être une heure de torture pour les coureurs blessés ou épuisés... Nadine n'est pas bien, elle ne peut plus que marcher, et je remonte de plus en plus vite sur elle.


Fabrice et Patrick tournent toujours ensemble.


Peu après 10h15, je passe mon record ! 177.6km, sous l'ovation car annoncé au tour précédent. J'avais même demandé à Vic de venir faire une photo, mais je suis "passée trop vite" :-)
En route vers mon record

177km !
Maintenant c'est parti pour les 180km. Tout s'enchaîne très vite. Je fais encore 2 tours, et alors que j'allais annoncer mon passage des 180km (peu après 10h30), Christian m'accueille avec un commentaire enthousiaste "Carole au prochain tour tu es première !" Du coup je n'ai même pas le temps de réaliser que j'ai enfin passé la fameuse barre des 180 km, seulement que je suis dans le même tour que Nadine :-o Après des heures de remontée incertaine, je me prends un coup d'adrénaline !



En rentrant dans le stade 200m plus loin, un bénévole m'attend et marche avec moi pour me dire que je lui ai pris 4'30 dans le dernier tour et je suis 2'30" derrière elle, donc si je continue comme ça sans m'exciter je l'aurai. Ne pas s'exciter trop tôt surtout. Trouver le juste équilibre, on avance vraiment sur une fine ligne au bord de l'épuisement total. Puis c'est Victor qui me dit que je suis plus qu'un tour derrière, je lui demande si elle est loin devant, il répond juste "un peu", honnête :-) J'essaye de la voir en face sur le circuit mais ça tourne trop, et puis d'un coup, virage à droite, et là, sur la ligne droite le long du parking de camping cars, je vois son t-shirt jaune, je remonte, je la double, je continue, j'accélère même pour passer dans l'aire de chronométrage sous l'ovation et faire un high five à Christian le speaker et à quelques bénévoles. 

A 10h45 j'ai 200m d'avance quand je repasse la ligne en première position sous l'ovation.
10h42, 200m d'avance
Je jette un oeil à ma montre, il me reste 18' à tenir maintenant sans me faire rattraper, mais je discute avec qqun en marchant la section cabossée tapis rouge et graviers à l'entrée du stade, il me dit qu'elle ne viendra pas me chercher, elle se connait et ne veut pas finir à l'hôpital, je n'ai pas besoin d'aller très vite pour garder mon avance. Euh, de toutes façons, je ne peux pas aller très vite, j'ai tellement donné pour aller la chercher... Victor a immortalisé l'instant et poste la photo sur facebook avec un commentaire "et la coureuse de tête est...". Il est à fond lui aussi, presque autant que moi. Il court dans tous les sens entre le ravito, le chrono, et ma table.

Maintenant que je n'ai plus la pression de rattraper Nadine à temps je relâche un peu, je marche après un tour précédent en moins de 6mn :-o puis je recours parce que tout le monde m'encourage et que c'est bientôt fini et qu'il ne faut rien regretter. Bientôt fini oui, je remarque enfin que tous les autres ont déjà récupéré leur témoin et qu'il va falloir que j'y pense moi aussi. Le témoin, ce bâton de bois qu'on doit poser au sol pour marquer notre position finale.

Laure, 13e femme, 121.27km
Fabrice, toujours 1er, 207km
Evidemment le temps de finir le tour, j'ai déjà complètement oublié cette histoire de témoin, mais une bénévole me le met littéralement dans la main à mon passage.

Alors que je rentre dans le stade avec mon témoin dans la main, un bénévole me blague que ce n'est pas un relais, je ne peux pas le passer à un relayeur pour me remplacer. Ah non ! de toutes façons je n'ai pas envie, j'ai mérité de finir moi-même ce que j'ai commencé ! :-) A vrai dire je le garderais même bien comme souvenir celui-là !


J'ai encore le temps de finir le tour avec mon témoin.



On nous a expliqué qu'il y aurait un premier coup de feu 1mn avant la fin, puis un 2e pour marquer la fin. On s'arrêtera sur place, on posera dossard et témoin pour marquer notre position, et on pourra bouger, les officiels mesureront la distance exacte du dernier tour de chacun.
l'équipe de mesurage du dernier tour
Je traverse l'allée des ravitos perso, et j'attaque mon dernier tour, je croise Pascal et on échange un high 5, puis je pars pour le sprint final.


11h - 184.27km - 1e femme (+0.86km), 10e scratch
J'ai fait 10km dans cette dernière heure ! :-o

Il faut me dire que c'est fini car je n'ai pas entendu les coups de pistolet du tout, ni l'un ni l'autre, je venais de regarder ma montre il restait 2mn, j'avais à peine commencé à sprinter que déjà c'était fini, et à ma montre il était bien 11h je n'en revenais pas, j'avais vraiment déjà sprinté 2mn sans m'en rendre compte ? Bon, je m'étale par terre alors.
Carole, 1e femme, 184.27km
Fabrice, 1e, 207.16km




















2 secondes plus tard mon frangin arrive dans l'autre sens pour me retrouver trop content, "j'suis trop fier de toi !"


Puis Igor arrive, et en plus il m'apporte de l'eau.

Je ne connais pas encore ma distance exacte, mais je sais que j'ai passé les 180km, avec la stratégie du "visez la lune pour retomber parmi les étoiles" : partir en visant 200km, et voir jusqu'où je pouvais aller. Et je sais aussi que j'ai gagné la course ! Et ça c'est assez hallucinant, déjà c'est la première fois, et puis je visais juste de monter sur le podium, probablement derrière Nathalie et Nadine... 
Mimi, 3e femme, 157.7km
Nadine, 2e femme, 183.4km


Un gamin passe sur son vélo et s'arrête à notre niveau pour me féliciter : "Carole tu es trop forte, tu cours trop bien", il est trop mignon ! et ça fait toujours plaisir. Les bénévoles (positionnés à intervalles rapprochés sur tout le parcours en cette fin de course pour s'assurer que tout se passe bien) me disent de poser mes 2 dossards avec mon témoin, Victor les décroche sur mon cadavre :-)

Puis les secouristes remontent le parcours en marchant, nous demandent si tout va bien, me donnent encore de l'eau, puis me ramènent en brancard et en ambulance. On va dire que j'avais du mal à me remettre debout. Ils me ramènent direct au poste de secours où on me prend ma tension et on me surveille un peu, puis comme ça va pas si mal, on me laisse aller me doucher, en bonne compagnie, "just in case". Pendant ce temps mon équipe de soutien qui n'a déjà pas chômé range tout le matos étalé sur notre table au ravito, me ramènent mes affaires de rechange, et réalisent que Victor a pris une insolation sous ce soleil...!

13h podiums
Puis on s'assied tous dans le gymnase pour la remise des prix.

Pendant ce temps à Turin, Piero a remporté la course open avec 240km !

Et mon équipe tombe enfin de sommeil


Je dois les réveiller pour mon podium... (qui se fait à plat, parce qu'ils en avaient marre de nous porter pour nous mettre dessus ^^)

Où on me passe le micro... Tout ce que je peux dire, c'est que "je sais pas comment on ferait sans vous, merci à tous les bénévoles, et à tous les autres coureurs". Ils m'ont tous portée sur la fin, je n'ai presque pas vu passer les dernières heures. Fabrice Puaud était en larmes en remerciant Patrick, et en nous racontant son urine "couleur coca". Et JC Chust, lui aux anges après avoir atteint tout juste les 200km (et fini 2e, accessoirement :-) )

Podium hommes + femmes pour la photo.

Puis un journaliste de la Dépêche du Midi vient me poser quelques questions, après avoir interviewé Fabrice.

C'est seulement là que j'apprends combien de kilomètres j'ai couru exactement : 184.27, et même quelques centimètres derrière. Je termine dans le top 10 au scratch (résultats ici), et première senior hommes et femmes confondus :-o Bon, j'avoue, on était 12 (8 H et 4 F). Les 24h, une course de "vieux".

Suit le buffet où je n'ai pas vraiment faim. Cette fois je me suis alimentée jusqu'au bout de la course et je n'ai pas fait d'hypo. Et puis j'avais eu droit à un pain au chocolat en sortant du poste de secours :-) Mais je profite quand même de la tarte aux pommes !
Avec JC Kiburse le grand organisateur de cette énorme course
Avec Christian Reina l'animateur de la course
Retour
On demande aux bénévoles, et en 2mn on a trouvé un volontaire pour nous raccompagner tous les 3 et tout notre barda (sauf les chaises pliantes que les garçons ont oubliées sur place) : Jacques nous reconduit jusqu'à Saint-Cyprien dans son carrosse, au pied de l'immeuble de Victor.
Merci Jacques !
On passe l'aprem à comater, ou au téléphone, ou sur facebook, pour remercier tous mes supporters proches ou lointains, pendant que les 2 garçons dorment à poings fermés. Puis papa et sa coéquipière de bridge viennent nous chercher à Saint-Cyp, j'arrive tout juste à marcher jusqu'à la voiture ! Cette fois-ci j'ai eu la bonne idée de poser une semaine de vacances pour récupérer de la course, et commencer à écrire mon compte-rendu (ça n'a pas suffi...).
 
Il m'a fallu 2 ou 3 jours pour marcher normalement et réussir à m'assoir ou monter et descendre des marches... Les quadriceps comme des bouts de bois, et des jolies ampoules... Et j'ai réussi à attendre jusqu'au vendredi avant de retourner courir :-D

Retour en avion, j'ai dû démonter ma coupe.


Conclusion
à chaque 24h, je progresse, mais surtout je règle un truc qui n'allait pas sur une course précédente, mais je trouve aussi autre chose qui peut foirer. Cette fois-ci aucun problème d'estomac, et plutôt bien géré l'alimentation pour éviter les coups de mou, pas non plus de coup de sommeil à ne plus tenir debout. Mais par contre les cuisses raides comme des bouts de bois dès l'après-midi, et des ampoules alors que je n'en ai jamais d'habitude... (la Nok, y a que ça de vrai) Enfin comme ça, j'ai encore des points à améliorer pour la prochaine fois! D'ailleurs je n'ai qu'une hâte c'est de recommencer, mais comme il n'y aura pas de 24 heures de Grenoble en 2015, je ne sais pas encore quand sera la prochaine. Déjà en manque ! :-D